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Pierre Cordier
Question N° 87 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 12 juillet 2022

M. Pierre Cordier appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les adaptations nécessaires du cadre d'exercice de la profession vétérinaire. Il n'y a jamais eu autant d'animaux de compagnie en France : 1 foyer sur 2 possède un animal de compagnie selon le ministère de l'agriculture. Les confinements successifs liés à la covid-19 ont vu le nombre d'adoptions d'animaux de compagnie augmenter significativement. La société a évolué et accorde de plus en plus de valeur à la santé et au bien-être des animaux, désormais considérés par le code civil comme « des êtres vivants doués de sensibilité ». Les progrès thérapeutiques et techniques de la médecine humaine sont désormais appliqués aux animaux, notamment en matière de diagnostic et de traitement des cancers. Les 20 000 vétérinaires exerçant en France font face à une pression administrative de plus en plus forte pour la gestion de leurs cliniques. Les cliniques ont de plus en plus de difficultés à recruter des vétérinaires et des auxiliaires de santé vétérinaire (ASV) pour répondre à la demande, alors que les vétérinaires désireux de prendre leur retraite n'arrivent pas à trouver de repreneur pour assurer la pérennité de leur clinique, entraînant ainsi la fermeture de certains établissements. Le sentiment d'isolement professionnel décourage les vétérinaires de s'installer en zones rurales, créant ainsi de véritables déserts médicaux. Les jeunes vétérinaires aspirent à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. L'installation de nouvelles cliniques vétérinaires nécessite des investissements de plus en plus lourds afin de toujours mieux répondre aux attentes des clients. Dans le respect du cadre d'exercice libéral de la profession vétérinaire, garant de l'indépendance professionnelle, de nombreux vétérinaires ont décidé de se regrouper au sein de groupes vétérinaires. Ces groupes constituent l'une des réponses possibles aux enjeux auxquels les vétérinaires sont confrontés, tout en améliorant l'offre de soins proposée aux propriétaires d'animaux, grâce à un soutien en matière d'investissements afin d'équiper les cliniques avec du matériel médical dernier cri, pour pouvoir faire des diagnostics plus précis et dispenser de meilleurs traitements (scanner, IRM, radiothérapie). L'accès à une grande variété d'expertises médicales au sein d'un même réseau, le partage d'expérience et la formation continue des équipes permettent de progresser collectivement en matière de médecine animale et d'accueil des clients. Une coordination en matière de traitement des urgences et de gardes de nuit permettent également à tous les animaux d'être pris en charge à tout moment, partout en France. La mutualisation et la délégation des fonctions administratives permettent enfin de libérer du temps pour les vétérinaires et leur permettre de se consacrer plus pleinement à leur mission de santé. Pour autant, certains centres hospitaliers vétérinaires et cliniques vétérinaires de proximité ayant rejoint des groupes sont aujourd'hui menacés de radiation par les autorités ordinales alors que les regroupements de vétérinaires, qu'on observe partout en Europe, n'ont pas posé de problème similaire dans les pays voisins. Il souhaite par conséquent savoir si le Gouvernement va initier une grande concertation sur l'avenir de la profession vétérinaire pour éviter d'affaiblir encore l'offre de soins vétérinaires en France et redonner toute son attractivité au métier de vétérinaire.

Réponse émise le 10 janvier 2023

Le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire identifie clairement la désertification vétérinaire comme un enjeu majeur. Les vétérinaires travaillant en « rurale », c'est-à-dire auprès des animaux de rente, constituent un maillage indispensable à la surveillance des dangers sanitaires émergents, à l'intervention sanitaire d'urgence en cas de crises ainsi qu'au développement des élevages nécessaires à la souveraineté alimentaire. Depuis 2017, le ministère chargé de l'agriculture est engagé avec les professions agricole et vétérinaire dans une feuille de route pour le maintien des vétérinaires dans les territoires ruraux. De nombreux chantiers ont été engagés en faveur de l'ancrage territorial des vétérinaires avec un certain nombre de réalisations concrètes à la clé. Ainsi, en janvier 2022, un appel à manifestation d'intérêt (AMI) a été financé à hauteur de 295 000 euros (€) par le ministère chargé de l'agriculture et a été piloté par le conseil national de l'ordre des vétérinaires. Destiné aux territoires touchés par la désertification vétérinaire, il a permis de sélectionner 11 territoires pilotes afin de leur permettre d'être accompagnés dans la réalisation du diagnostic qualitatif et quantitatif de l'inadéquation entre l'offre et la demande de soins vétérinaires et l'identification des solutions adaptées à leurs spécificités locales. Ces travaux sont désormais terminés et le rapport final est attendu pour ce début d'année 2023. Avant la fin du 1er trimestre 2023, seront mis à disposition des acteurs territoriaux une méthodologie de diagnostic et une boîte à outil pour l'établissement d'un plan de lutte adapté et concret contre le délitement du maillage vétérinaire. Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent également contribuer à la lutte contre la désertification vétérinaire à travers l'octroi d'aides financières ou matérielles aux vétérinaires et aux étudiants s'engageant à exercer auprès des animaux d'élevage sur leur territoire. Cette aptitude a été introduite par la loi du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière et ses textes d'application. Les aides allouées peuvent s'élever jusqu'à 60 000 € par an par bénéficiaire. Un guide à destination des collectivités a été récemment publié sur le site du ministère chargé de l'agriculture afin de leur permettre de se familiariser avec le dispositif. Par ailleurs, depuis 2021, une nouvelle voie post-bac permet le recrutement direct de 160 élèves. Avec un cursus en école nationale vétérinaire (ENV) de 6 ans au lieu de 7 ou 8 ans par les autres voies de recrutement, ils entreront plus précocement sur le marché du travail pour répondre aux besoins du secteur. Les profils ainsi sélectionnés illustrent une diversité tant sociale que géographique susceptible de favoriser un ancrage en milieu rural. Pour accompagner l'augmentation de 35 % des effectifs étudiants en ENV sur les 8 dernières années, les écoles nationales vétérinaires se voient renforcées dans leurs moyens humains et financiers. Enfin, la feuille de route sur le maillage englobe également des chantiers portant sur l'exercice de la médecine et de la chirurgie des animaux ainsi que la prescription et la délivrance des médicaments vétérinaires (réforme du suivi sanitaire permanent en cours de finalisation, réforme de l'encadrement des groupements de producteurs agréés ayant-droit dérogataires du médicament vétérinaire, délégation d'actes aux auxiliaires spécialisés vétérinaires en 2023) et enfin un chantier, programmé en 2023, sur les missions, y comris leurs rémunérations, confiées par l'État aux vétérinaires sanitaires. Les objectifs sont d'adapter l'exercice de la profession aux évolutions des filières d'élevage et de la société, mais également de refonder le sens de la relation entre un éleveur et son vétérinaire.

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