M. Frédéric Maillot attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur le problème du harcèlement scolaire. En octobre 2013, le collège Bois de Nèfles de La Réunion a été le théâtre d'un drame qui marqua les esprits : une jeune fille, victime de cyberharcèlement sur les réseaux sociaux, s'était jetée du haut d'un étage du collège. Le Département de La Réunion, choqué et attristé, avait ainsi choisi ce collège pour organiser une manifestation afin de montrer sa solidarité à l'égard des proches de la victime. En France continentale, en décembre 2022, la petite Ambre, 11 ans, également victime de harcèlement scolaire, a mis fin à ses jours après s'être jetée du quatrième étage du domicile familial. Aujourd'hui, on estime que 10 % des élèves subiraient une forme quelconque de harcèlement scolaire à l'échelle nationale, c'est-à-dire environ 1 000 000 d'enfants par an. L'ampleur du phénomène et le souvenir de ces évènements tragiques le forcent à s'interroger sur l'efficacité des politiques publiques qui sont menées par l'éducation nationale pour protéger les enfants. Dans ce contexte, M. le député attire l'attention de M. le ministre sur la question du manque de personnel, de formation, de temps et de moyens des acteurs de terrain pour mettre en œuvre le programme « pHARe » de lutte contre le harcèlement scolaire. La réforme du 2 mars 2022 renforce la responsabilité civile des établissements et des équipes pédagogiques en matière de lutte contre le harcèlement scolaire, prévoyant également une meilleure formation des professionnels concernés par ce problème. Mais l'expérience personnelle et les témoignages du corps enseignant révèlent un véritable décalage entre la théorie et la pratique. Selon un rapport de la « mission d'information sur le harcèlement et le cyberharcèlement » du Sénat, 65 % des enseignants s'estiment mal armés face au harcèlement, notamment du fait d'un manque de formation, de difficultés à le détecter ou d'une absence de soutien de la hiérarchie. Les organisations syndicales de l'enseignement public et privé (sous contrat) partagent également ce même constat dramatique : la formation des enseignants sur la question du harcèlement scolaire est largement insuffisante, notamment pour les enseignants contractuels récemment embauchés. Il souhaiterait donc savoir quelles sont les mesures et les ressources supplémentaires qu'envisage de déployer le Gouvernement pour remédier au manque de moyens et de formation des équipes pédagogiques pour identifier et traiter les cas de harcèlement dans le cadre du programme « pHARe ».
Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse (MENJ) a fait de la lutte contre le harcèlement en milieu scolaire la grande cause de l'année scolaire 2023-2024, ce qui se traduit par la mise en place de mesures concrètes venant compléter la politique publique de prévention déjà déployée depuis 2011, notamment au travers le plan interministériel de lutte contre le harcèlement présenté le 27 septembre 2023, dont les objectifs sont : 100 % prévention, 100 % détection, 100 % solution. Le MENJ s'engage contre le harcèlement à travers des actions fortes : le programme Phare, obligatoire pour toutes les écoles élémentaires et tous les collèges publics, est étendu aux lycées à la rentrée 2023. Il repose sur la mobilisation et la formation des équipes éducatives, et vise à la constitution d'une communauté protectrice des enfants, ce qui implique la pleine association des élèves, des parents d'élèves et de tous les partenaires de l'École ; le ministère déploie en outre un effort inédit de formation de ses personnels et s'engage à ce que l'ensemble des personnels enseignants et d'encadrement soient formés sous quatre ans à compter de l'année 2023-2024 à la prévention, au repérage et la prise en charge des situations de harcèlement ; le renforcement du réseau des référents et personnes ressources de lutte contre le harcèlement à tous les niveaux du système éducatif : le pilotage et le suivi de la lutte contre le harcèlement sont renforcés dans les collèges et les lycées par la désignation de un à trois coordonnateurs harcèlement parmi les personnels volontaires et formés. Ce coordonnateur aura notamment pour missions d'appuyer le chef d'établissement dans le traitement et le suivi des situations et d'accompagner la mise en œuvre du plan de prévention du harcèlement à l'école ; face à une situation complexe ou d'une gravité particulière, les équipes ressources, directeurs d'école ou chefs d'établissement peuvent faire appel aux référents harcèlement de leur département ou de leur académie qui sont au nombre de 400 sur l'ensemble du territoire national. Une équipe départementale d'intervention sera en outre constituée par les directeurs et directrices académiques des services de l'éducation nationale pour intervenir au sein même des établissements sur les situations qui le nécessitent ; dans le premier degré, de nouvelles mesures réglementaires sont possibles en vertu du décret n° 2023-782 du 16 août 2023 pour écarter les écoliers auteurs de harcèlement sur décision du directeur ou de la directrice académique des services de l'éducation nationale en dernier recours, à des fins de protection de la victime. Afin que chacun poursuive sa scolarité dans les meilleures conditions, chaque décision de cette nature devra être accompagnée et suivie dans la durée par l'ensemble des équipes éducatives. Dans le second degré, à compter de la rentrée 2023, il est demandé aux chefs d'établissement d'engager systématiquement une procédure disciplinaire à l'encontre d'élèves auteurs de faits de harcèlement ou de cyber-harcèlement, y compris lorsque ceux-ci sont inscrits dans un autre établissement ; 1 000 volontaires de service civique supplémentaires ont dû être recrutés dès le mois d'octobre 2023 pour venir, dans les écoles et établissements scolaires, renforcer les équipes dédiées à la prévention et à la lutte contre le harcèlement. s'agissant du cyberharcèlement, le ministère coordonne une mobilisation collective interministérielle et contribue activement au dialogue entre les pouvoirs publics et les plateformes. L'éducation aux médias et à l'information, à travers notamment la certification Pix et le Safer Internet Day inscrit dans le programme Phare sont autant de temps investis par les personnels enseignants pour éduquer les élèves aux bonnes pratiques numériques et les sensibiliser aux risques. Cette formation contribue au développement de l'esprit critique, à la lutte contre la diffusion de contenus haineux en ligne et à l'apprentissage de la citoyenneté numérique. Elle comporte également une sensibilisation sur l'interdiction du harcèlement commis dans l'espace numérique, la manière de s'en protéger et les sanctions encourues en la matière ; de plus, le législateur a renforcé la protection de nos élèves en ligne : d'une part, la loi n° 2022-300 du 2 mars 2022 visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d'accès à internet offre aux parents la possibilité de mieux réguler l'usage que font leurs enfants sur leur outil connecté à internet ; d'autre part, la loi n° 2023-566 du 7 juillet 2023 visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne impose aux fournisseurs de services de réseaux sociaux en ligne exerçant leur activité en France de refuser l'inscription à leurs services des mineurs de quinze ans sauf autorisation expresse de l'un des titulaires de l'autorité parentale. Ainsi, le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse mobilise l'ensemble de ses personnels et consacre des moyens très significatifs pour prévenir, repérer et résoudre le plus tôt possible les situations de harcèlement et permettre aux élèves harcelés de poursuivre leur scolarité dans les meilleures conditions. Les personnels des services sociaux et de santé du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse sont également mobilisés dans le traitement des situations de harcèlement dans toutes leurs dimensions (prévention, repérage, accompagnement, sanction) ; ils peuvent être amenés à recommander aux familles, dans l'intérêt des enfants, une prise en charge extérieure par des personnels de santé ou bien des associations d'aide aux victimes partenaires de l'École. C'est une mobilisation générale pour que les élèves ne subissent plus de harcèlement à l'école.
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