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M. Damien Maudet interroge M. le ministre de la santé et de la prévention au sujet du décrochage massif des étudiants en soins infirmiers. « J'étais épuisé, stressé des stages, dégoûtés de ce que je voyais contre moi ou contre les patients. Tout le monde est à bout. Je pensais qu'on allait être bien accueilli, on est la relève, on est les soignants de demain et en fait, on nous en met plein la tête » raconte à France Info Louis, étudiant infirmier en deuxième année à Tour. Il est loin d'être le seul dans ce cas, puisque selon la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques : un étudiant sur dix abandonne ses études en soins infirmiers dès la première année en 2021. Trois fois plus qu'il y a 10 ans. En 2018, c'était près de 14 % des nouveaux entrant dans cette formation qui ne sont pas parvenus à la fin de leur cursus. Cette étude estime par ailleurs que le taux d'abandon au cours de la scolarité atteindrait environ 18 % pour la promotion 2019 et 22 % pour la promotion 2020. En cause, les conditions de travail dégradées et l'impossibilité d'effectuer son travail dignement par les coupes budgétaires. Les étudiants, comme Louis, vont jusqu'à considérer qu'il s'agit là de formations « maltraitantes ». Résultat, alors même que le nombre d'inscription a augmenté de 9 %, le nombre de diplômés chute de 7 % en dix ans. Les choix politiques de coupes budgétaires à l'hôpital public de M. le ministre ont eu des incidences directes sur la formation des futurs soignants. Parmi celles-ci : un manque criant d'encadrement. S'il manque déjà des infirmiers et infirmières pour prendre en charge les malades, comment veut-on qu'ils trouvent le temps et l'énergie de transmettre leurs savoirs aux futures générations ? Impossible. Les étudiants décrochent et M. le ministre alimente le cercle vicieux. Autre effet des coupes budgétaires, la rémunération infamante accordée aux stagiaires : 1,50 euro de l'heure. « On nous demande de faire des trucs qu'on n'a jamais vus ou qu'on ne sait pas faire, comme si on devait tout connaître et déjà être infirmier en fait. En plus, on est payé environ 1,50 euro de l'heure » déplore l'ancien étudiant. « Je trouve ça un petit peu aberrant qu'on nous paye si peu. Du coup, je travaille les week-ends et les vacances. Je travaille tout le temps. Franchement, quand j'ai arrêté, j'étais fatigué ». Fatigue physique et morale, manque de considération, finissent d'éloigner de ce métier pourtant essentiel même les plus passionnés. « Notre fille a voulu commencer à faire des études d'infirmière et au bout d'un an elle a arrêté. Quand elle a voulu reprendre, on n'a pas voulu d'elle. Pourtant elle était très motivée, elle avait mûri et était sûre de son choix de métier. Le système ne permet pas d'interruption des études, c'est dommage ! », avait pu lui confier à Périgueux le père d'une ancienne élève en soins infirmiers. Alors que l'on manque terriblement de soignants partout en France, alors que l'on ferme des lits d'hôpitaux par manque de personnel et même des services entiers, M. le ministre trouve le luxe de refuser les étudiants qui souhaitent revenir ? En cette journée internationale des infirmières et infirmiers, des centaines de professionnels ont décidé de s'habiller en noir pour protester contre les conditions d'exercices qui leur sont imposées. Face à cette détresse, au-delà de l'énième consultation que M. le ministre a débuté hier, au-delà des promesses qui n'arrivent jamais pour l'hôpital public, il lui demande ce qu'il compte mettre en place concrètement pour éviter de dégouter les infirmières et infirmiers de demain.
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