Mme Charlotte Leduc alerte M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie, sur l'injustice que représente le traitement de la question du « rachat des indemnités logements et chauffage » pour les anciens mineurs aujourd'hui retraités. Cette disposition permettait aux salariés d'acheter leur logement par un processus de rachat des droits aux indemnités logement et chauffage, avantages en nature à vie prévus par le statut des mineurs. La circulaire de Charbonnages de France du 9 février 1988 a fixé un système de coefficient de capitalisation défavorable aux ayants droit car les privant, notamment, du retour de leurs droits indemnitaires après amortissement du capital. Le Conseil d'État a jugé dès 2009 (Arrêt n° 312990) que cette circulaire était illégale. Pourtant le coefficient de capitalisation continue à s'appliquer aujourd'hui. Alors que son calcul prend en compte l'espérance de vie, ce coefficient n'a même jamais été revu depuis 1967. Enfin, alors même que les bénéficiaires ne perçoivent plus leurs indemnités, ils restent imposables sur celles-ci et ce bien au-delà de l'amortissement réel du capital constitué. Cette problématique concerne 17 750 anciens salariés de l'industrie minière. Face à la multiplication des litiges, la justice n'a pas su, jusqu'à présent, faire émerger une jurisprudence claire permettant de régler ces milliers de cas rapidement. Or la population concernée est âgée (82 ans en moyenne) et ne peut se permettre d'attendre indéfiniment une justice qui ne vient pas. Le pouvoir législatif a également tenté de remédier à cette question avec l'amendement déposé par la députée de la 2e circonscription de Saône-et-Loire au projet de loi de finance pour 2021. Malheureusement, celui-ci a été déclarée irrecevable financièrement. Cette irrecevabilité est injustifiable, l'article 40 ne doit pas constituer un outil constitutionnel détourné par le Gouvernement et la majorité pour accroitre les malheurs du peuple par pur dogmatisme budgétaire. Les ex-mineurs n'ont plus le temps d'attendre et ont le sentiment que les pouvoirs publics jouent la montre en attendant leur mort. Ces travailleurs et ces travailleuses ont participé à la reconstruction du pays dans l'après-guerre, ils ont permis le formidable décollage économique des « Trente Glorieuses », ils ont participé à la grandeur de la République. Les pouvoirs publics leur doivent respect et assistance dans leurs vieux jours. Les injustices qu'ils vivent sont intolérables. Elle lui demande quelles mesures le ministère compte mettre en œuvre pour prendre en compte les revendications des ex-mineurs et les rétablir dans leurs droits.
Les articles 22 et 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du mineur prévoient que les membres du personnel des exploitations minières ou assimilées perçoivent des prestations de chauffage et de logement. Ces avantages perdurent au-delà de la date d'entrée en retraite du mineur et bénéficient également, sous conditions, au conjoint survivant. Pour favoriser les projets personnels d‘acquisition de leur logement ou de construction d'un logement neuf, Charbonnages de France a offert à ses salariés, la possibilité de capitaliser, au moment de leur départ en retraite ou le cas échéant jusqu'à l'âge de 65 ans, leurs indemnités de chauffage et de logement, au lieu de continuer à les percevoir au fil du temps, tous les trimestres. Toutefois, sur le plan fiscal, l'imposition de ce capital l'année de sa perception pouvait avoir des conséquences financières lourdes pour les mineurs. Par conséquent, un mécanisme plus adapté et très avantageux pour l'intéressé a été mis en place. Ainsi, dans le cadre de la formule dite du contrat « viager », le capital versé par l'employeur n'est pas un revenu imposable. En revanche, les indemnités dont les intéressés restent bénéficiaires en vertu du statut du mineur - bien qu'elles cessent de leur être versées - sont considérées comme un revenu annuel ; elles sont donc imposables et supportent des cotisations sociales. En contrepartie, l'agent renonce de manière définitive au versement des indemnités. Ainsi, le principe depuis l'origine est que le mineur qui opte librement et en toute connaissance de cause pour la capitalisation de ses indemnités renonce définitivement pour l'avenir à la perception future de ses avantages en nature, sous quelque forme que ce soit. Pour un couple, ce principe est néanmoins atténué lorsque la capitalisation est faite sur une tête (cas le plus fréquent), en ce sens qu'au décès de celui sur la tête de qui la capitalisation a été calculée le conjoint survivant retrouve le service des avantages en nature en espèces. Ce mécanisme de rachat des indemnités a été validé dès 1949 par le ministre de l'industrie et du commerce dans un courrier du 13 octobre 1949. Sur cette base, Charbonnages de France, dans le cadre de son pouvoir de direction, a organisé concrètement au fil des ans, par voie de circulaires, la mise en œuvre du dispositif. Les modalités d'application ayant fait l'objet d'interprétations différente selon les bassins houillers, il a été décidé en 1988 d'harmoniser le dispositif et une circulaire du 9 février 1988 en a redéfini les principes généraux et les modalités d'application. Cette circulaire - qui a été annexée par arrêté interministériel du 7 juin 2006 au décret n° 2004-1466 du 23 décembre 2004 relatif aux missions de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) - a certes été déclarée illégale sur la forme par le Conseil d'Etat en 2009, mais elle n'a pas été annulée et cet arrêt n'emporte en tant que tel aucun effet sur les contrats de capitalisation, qui n'ont pas un fondement réglementaire. En effet, les contrats de capitalisation sont des contrats de droit privé régi par le code civil et plus particulièrement des contrats aléatoires au sens du code civil (articles 1964 à 1983) et nullement des contrats de prêt. L'aléa est en l'espèce la date du décès du mineur : s'il décède avant l'âge retenu pour le calcul du capital, son conjoint survivant ou ses héritiers ne sont pas tenus de rembourser à l'ANGDM jusqu'à concurrence de la somme versée initialement ; s'il vit au-delà de l'âge de référence, il ne peut plus prétendre aux indemnités qu'il aurait perçues en l'absence de contrat. Au fil du temps, le mécanisme fiscal du contrat de rachat qui avait un caractère viager, dans la mesure où il prenait fin au décès de l'intéressé, devenait source de nombreux contentieux. En effet, ce mécanisme qui avait pour but initial d'être favorable en étalant l'imposition s'est révélé défavorable avec l'augmentation de l'espérance de vie. C'est la raison pour laquelle, dans un souci d'équité, l'article 3 la loi de finances n° 2008-1425 du 27 Décembre 2008 pour 2009 est venu limiter dans le temps, (une fois atteint l‘âge de référence ayant servi au calcul du capital) la durée de la fiscalisation, l'objectif étant que ce dispositif fiscal viager prenne fin dès que le souscripteur du contrat s'est acquitté de l'intégralité des impôts correspondant au capital perçu. Par ailleurs, dans un souci de sécurité juridique, cet article 3 est venu confirmer que le choix de la capitalisation est un choix définitif, c'est-à-dire qu'il emporte renoncement définitif aux prestations viagères visées par le statut du mineur. Bien que la renonciation définitive aux prestations ait pour fondement la liberté contractuelle, qu'elle résulte de l'esprit même du dispositif et qu'elle ait été confirmée par l'article 3 de la loi de finances pour 2009, ce principe a continué à être fortement contesté en justice. Par arrêts du 27 février 2013, la Cour de cassation a jugé que dès lors que les contrats de capitalisation ont été signés lors du départ à la retraite des anciens mineurs (ce qui est le cas de la très grande majorité des contrats), la renonciation au bénéfice des indemnités viagères est licite. En revanche, par arrêt du 2 décembre 2014, la Cour de cassation a considéré que, dès lors que le contrat de capitalisation a été signé avant le départ à la retraite de l'intéressé, ce dernier recouvre le droit au versement de ses indemnités une fois atteint l'âge retenu pour le calcul du capital. Enfin, par arrêt du 11 septembre 2019, la Cour de cassation s'est placée sur le terrain de la prescription pour rejeter la demande des anciens mineurs de recouvrer leurs indemnités et ce, quelle que soit la date de signature du contrat. Ainsi, les anciens mineurs ont opté en toute connaissance de cause pour la capitalisation de leurs indemnités de chauffage et de logement issues du statut du mineur, parce que ce dispositif était avantageux. Si ce dernier a pu se révéler déséquilibré avec l'augmentation de l'espérance de vie, tel n'est plus le cas depuis que l'article 3 de la loi de finances pour 2009 a mis un terme à la fiscalisation viagère, rendant ainsi le dispositif équitable. Par ailleurs, la Cour de cassation ayant définitivement tranché la question du retour aux indemnités après l'âge retenu pour le calcul du capital, il n'est pas envisagé dans le contexte actuel un retour au versement des indemnités après l'âge retenu pour le calcul du capital.
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