M. Sébastien Delogu alerte M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur l'inefficacité de France Travail pour répondre aux besoins des personnes privées d'emploi. Le 19 avril 2023, Thibaut Guilluy, Haut-Commissaire à l'emploi et à l'engagement des entreprises, a remis à M. le ministre le rapport de la mission de préfiguration de France Travail. Au fil de ses 99 propositions, ce dernier dévoile la volonté du Gouvernement de contraindre le retour à l'emploi rapide de tous les demandeurs d'emploi en dépit de leur volonté, de leurs choix, de leurs qualifications ou de leurs problématiques sociales. Dans les faits, la transformation de Pôle emploi en France Travail s'attaque aux chômeurs plutôt qu'aux causes du chômage. Au dernier trimestre de l'année 2022, la Dares estimait le nombre d'emplois disponibles à 285 000 et le nombre de demandeurs d'emploi à 5 100 000, soit un rapport de 1 emploi pour 18 chômeurs. Dès lors, la problématique du chômage ne peut pas s'envisager sous l'angle unique de l'inadéquation entre la qualification des travailleurs et les attentes des emplois à pourvoir, qui, au demeurant, reste encore à démontrer. En partant d'un constat erroné, la création de France Travail échoue donc à apporter une réponse structurelle et adéquate aux problématiques sociales que rencontrent les personnes privées d'emploi. La création d'un guichet unique et virtuel pour tous entretiens accentue par ailleurs la confusion entre la situation des demandeurs d'emplois, qui ont le droit de bénéficier de l'assurance chômage, et celle des allocataires du revenu de solidarité active, qui ont le droit de bénéficier d'un filet de sécurité, qui leur assure un revenu de survie. En outre, forcer les jeunes, les seniors ou les personnes en situation de handicap à réaliser des formations qui ne sont ni diplômantes, ni certifiantes, ou des ateliers de mise en adéquation avec les attentes des chefs d'entreprises ne présente pas d'intérêt pour répondre à la crise que rencontrent les personnes privées d'emploi. D'autant plus que ces dernières se verront par la suite dans l'obligation d'accepter n'importe quel poste précaire, trouvé par un algorithme, sous peine de sanctions qui sont un coup de plus porté à elles et à leurs familles. À cela s'ajoute la mise en concurrence de l'ancien service public de l'emploi, des missions locales, de Cap emploi et de l'Apec. En somme, c'est un nouveau service aux entreprises, dévoilé dans le rapport de la mission de préfiguration de France Travail, qui se substitue au service public de l'emploi annoncé. Après avoir réduit d'un quart la durée du droit au chômage, après avoir décrété la présomption de démission pour les salariés en cas d'abandon de poste et après avoir enlevé aux travailleurs deux années supplémentaires de leur vie, le Gouvernement s'acharne encore à affaiblir les plus vulnérables. Il lui demande quand il prendra les mesures nécessaires pour assurer aux concitoyens le droit constitutionnel d'obtenir un emploi, pour rendre l'assurance chômage protectrice et pour en finir avec la souffrance au travail.
Le rapport de la mission de préfiguration de France Travail remis en avril 2023 a permis d'irriguer les réflexions relatives à la transformation du service public de l'emploi menées par le Gouvernement. Ces réflexions se sont ainsi traduites par la présentation au Parlement du projet de loi pour le plein emploi, adopté par le Sénat en première lecture le 11 juillet 2023. L'ambition portée par le projet de loi pour le plein emploi est de renforcer l'accompagnement des demandeurs d'emploi et d'amplifier l'offre de solutions à leur disposition. A ce titre, le projet de loi propose un contrat d'engagement rénové, élaboré conjointement par la personne en recherche d'emploi et l'organisme référent le plus adapté à sa situation sociale et professionnelle. Unifié autour d'un socle commun de droits et de devoirs, ce contrat, défini en fonction des besoins et aspirations de la personne en recherche d'emploi, tiendra notamment compte de ses compétences, qualifications et formations, de ses expériences professionnelles mais aussi de sa situation personnelle et familiale, et ce afin de lui proposer une offre de services pertinente et de qualité. La transformation proposée par le Gouvernement a par ailleurs vocation à améliorer la lisibilité et l'accessibilité de l'offre de service à destination des personnes en recherche d'emploi, et ce, quel que soit leur niveau de maîtrise des outils numériques, des démarches administratives ou leur point d'entrée (Pôle emploi, Missions locales, Cap emploi, …). Les demandeurs d'emploi pourront ainsi s'inscrire en ligne sur un portail d'inscription dédié, mais aussi, s'ils préfèrent, en guichet ou de façon assistée sur des bornes numériques auprès des membres du réseau France Travail. Les modalités de contacts avec l'organisme référent seront ensuite pleinement adaptées aux besoins des personnes dans le cadre de leur accompagnement. Outre une inscription rénovée et facilitée, le portail France travail doit également permettre aux personnes de mieux connaitre leurs droits, notamment en matière d'indemnisation au titre du chômage et de revenu de solidarité active, et fournira, à ce titre, des informations pertinentes au regard de leur situation. S'agissant des obligations auxquelles est tenu le demandeur d'emploi dans le cadre de son contrat d'engagement, d'une part, il doit être à nouveau souligné que celui-ci est le fruit d'une co-construction avec la personne et tient compte, à cet égard, de ses besoins et aspirations, y compris en matière de formation. D'autre part, le projet de loi fait mention de « l'offre raisonnable d'emploi » (ORE), une notion déjà présente dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi (PPAE) mais qui est ici entendue dans un sens plus personnalisé. En effet, il est prévu que le contrat d'engagement définisse cette ORE uniquement si la personne est en recherche d'une activité salariée et si elle dispose d'un projet professionnel suffisamment établi. La définition et l'évolution de l'ORE reposeront sur les échanges entre le demandeur d'emploi et son référent unique, qui, comme aujourd'hui, pourra par la suite proposer des offres d'emploi correspondant à celle-ci. Enfin, le projet de loi prévoit explicitement de donner toute leur place aux acteurs du service public de l'emploi au sein du réseau France Travail. Celui-ci sera constitué de l'Etat, des collectivités territoriales, de Pôle emploi mais aussi des deux opérateurs spécialisés que sont les Missions locales et Cap emploi. D'autres acteurs pourront également participer à ce réseau parmi lesquels ceux concourant au service public de l'emploi. Le réseau France Travail a ainsi vocation à renforcer la coopération de tous les acteurs de l'insertion et de l'emploi grâce notamment à la création d'un patrimoine commun comprenant des outils, méthodes et référentiels partagés, cruciaux à la coordination de tous. La gouvernance d'ensemble de ce réseau sera assurée par l'Etat, les collectivités territoriales et les partenaires sociaux.
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