Mme Ségolène Amiot alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation dramatique du tribunal de Nantes. M. le ministre a annoncé une augmentation de 8 % du budget de la justice, promettant ainsi l'embauche d'au moins 1 500 magistrats et 1 500 greffiers pour les tribunaux français afin de tenter de répondre à la situation dramatique dans laquelle se trouvent les tribunaux français. Pour le tribunal de Nantes, la création de 5 postes de magistrats ainsi que l'arrivée de 6 nouveaux magistrats d'ici juin 2023 a aussi été promise. Malheureusement, ces chiffres ne correspondent pas à la réalité du tribunal de Nantes. Sur les 6 magistrats promis d'ici juin 2023, 3 sont arrivés en janvier, dont deux sont employés à mi-temps. À cela s'ajoute le départ d'une magistrate en début d'année et deux départs à la retraite prévus pour cet été. Il s'agit donc in fine du renfort d'un seul magistrat qui a été fourni. En outre, cela correspond à une augmentation de l'effectif théorique de 51 à 55 magistrats de siège qui est annoncée, alors que le rapport d'inspection de la justice en recommande au moins 59 et que le tribunal judiciaire demande à ce que les effectifs soient augmentés à 75 magistrats. M. le ministre souhaite moderniser la justice afin qu'elle soit accessible à tous. Ce n'est malheureusement pas le cas au tribunal de Nantes : plus de 5 000 dossiers d'aide juridictionnelle sont en attente et les justiciables doivent attendre plus d'un an avant de recevoir une décision. Recevant les accords avec parfois plus de trois ans de retard, les avocats acceptent même de travailler en pro bono sur ces dossiers. Certains justiciables sont, eux, contraints d'engager des huissiers à leurs frais pour lancer les procédures, les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle étant pourtant des personnes déjà précaires. Au tribunal correctionnel, les renvois d'audience font face à des délais de plus d'un an et il y a un stock de 250 dossiers en ordonnance de renvoi qui mettra des années à être écoulé. Les gardés à vue de ce début d'année reçoivent des convocations pour 2024. Aux affaires familiales, les délais sont de deux mois pour les affaires urgentes et de 12 à 14 mois pour les autres dossiers. À cause de ce manque de moyen, certains parents célibataires doivent attendre plusieurs mois pour une simple décision de pension alimentaire. Dans le contexte d'inflation actuel, cela ne devrait pas exister. La situation à Nantes comme partout en France ne peut plus durer, les différents acteurs de la justice sont épuisés. Le rapport de l'inspection de la justice de juillet 2022 tirait la sonnette d'alarme sur la dégradation de l'état de santé mentale des magistrats. Pour faire face au manque de moyens, ils se retrouvent contraints à rendre une justice accélérée, de moindre qualité, et voient chaque jour le sens de leur métier se perdre dans les exigences de productivité qui en découlent. Elle lui demande donc à ce que la réalité de la situation du tribunal de Nantes soit prise en compte de toute urgence, par une augmentation significative des effectifs réels du tribunal ainsi qu'un déblocage de moyens supplémentaires temporaires pour aider à l'absorption des stocks accumulés ces dernières années ; elle souhaite connaître ses inetentions à ce sujet.
Avec une enveloppe budgétaire sans précédent de 9,6 milliards d'euros, le ministère de la Justice bénéficiera en 2023 d'une nouvelle augmentation de +8 % de son budget suivant les deux précédentes hausses de +8% déjà accordées en 2022 et 2021. Cet effort se poursuivra en 2024 avec un budget qui dépassera pour la 1ère fois la barre symbolique des 10 milliards d'euros, en atteignant 10,1 milliards en loi de finances. Cela représente une hausse de près de 503 millions d'euros supplémentaires, soit près de 5,3 %. La justice ne pouvant fonctionner sans les femmes et les hommes œuvrant quotidiennement à son service, ce sont 10 000 emplois supplémentaires qui seront créés d'ici 2027, soit une hausse de 11% en cinq ans, au service, entre autres, du renfort des effectifs en juridictions, de l'armement des nouveaux établissements pénitentiaires et des services de la protection judiciaire de la jeunesse. Le ministère de la Justice bénéficiera de la création de 1 500 postes de magistrats et de 1 800 postes de greffiers et 1 100 attachés de justice. Dès 2023, première année de ce nouveau quinquennal budgétaire, la création nette de 208 postes de magistrats a ainsi d'ores et déjà été confirmée, outre la création de 300 emplois de juristes assistants et 20 emplois d'assistants spécialisés. S'il est difficile de rattraper en quelques mois des décennies d'insuffisance, les recrutements de magistrats ont connu une augmentation historique grâce à 470 postes offerts aux auditeurs de justice et 80 postes offerts au concours complémentaire pour l'année 2023. Les emplois de contractuels ont quant à eux été pérennisés. S'agissant plus spécifiquement des effectifs de magistrats affectés au sein du tribunal judiciaire de Nantes, ceux-ci sont passés de 70 à 83 magistrats entre le 1er janvier 2018 et le 1er janvier 2023, soit une augmentation de près de 19 % en l'espace de 5 ans. Sur la même période, les effectifs de magistrats du siège du tribunal judiciaire de Nantes, sont passés de 47 à 58, soit une hausse de plus de 23 %. Ces taux de croissance sont bien supérieurs aux chiffres nationaux d'augmentation des effectifs réels au sein des tribunaux judiciaires, qui s'établissent à environ 8,5% au global et à 8% au siège. Depuis le 1er septembre prochain, les effectifs du tribunal judiciaire de Nantes sont donc au complet au siège comme au parquet et tous les grands engagements pris, ont été tenus, notamment grâce aux postes offerts aux lauréats des concours complémentaires. En outre, au-delà des effectifs de magistrats, les juridictions sont soutenues dans leur capacité de jugement par le renforcement de l'équipe autour des magistrats. Ainsi de très nombreux recrutements ont été effectués au cours de cette année 2022 et ce sont désormais 138 assistants spécialisés et 1047 juristes assistants qui sont en poste au sein des juridictions au 1er juin 2023. Parmi eux, 1 assistant spécialisé et 13 juristes assistants exercent leurs fonctions au sein de la juridiction nantaise. S'agissant des effectifs de greffe, dans le cadre de la circulaire de localisation des emplois au titre de l'année 2022 et au regard de l'évaluation de la charge de travail, l'effectif de fonctionnaires du tribunal judiciaire de Nantes est fixé à 240 agents. Si au 12 novembre, 15 postes sont vacants, 12 seront pourvus d'ici juin 2024. Les chefs de la cour d'appel de Rennes ont également la possibilité d'affecter des personnels placés du ressort pour résorber, le cas échéant, un stock jugé trop important et peuvent également utiliser la dotation de crédits dédiés au recrutement de contractuels vacataires. Le ministère de la justice est pleinement mobilisé au service des juridictions et ils continueront de porter une attention particulière à la situation du tribunal judiciaire de Nantes. J'ajoute enfin, que la Cour d'appel de Rennes se verra renforcée d'au moins 58 magistrats supplémentaires, d'au moins 61 greffiers supplémentaires et d'au moins 54 attachés de justice supplémentaires d'ici à 2027 grâce aux recrutements sans précédent prévu par la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice, contre laquelle vous avez voté. Tous ces renforts viennent en plus des remplacements des départs en retraite et sont donc des créations nettes d'emplois.
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