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Aurélien Saintoul
Question N° 793 au Ministère du travail


Question soumise le 9 août 2022

M. Aurélien Saintoul interroge M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur le rapport du 23 mars 2022 du Comité européen des droits sociaux (CEDS) qui juge le « barème Macron » contraire à l'article 24 de la Charte sociale européenne (droit à une indemnité adéquate ou à une réparation appropriée). Ce barème, qui plafonne le montant de l'indemnisation en cas de licenciements sans cause réelle et sérieuse, est une atteinte grave aux droits des salariés. Il en résulte par exemple qu'un salarié au SMIC, ayant deux ans d'ancienneté, licencié oralement du jour au lendemain pour des raisons fallacieuses, peut ne recevoir qu'un demi-mois de salaire, soit 650 euros. Le 11 mai 2022 dernier, la Cour de cassation a validé le « barème Macron ». En réalité, celle-ci ne s'est pas prononcée sur le fond mais sur l'effet direct ou non de la Charte sociale européenne. Sur le fond, le « barème Macron » remet en cause des années de luttes sociales et d'acquis pour les salariés du pays. Il a permis aux entreprises d'anticiper le coût du recours éventuel à des licenciements abusifs. Cela pose bien évidemment un problème de dissuasion de ces pratiques. Cela entraîne également une précarisation du statut de CDI, puisqu' in fine le salarié n'a plus de recours réel face à la menace d'un licenciement infondé. Depuis sa mise en place, le barème a par ailleurs eu d'autres effets. Afin de compenser la perte pour le salarié de ces indemnités, les demandes d'indemnisation fondées sur d'autres motifs ont augmenté. Enfin, ce barème a eu pour effet d'entraîner avec lui la disparition de l'indemnité pour procédure irrégulière, indemnité jusque-là pourtant considérée comme distincte. Pour toutes ces raisons, il voudrait savoir quand le Gouvernement compte enfin se mettre en conformité avec les engagements internationaux pris par la France lors de son adhésion à la Charte sociale européenne et s'il proposera rapidement la suppression des dispositions de la loi établissant le « barème Macron ».

Réponse émise le 10 janvier 2023

La Cour de cassation, par deux arrêts en date du 11 mai 2022, a définitivement validé le barème issu de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail. Aussi, la Cour de cassation a jugé que les dispositions du barème étaient bien compatibles avec l'article 8 de la convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail. De plus, la Cour de cassation a confirmé que les dispositions de la charte sociale européenne, et notamment son article 24, n'étaient pas d'application directe en droit interne et donc non invocable par les parties à un procès. La France est donc pleinement en conformité avec ses engagements internationaux. Il faut également rappeler que le barème ne s'applique pas dans les situations de licenciement abusif les plus graves, lorsque le licenciement est jugé nul. C'est le cas lorsque le licenciement est entaché d'une nullité résultant de la violation d'une liberté fondamentale (droit de grève, droit de retrait, droit d'ester en justice, liberté syndicale, etc.), de faits de harcèlement moral ou sexuel, lorsque le licenciement est discriminatoire ou consécutif à une action en justice en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ou à une dénonciation de crimes et délits, lorsqu'il concerne un salarié protégé du fait de l'exercice d'un mandat ou de sa situation de grossesse, maternité, paternité, ou victime d'un accident de travail ou d'une maladie professionnelle. Dans ces cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, quelles que soient l'ancienneté du salarié et la taille de l'entreprise, et qui n'est soumise à aucun plafond (article L. 1235-3-1 du code du travail). L'objectif du barème est de renforcer la prévisibilité des conséquences de la rupture de la relation de travail tout en maintenant la capacité du juge de prévoir la réparation du préjudice subi par le salarié par une juste indemnité s'il considère que ce licenciement n'est pas justifié. Le montant déterminé par le juge peut être modulé selon l'appréciation de la situation du salarié et des conditions de la rupture, dans le respect de planchers et de plafonds fixés par la loi. Aussi, le Gouvernement n'entend nullement abroger les dispositions du barème.

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