M. Paul Molac appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la possible interdiction à venir des chaudières fonctionnant au gaz dans les logements. En effet, la direction générale de l'énergie et du climat a informé plusieurs acteurs de l'énergie qu'une réflexion était en cours au sein des services du ministère de la transition écologique concernant la mise en œuvre d'une interdiction de l'installation de nouvelles chaudières fonctionnant au gaz dans les logements et notamment dans un premier temps dans les maisons individuelles. Cette possible mesure d'interdiction serait motivée par la volonté de sortir les logements des énergies fossiles (fioul, gaz et charbon). Mais, interdire l'installation de nouvelles chaudières ou le remplacement d'une chaudière existante par une chaudière à haute performance énergétique ou une pompe à chaleur pourrait être un contre-sens au moment même où ces chaudières affichent leur compatibilité avec le gaz vert - énergie stockable, renouvelable et produite en France - destiné à les alimenter et dont le Gouvernement a encouragé le développement. De plus, outre les conséquences sur le pouvoir d'achat et la balance commerciale, la mise en œuvre d'une telle mesure aurait des effets contre-productifs sur la souveraineté industrielle (les chaudières à gaz sont majoritairement produites en France et en Europe, tandis que la majorité des composantes des pompes à chaleurs proviennent d'Asie) et la diversification, donc la sécurisation, du système énergétique français. D'ailleurs, si l'on faisait le choix, demain, de supprimer les chaudières à gaz, à défaut d'électricité produite de manière suffisante par les énergies renouvelables, il faudrait 9 EPR supplémentaires ou intensifier l'activité des centrales thermiques à gaz et à charbon pour compenser les besoins en énergies destinés à alimenter les pompes à chaleur installées en remplacement. La réalité est que la chaudière n'est pas le cœur du problème, c'est bien le gaz qu'il s'agit de « verdir ». C'est pourquoi il aimerait que lui soit préciser les intentions du Gouvernement à ce sujet et s'il compte mettre davantage l'accent sur le développement des énergies renouvelables, notamment du gaz vert.
Dans le cadre de la planification écologique et pour atteindre nos objectifs ambitieux fixés en matière climatique, tous les secteurs seront mobilisés pour accélérer la baisse des émissions de gaz à effet de serre. En dépit des efforts réalisés sur la dernière décennie, nous devons encore doubler le rythme de réduction d'ici 2027. A cet égard, le secteur des bâtiments, qui représente 18% des émissions en France, devra donc contribuer à l'accélération de la décarbonation du pays, au même titre que les transports ou encore l'industrie. Dans ce cadre, nous devons interroger tous les leviers disponibles : pérennisation des efforts de sobriété énergétique, accentuation de la dynamique d'isolation et accélération du rythme de sortie des énergies fossiles. Vous avez voulu attirer en particulier mon attention sur l'évolution possible de la réglementation régissant l'installation de nouvelles chaudières fonctionnant au gaz dans le bâtiment. Cet enjeu renvoie à la problématique de sortie progressive des énergies fossiles, pour laquelle un certain nombre de jalons a déjà été posé. En effet, depuis le début de l'année 2022, la réglementation environnementale RE2020 impose le recours à une part importante d'énergie décarbonée pour le chauffage et l'eau chaude sanitaire dans les logements neufs. Cette première échéance s'est imposée aux maisons individuelles et s'étend progressivement aux logements collectifs en 2025 et dans les bâtiments tertiaires. L'objectif poursuivi par cette réglementation est l'amélioration de la performance énergétique et du confort des constructions, tout en diminuant leur impact carbone. Par ailleurs, certaines aides tirent déjà les conséquences de cet impératif de sortie progressive des énergies fossiles : ainsi MaPrimeRénov', principale aide à la rénovation énergétique des logements, ne subventionne plus l'installation de nouvelles chaudières au gaz depuis fin 2022. Comme toutes les actions engagées en vue d'accélérer la transition énergétique dans notre pays, des évolutions sont nécessaires pour proposer aux Français des alternatives moins carbonées et plus efficaces en termes énergétiques. Les solutions existent : il s'agit par exemple de recourir aux réseaux de chaleur ainsi qu'aux énergies renouvelables ou de récupération (pompes à chaleur, géothermie de surface, systèmes solaires ou biomasse). Les chaudières à gaz hybridées avec des pompes à chaleur ou des systèmes solaires thermiques, qui permettent de réduire d'au moins 70% la consommation de gaz, seront également des solutions qui auront une place dans le mix de solutions de chauffage bas-carbone qui feront progressivement référence. Même si elles peuvent représenter un coût d'investissement plus élevé, ces solutions sont compétitives en coût complet, et permettront de réduire l'impact carbone des bâtiments construits. C'est aussi un enjeu de souveraineté, auquel vous serez sensible, dans la mesure où ces installations alternatives décarbonées ne reposent pas sur une énergie massivement importée comme le gaz. Ainsi, afin d'accélérer le rythme de réduction des émissions, le gouvernement a lancé du 5 juin 2023 au 28 juillet 2023 une concertation publique sur la décarbonation du secteur des bâtiments afin d'échanger avec l'ensemble des acteurs du bâtiment sur les solutions alternatives aux chaudières fossiles (fioul, gaz), pour accélérer la décarbonation de notre pays et atteindre nos objectifs climatiques. Il s'agit notamment de déterminer : Par quels leviers sécuriser l'atteinte de nos engagements climatiques à horizon 2030 ? En particulier, comment accélérer la dynamique de dépose des chaudières fossiles (fioul et gaz) dans les bâtiments, dans le parc tertiaire comme résidentiel ? Quel type de mesures mettre en place pour parvenir à la décarbonation du secteur du bâtiment (mesures incitatives, d'accompagnement ou contraignantes) ? Comment développer l'offre de systèmes de chauffage alternatifs par type de bâtiment et trouver les meilleures solutions pour les cas dans lesquels peu ou pas d'alternatives se présentent ? Quelles actions pour accompagner la transformation des filières économiques et accélérer la structuration d'une filière européenne et française dans la production de pompes à chaleur ? Des réunions de concertation ont été menées et toute contribution a pu être envoyée sur le site du ministère. L'impact de la décarbonation plus rapide des bâtiments sur le réseau électrique fera l'objet d'une analyse détaillée dans le Bilan prévisionnel 2023 de RTE qui sera publié en septembre, cela permettra d'éclairer ces enjeux. Ces changements structurels s'engagent progressivement, afin de donner de la visibilité et le temps de l'adaptation à l'ensemble des acteurs. En tout état de cause, il est clair que le recours aux énergies décarbonées est générateur de nouvelles perspectives pour les entreprises désireuses de s'engager dans ces solutions d'avenir. Le Gouvernement est engagé pour accompagner la transition des filières industrielles du chauffage vers des énergies bas carbone. Actuellement, 60% de la valeur ajoutée du marché de la fabrication des PAC air/eau est générée en France, et toute la chaîne de valeur en aval (distribution, installation, entretien) est française et non délocalisable. Plusieurs outils déployés par l'Etat accompagnent la transition du secteur : le renforcement des aides au raccordement aux réseaux de chaleur ; le Fonds chaleur et le Plan géothermie, lancé en février 2023 ; les aides MaPrimeRénov' et Certificats d'économies d'énergie, en particulier le Coup de pouce chauffage, dans les maisons individuelles, et le Coup de pouce chauffage des bâtiments résidentiels collectifs et tertiaires. Les actions en cours pour développer l'industrie française des pompes à chaleur, qui font l'objet d'échanges avec les filières, y contribuent également. Les énergies décarbonées sont ainsi de plus en plus matures et deviendront très prochainement le standard pour la rénovation des maisons individuelles et des chaufferies collectives. Dans certaines configurations de bâtiment, de l'innovation ou du temps de développement sera nécessaire pour développer de nouveaux produits qui permettent de répondre aux contraintes de place, de nuisances sonores ou esthétiques, ce sujet est au cœur de la concertation en cours avec les parties prenantes. Il sera également recherché de favoriser les systèmes les plus efficaces, afin que les ménages n'aient pas recours à du chauffage à effet joule peu performant. Enfin, s'agissant du biogaz, énergie décarbonée qui n'est pas utilisée seulement dans le secteur des bâtiments, son développement doit être encouragé. Le gouvernement rappelle néanmoins les ordres de grandeur en jeu : nous avons consommé 430 TWh de gaz en 2022 et nous avons actuellement une capacité d'injection dans le réseau de 10 TWh de biogaz. L'objectif de court terme de développement du biogaz sera fixé prochainement dans le cadre de la révision de la stratégie française énergie – climat (futures loi de programmation énergie – climat et programmation annuelle de l'énergie). L'objectif sera fortement rehaussé mais il faudra tenir compte d'un gisement global de biomasse qui restera limité et fortement sollicité par ailleurs, y compris par l'industrie de la chimie ou pour décarboner des secteurs qui n'ont que peu d'alternatives comme l'aviation ou le maritime. Réduire notre consommation globale de gaz n'est donc pas incompatible avec un développement fort du biogaz, au service des secteurs et pour le cas où les alternatives au gaz sont limitées. Nous devons faire les deux afin de sortir au plus vite des énergies fossiles. Au global la réflexion intégrera donc l'ensemble des éléments pour aboutir le cas échéant à des décisions progressives, avec des calendriers adaptés aux différentes circonstances, en veillant à prendre en compte les aspects économiques pour les ménages et plus largement tous les facteurs nécessaires à un changement maîtrisé.
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