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Olivier Serva
Question N° 7697 au Ministère de la santé


Question soumise le 2 mai 2023

M. Olivier Serva interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur l'application de la loi Lurel du 3 juin 2013, visant à garantir la qualité de l'offre alimentaire en outre-mer et interdisant la vente de denrées alimentaires plus sucrées en outre-mer comparativement à l'Hexagone. En effet, la loi dispose que les aliments vendus dans les outre-mer ne doivent pas contenir une teneur en sucres ajoutés supérieure au maximum observé en France hexagonale. Avec cette loi, le Parlement avait pour volonté de mettre fin à des pratiques alimentaires discriminantes pour les départements d'outre-mer. De fait, il convient de comprendre que la surconsommation de sucre est l'un des facteurs en cause dans les nombreux cas d'obésité et de surpoids dans les outre-mer. L'enquête Escal menée en 2003 et confirmée en 2008 par l'enquête Podium avait mis en évidence le fait que plus de la moitié de la population adulte martiniquaise était en surpoids ou obèse. A Mayotte, selon Santé publique France, le surpoids concerne 72 % des femmes mahoraises et 34 % des hommes, alors qu'en Polynésie, 70 % de la population adulte est en surpoids, dont 40 % obèse. L'enquête Kannari menée en 2016 conjointement par Santé publique France, l'ANSES et les observatoires de santé de Guadeloupe et Martinique, montrait que 27,8 % des plus de 16 ans sont en situation d'obésité en Martinique et en Guadeloupe, contre 14,5 % au niveau national. Par voie de conséquence, dans l'Hexagone, l'espérance de vie s'élève à 79 ans pour les hommes et 85 ans pour les femmes, quand elle baisse à 77 et 85 ans en Guadeloupe, à 76 et 82 ans en Guyane et à 74 et 80 ans dans les collectivités du Pacifique. Néanmoins, force est de constater que nonobstant l'existence de la loi Lurel, l'objectif fixé d'interdire la vente de denrées alimentaires plus sucrées en outre-mer comparativement à l'Hexagone n'a pas été atteint. En effet, le rapport parlementaire n° 2502 sur le sport et la santé dans les outre-mer en décembre 2019 révèle que certaines marques ne jouent pas le jeu et continuent à proposer des produits aux teneurs en sucre différenciées. Un autre rapport publié en 2020 par l'Institut de recherche pour le développement (IRD), relatif à l'état nutritionnel et à l'alimentation des populations ultramarines, met en évidence une teneur en sucre moyenne de 7 g/100ml dans l'hexagone contre 8,9 g/100ml en Martinique et en Guadeloupe. Ce rapport scientifique admet également une consommation moyenne de 69 g/jour de boissons sucrées en Guadeloupe ou de 54,8 g/jour à Mayotte contre seulement 39 g/jour en France hexagonale. Enfin, les résultats de l'enquête ouverte par la DGCCRF visant à apprécier le respect de la loi du 3 juin 2013 révèlent encore des références-produits à une teneur en sucre supérieure à la teneur la plus élevée observée dans la même famille de produits dans l'Hexagone. C'est dans ce sens que M. le député interroge M. le ministre, quant à l'application actuelle de la loi Lurel en outre-mer, où l'offre alimentaire ne semble pas s'être améliorée. Il souhaiterait savoir plus précisément quelles mesures le Gouvernement compte mettre en place afin de ramener dans le cadre légal ces marques qui continuent, malgré tout, de proposer des produits aux teneurs en sucre différenciées.

Réponse émise le 12 décembre 2023

La loi dite « Lurel », adoptée en 2013, vise à garantir que la quantité de sucres ajoutés dans les produits vendus dans les territoires ultra-marins ne soit pas supérieure à celle des produits mis sur le marché dans l'Hexagone. Ce dispositif s'inscrit dans le processus global d'amélioration par les industriels de l'agroalimentaire de la qualité nutritionnelle de leurs produits. Une enquête menée en 2021 par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) concluait au respect et à la bonne connaissance de la loi Lurel par les professionnels, sans non-conformité détectée pour des boissons vendues à la fois en métropole et dans les Outre-Mer. En revanche, le constat était différent pour les boissons spécifiques aux Outre-mer. Ce constat était cohérent avec une évaluation menée par la direction générale des Outre-mer sur les processus de mise en œuvre de la loi, son contexte d'application ainsi que l'identification des freins et leviers. Afin de mieux appréhender les spécificités ultramarines en termes d'offre et de consommation alimentaires, et caractériser l'état nutritionnel des populations en Outre-mer, la direction générale de la Santé a mandaté en 2018 l'Institut de recherche pour le développement afin de mener une expertise collective. Sur la base de cette expertise et des évaluations de la loi Lurel, un volet « Outre-mer » du Programme national nutrition santé 2019-2023 (PNNS 4) a été publié en septembre 2022, et intègre notamment une action spécifique visant à diminuer la consommation des produits sucrés dans les DROM. La déclinaison ultramarine du PNNS prévoit également le renforcement du déploiement du Nutri-Score auprès des opérateurs locaux, ou encore l'adaptation des recommandations nutritionnelles aux habitudes et consommations ultramarines pour une alimentation plus favorable à la santé. Ces actions visent à agir de manière complémentaire et synergique avec les mesures du PNNS 4, qui s'applique à tous, en Hexagone et en Outre-mer, telles que la mise en œuvre d'une taxe sur les boissons sucrées et édulcorées afin d'inciter les industriels à diminuer les teneurs en sucres et orienter les consommateurs vers des alternatives moins sucrées, ou encore l'élaboration d'accords collectifs dans lesquels les filières peuvent s'engager sur une diminution significative du contenu en sucres. Enfin, plus largement, une attention particulière sera portée aux populations ultramarines dans le cadre de la déclinaison de la future Stratégie nationale pour l'alimentation, la nutrition et le climat, visant à promouvoir à l'horizon 2030 des systèmes et comportements alimentaires durables favorables à la santé tout en réduisant les inégalités sociales en nutrition.

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