M. Hadrien Clouet alerte M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur les conséquences de la numérisation des copies du baccalauréat sur les conditions de travail des agents enseignants et administratifs. Depuis 2020, les copies relevées à la fin des épreuves sont numérisées puis transmises aux correcteurs par le logiciel Santorin, qui en assure donc l'archivage en ligne en même temps que l'exposition à des risques informatiques. Ce « système d'aide numérique à la notation et correction » soumet les enseignants à des méthodes managériales infantilisantes. Le logiciel enregistre le temps de correction par copie et retient le temps de pause entre la correction de deux copies. Cette pression sur les enseignants, surveillés par logiciel, les contraint à corriger à un rythme soutenu, indépendamment du contenu, au prix d'un stress élevé et d'un partage malsain de leur concentration entre le contenu de la copie et la montre. Ce, d'autant que ces corrections se déroulent dans des conditions inédites de difficulté. Les enseignants ont pour habitude et pour confort de corriger des copies papiers. La correction sur écran est particulièrement épuisante et génère une fatigue oculaire pouvant aller jusqu'à des migraines, une baisse de l'attention et des troubles du sommeil. Des enseignants témoignent devoir imprimer les copies - numérisées quelques jours auparavant - afin de corriger dans de bonnes conditions, avant de reporter ultérieurement les appréciations et notes sur ledit logiciel. Autant de symptômes de l'inefficacité du logiciel, qui provoque l'inverse de ce qu'il devait résoudre : augmentation du temps de travail et pénibilité accrue pour les correcteurs, les personnels administratifs ou de direction. En outre, les personnels de direction pointent les dysfonctionnements qui engendrent une perte de temps considérable. Chaque session réclame un travail à la chaîne épuisant, pour numériser 3,5 millions de copies dans 3 000 centres d'examen. Travail qui s'allonge lorsque le téléversement est en panne, comme celle constatée dans la session 2022. Même alerte du côté des enseignants, puisque le logiciel a été inaccessible le mercredi 29 mars en pleine session 2023, empêchant la correction durant plusieurs heures. Or les enseignants n'ont la possibilité de banaliser que quatre demi-journées pour les consacrer à la correction, d'où une désorganisation générale et une menace sur la qualité du temps de correction. D'autant que pour l'élève, la numérisation des copies déshumanise l'éducation nationale. Pour consulter sa copie et éventuellement demander un recours, l'élève ne sollicite plus physiquement le personnel de son établissement ou le rectorat académique, mais un logiciel en ligne. Cette rupture de lien humain pose une question philosophique et pratique sur le devenir de l'éducation nationale. Elle redouble également l'inégalité d'accès aux copies et la faculté de recours face au numérique. Outre les 3 % de jeunes de 15-29 ans frappés d'illectronisme, l'accès à internet et l'équipement informatique dépend de l'origine social. Aussi M. le député demande-t-il au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse comment il entend revenir sur cette réforme qui pénalise en temps, en qualité de correction, en confort et en efficacité toutes les correctrices et tous les correcteurs du baccalauréat. Ouvrira-t-il enfin la discussion avec les syndicats de l'éducation nationale pour améliorer la situation ? Commandera-t-il un rapport sur la détérioration des conditions de correction numérisée ? Rétablira-t-il le droit de correction direct sur papier pour les enseignants qui le souhaitent ? Quelles garanties offrira-t-il aux enseignants inquiets par la confidentialité des données sur les serveurs ?
Le développement de SANTORIN, son expérimentation puis sa généralisation à l'ensemble du baccalauréat général et technologique ont fait l'objet d'un accompagnement très important de la part du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse ainsi que des différentes divisions académiques des examens et concours. Les consultations réalisées, dans le cadre de ce développement, puis auprès des utilisateurs effectifs, ont toutes révélé un taux très élevé de satisfaction des personnels concernés. Le développement de SANTORIN, les mesures de sécurité techniques spécifiques ainsi que l'important travail réalisé conduisant à héberger l'ensemble des données sur la plateforme nationale d'hébergement mutualisé (PHM) garantissent un niveau maximal de sécurité qui renforce, si besoin est, le cadre d'exercice des enseignants qui, au-delà, sont par ailleurs libérés des déplacements qu'impliquait la correction non dématérialisée. L'expérimentation et la première année de généralisation ont conduit à répondre à certaines des demandes d'évolution formulées par les utilisateurs ou par partie d'entre eux. C'est notamment le cas de la fonctionnalité d'import/impression des copies, non prévue initialement mais demandée par certains correcteurs. Pour cette possibilité, développée dans le cadre des évolutions, le constat indique cependant une utilisation relativement réduite, confirmant le haut niveau d'appropriation des outils numériques par les correcteurs. Aucun signalement n'a été remonté concernant des méthodes managériales qui seraient directement liées à la correction dématérialisée des copies. Dès lors que les dates limites fixées pour la remontée des notes sont respectées, il appartient à chaque correcteur de définir son rythme et son organisation personnels de travail. De plus, techniquement, les temps de connexion, de correction et/ou de pause ne sont pas observables dans SANTORIN. Enfin, les demandes d'accès aux copies formulées par les candidats et leur famille faisaient l'objet de procédures académiques variables d'un territoire à l'autre. Pour la plupart cependant, une demande en ligne devait déjà être réalisée, laquelle impliquait par ailleurs un temps d'attente avant réception. À ce titre, la mise à disposition des copies sur l'espace candidat de CYCLADES constitue une avancée majeure dans l'accompagnement et le niveau d'information des candidats et de leurs familles.
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