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Patricia Lemoine
Question N° 7282 au Ministère auprès du ministre de la santé


Question soumise le 18 avril 2023

Mme Patricia Lemoine interroge M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur le dernier rapport de l'ANSES qui fait état d'une pollution alarmante de l'eau potable en France par des résidus de chlorothalonil. Fongicide commercialisé par l'entreprise Syngenta, spécialisée dans l'agrochimie, le chlorothalonil fut interdit en 2019 par l'Union européenne, en le classant cancérigène de catégorie 1B (potentiel cancérigène supposé pour l'être humain) au regard de l'impossibilité d'établir que les métabolites de chlorothalonil n'auront pas d'effets nocifs sur la santé humaine, ni sur les amphibiens et poissons. Interdit ensuite en France en 2020, le rapport établir par l'ANSES fin mars 2023 montre pourtant que ces résidus demeurent encore massivement présents dans l'eau portable consommée chaque jour par les Français et notamment dans des zones densément peuplées telles que la région parisienne. En effet, sur plus de la moitié des échantillons prélevés, le métabolite de chlorothalonil a été retrouvé et près d'un échantillon sur trois conduit à des dépassements de la limite de qualité, fixée à 0,1 microgramme par litre, bien que cette limite n'ait pas de signification sanitaire. Aucun dépassement de valeur maximale sanitaire n'a été observé. Si la direction générale de la santé rappelle que la consommation pendant la vie entière d'une eau contenant un pesticide à une concentration inférieure ou égale à la valeur maximale sanitaire n'entraîne, sur la base des critères toxicologiques retenus et en l'état actuel des connaissances, aucun effet néfaste pour la santé, il reste que la présence de ces résidus peut légitimement interroger au regard du caractère cancérigène supposé de la molécule mère. Elle lui demande donc quelles mesures seront entreprises pour lutter contre cette pollution et éliminer définitivement ces résidus potentiellement dangereux pour la santé de l'homme.

Réponse émise le 1er août 2023

Dans le domaine des pesticides et des métabolites de pesticides dans les eaux destinées à la consommation humaine, le rôle du ministère chargé de la santé consiste à prévenir et à gérer les risques sanitaires liés à ces polluants. Ainsi, depuis plusieurs années maintenant, la Direction générale de la santé (DGS), a d'une part missionné les agences d'expertise françaises pour disposer de connaissances sanitaires sur les pesticides et leurs métabolites et a, d'autre part, établi et diffusé des consignes pour une recherche ciblée et adaptée à chaque territoire des familles de pesticides pour connaître la qualité de l'eau consommée en chaque point du territoire. La Direction générale de la santé, tout comme les Agences régionales de santé (ARS), maintient plus que jamais sa politique de transparence vis-à-vis des consommateurs et de l'ensemble des acteurs sur la qualité de l'eau distribuée en France via la mise à disposition des données sur son site internet ainsi que par l'accès en open data à l'ensemble des résultats d'analyse. Enfin, la direction générale de la santé (DGS) a établi et diffusé dès 2010 des consignes pour la gestion des situations de présence de pesticides et de métabolites dans les eaux. Ces consignes n'ont pas ou très peu évolué pour les pesticides et les métabolites de pesticides dits « pertinents » tels que les métabolites du chlorothalonil. Sur saisine de la DGS, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a publié récemment les résultats de la dernière campagne de mesures relatives aux polluants émergents dans l'eau potable. Le but de ces mesures est de regarder la présence de composés chimiques qui ne sont pas ou peu recherchés lors des contrôles réguliers. La situation révélée par ce rapport met en évidence une concentration importante de différents métabolites, dont le métabolite R471811 du chlorothalonil, dans les ressources en eau destinée à la consommation humaine utilisées en France métropolitaine. S'agissant d'un métabolite de pesticide jugé « pertinent » dans les eaux destinées à la consommation humaine, la gestion repose sur le respect de la limite de qualité réglementaire (0,1µg/L) et l'utilisation en cas de dépassement de cette limite et sur une durée limitée (période de dérogation), d'une valeur sanitaire individuelle permettant de prévenir d'un risque sanitaire. Cette valeur sanitaire transitoire (VST) est établie à 3µg/L pour le R471811 du chlorothalonil. A ce jour, la campagne de l'ANSES a mis en évidence des concentrations maximales de 2µg/L. Certaines eaux destinées à la consommation humaine prélevées dans le cadre de cette campagne ne respectent pas les critères de conformité mais ne présentent pas de risque sanitaire, en l'état actuel des connaissances. En cas de dépassement de la limite de qualité, les personnes responsables de la distribution d'eau concernées doivent ainsi déposer une demande de dérogation qui, pour être acceptée, doit s'accompagner d'un plan d'action permettant un respect de la limite de qualité sous un délai ne pouvant pas excéder 3 ans (6 ans si reconduction). Le chlorothalonil (molécule mère) étant interdit, les mesures correctives reposent désormais exclusivement sur le traitement de l'eau. A ce jour, l'abattement par les procédés de traitement classiques des pesticides est très faible et une certaine efficacité n'est observée que via un traitement de type osmose inverse ou sur charbon actif mais avec une fréquence de renouvellement supérieure aux fréquences habituelles. Les résultats de la campagne conduisent à modifier le plan de suivi de la qualité de l'eau vis-à-vis des métabolites du chlorothalonil. S'agissant du contrôle sanitaire des ARS, le programme va progressivement intégrer, à partir de 2023, le chlorothalonil et ses métabolites, en lien avec la montée en compétences des laboratoires agréés pour le contrôle sanitaire des eaux pour rendre des résultats fiables sous accréditation. S'agissant de la surveillance de la personne responsable de la production ou de la distribution d'eau, certaines, ou leurs délégataires, intègrent d'ores et déjà ou progressivement le chlorothalonil et ses métabolites dans les plans de surveillance.

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