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Alexandra Martin
Question N° 6994 au Ministère de la santé


Question soumise le 4 avril 2023

Mme Alexandra Martin attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur l'aggravation des pénuries de médicaments dans les officines pharmaceutiques. Ces ruptures d'approvisionnement dont elle se fait l'écho depuis plusieurs mois deviennent structurelles et touchent de plus en plus de pathologies graves induisant potentiellement la survie de nombreux patients. M. le ministre a été lui-même interpellé directement par un jeune garçon, Maxime, domicilié dans la Manche. Atteint de mucoviscidose, quatre des dix médicaments qu'il doit prendre chaque jour pour lutter contre cette maladie sont en pénurie totale ou partielle depuis décembre 2022. Or sans la prise de ces médicaments au quotidien, c'est la croissance de ce jeune adolescent qui est affectée avec la crainte du pire pour l'avenir de celui-ci. Si les pénuries de médicaments dans les officines de pharmacie ont été multipliées par trente en dix ans, elles touchent désormais également les stocks de médicaments des pharmacies des hôpitaux. L'une des raisons de ce phénomène semble être les choix de l'industrie pharmaceutique française de délocaliser la production des matières premières et tout particulièrement des principes actifs, en Asie du Sud et de l'Est. Cette dépendance remet aujourd'hui en cause l'accès aux soins des malades et la souveraineté de la France en matière de médicaments. Les intentions se heurtent aux choix stratégiques de l'industrie pharmaceutique qui bénéficie de nombreuses aides publiques en France et du remboursement des médicaments par la sécurité sociale et qui a pourtant supprimé 10 000 emplois en 10 ans. Ce démantèlement des savoir-faire s'accélère depuis les années 1980 où la France comptait près de 470 entreprises de production du médicament contre seulement 247 aujourd'hui. La souveraineté de la France à produire des médicaments sur son sol est menacée d'autant que la distribution des produits de santé fait elle-même l'objet de spéculation. Mais la santé n'est pas une marchandise. La France doit reprendre rapidement la main sur la politique du médicament et garantir leur accès pour toutes et tous. Aussi, elle demande quelles sont les décisions que le Gouvernement entend prendre, à long terme, pour remédier à ce problème de santé publique qui n'épargne aucun foyer français. Elle demande également quelles solutions il envisage de mettre en œuvre, à très court terme, pour répondre aux difficultés d'approvisionnement mettant la vie de nombreux des compatriotes en danger immédiat comme pour le jeune Maxime.

Réponse émise le 18 juillet 2023

Plusieurs spécialités indiquées dans le traitement de la mucovicidose font l'objet de tensions d'approvisionnement depuis quelques mois. La fabrication des spécialités CELESTENE CHRONODOSE 5,70 mg/ml, suspension injectable et CELESTENE 4 mg/1 ml, solution injectable a temporairement été suspendue à partir de fin janvier 2023 à cause d'une non-conformité. Afin de prévenir une rupture de stock totale, une distribution contingentée, c'est-à-dire une distribution en quantité limitée pour permettre une répartition continue et équitable des stocks disponibles, a été mise en place en ville. Un stock de sécurité a également été constitué pour permettre de répondre aux besoins urgents en dehors des circuits habituels de distribution. L'activité de fabrication a repris le 20 février 2023 et le contingentement a été assoupli progressivement. En outre, le sérum physiologique utilisé notamment dans le cadre de la mucovicidose, fait l'objet de tensions d'approvisionnement. Si les flacons de 50 ml sont impactés, les flacons de 125, 150, 500 et 1000 ml ne le sont pas. D'autres médicaments indiqués dans le cadre du déficit hypophysaire et de l'insuffisance surrénalienne font également l'objet de tensions d'approvisionnement. La spécialité MINIRIN SPRAY 10 microgrammes par dose, solution endonasale en flacon pulvérisateur fait l'objet d'une rupture de stock liée à des difficultés de production depuis l'été 2020. Afin d'assurer la prise en charge des patients, l'ANSM a délivré des autorisations d'importation pour permettre la mise à disposition, à titre transitoire et exceptionnel, de la spécialité MINURIN 0,1 mg/ml solution endonasale en flacon pulvérisateur. Les spécialités NORDITROPINE FLEXPRO 5 mg/1,5 ml, 10 mg/1,5 ml et 15 mg/1,5 ml, solution injectable en stylo prérempli subissent également des tensions d'approvisionnement depuis le mois d'octobre 2022. La distribution auprès des grossistes répartiteurs a été contingentée afin d'éviter une rupture totale. Un réapprovisionnement progressif a lieu depuis le début du mois de mars. Le contingentement est assoupli progressivement au fil de l'amélioration de la situation et jusqu'à stabilisation du stock de sécurité. Compte tenu de l'augmentation des signalements de ruptures et risques de ruptures de stock constatée ces dernières années, indépendamment de la pandémie de COVID-19, le comité de pilotage qui s'est réuni le 2 février 2023, a acté le lancement d'une phase de concertation de deux mois avec l'ensemble des parties prenantes. Leurs propositions serviront à construire une nouvelle feuille de route pluriannuelle permettant de lutter contre les pénuries de produits de santé. La précédente feuille de route 2019-2022 a marqué des avancées majeures (plan de gestion des pénuries, obligation de détention de stocks de sécurité notamment). En outre, la liste de 450 médicaments dits « essentiels » car stratégiques pour la santé des patients a été établie sur la base des recommandations des autorités scientifiques. Cette liste, publiée le 13 juin 2023, est évolutive. À partir de cette liste, des travaux spécifiques vont être engagés pour mieux garantir la disponibilité des médicaments concernés (suivi renforcé sur les capacités d'approvisionnement, analyse des pratiques de prescription et des tendances d'achat, cartographie et renforcement des chaînes de production, mise en œuvre de solutions de production de secours, actions de prévention, etc.). Le Président de la République a également annoncé le 13 juin dernier, la relocalisation de la production d'une partie de ces médicaments essentiels. De plus, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé en lien avec la direction générale de la santé est chargée d'établir un plan de préparation des épidémies hivernales (sécurisation des stocks, amélioration de la mise à disposition des données, responsabilisation de l'ensemble des acteurs du soin et des patients, etc.) pour anticiper d'éventuelles tensions et renforcer notre capacité à faire face à des pics saisonniers de consommation de médicaments. Ce plan hivernal inclut une phase d'anticipation qui vise à sécuriser les approvisionnements afin de garantir la couverture des besoins et à communiquer sur les gestes barrières et les règles de bon usage des médicaments. Par ailleurs, un « Plan blanc Médicaments » activable en cas de situation exceptionnelle, nécessitant de prendre des mesures fortes pour sécuriser la prise en charge des patients, est en cours de préparation. Le Gouvernement a également annoncé un moratoire sur les baisses de prix des génériques stratégiques sur le plan industriel et sanitaire. Il est également prévu d'opérer des hausses de prix ciblées sur certains génériques stratégiques produits en Europe. Ces hausses de prix se feront en contrepartie d'engagements des industriels sur une sécurisation de l'approvisionnement du marché français. Enfin, au niveau européen, le règlement (UE) n° 2022/123 du 25 janvier 2022 qui a introduit des dispositions visant à prévenir et gérer les pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux considérés comme critiques, en renforçant le rôle de l'Agence européenne des médicaments est entré en application. Il s'agit là d'une première étape visant à mettre en place un cadre renforcé pour la notification et la surveillance des pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux lors d'urgences de santé publique ou d'événements majeurs dans l'Union européenne.

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