M. Romain Daubié appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les coûts engendrés par l'installation illégale des gens du voyage sur des terrains privés ou publics. En tant que maire, il a pu constater certaines dérives de ces installations : non-respect du droit de propriété, raccordement illégal à l'eau et à l'électricité avec, souvent, un usage abusif des ressources, notamment l'arrosage ou le nettoyage des caravanes - y compris quand des arrêtés sécheresses sont en cours -, mise en place de bennes par les collectivités pour la collecte des déchets sans qu'aucun tri ne soit effectué, dans le meilleur des cas, quand la collectivité ne retrouve pas des décharges sauvages de déchets, avec parfois des déchets amiantés et des carcasses de voitures désossés. Tout ceci est issu de faits réels constatés dans le département de l'Ain. Ce type d'agissement est fréquent. La population s'interroge sur ces pratiques et ne comprend pas pourquoi une minorité de personnes qui a, bien souvent, choisi son mode de vie, fait subir aux autres citoyens son manque de civilité. La population se demande pourquoi les règles ne sont pas les mêmes pour tous et s'interroge sur le payeur de ces abus. La République n'est elle pas une et indivisible, selon la Constitution ? Compte tenu des flux de circulation des personnes issues de la communauté des gens du voyage, les territoires situés à proximité des axes routiers, notamment ceux sur la route de pèlerinages, comme celui aux Saintes-Maries-de-la-Mer, ne sont pas égaux entre eux. Cela est acté par l'État puisque des schémas directeurs départementaux d'accueil des gens du voyage dispensent des EPCI de création d'aires de grands passages en raison du manque de flux. Aussi, il lui demande si le Gouvernement prévoit une compensation financière pour les collectivités qui subissent des occupations illégales des gens du voyage ? Il rappelle que si ce n'est pas l'État qui prend en charge les frais engendrés, ce sont les contribuables. Pour M. le député, il n'est pas acceptable que certains territoires qui subissent des occupations illégales doivent en plus supporter des surcoûts liés auxdites occupations. Il lui demande sa position sur ce sujet.
La question des stationnements illicites constitue un enjeu fort de maintien de l'ordre public pour l'Etat comme pour les collectivités. Certaines situations, d'autant plus si elles sont installées dans le temps, sont problématiques au regard du non-respect du droit de propriété et des troubles qu'elles peuvent générer. Dans le même temps, ce phénomène est également accentué par l'insuffisante mise en œuvre des dispositifs dédiés à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage prévus par les schémas départementaux. La loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage pose en son article premier le principe de la participation obligatoire des communes à l'accueil des personnes dites gens du voyage dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles et impose aux collectivités figurant au schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage de prévoir les dispositifs d'accueil, d'habitat et de logement adapté répondant aux besoins de cette population sur le territoire. C'est à ce titre que les dispositifs publics que sont les aires permanentes d'accueil, les terrains familiaux locatifs et les aires de grand passage sont prescrits au schéma départemental. Si la loi dite "Besson" offre la possibilité aux maires et/ou présidents d'EPCI de prendre un arrêté d'interdiction de stationnement hors des aires et terrains dédiés et de bénéficier du concourt de la force publique pour mettre en œuvre une évacuation forcée, cette procédure administrative demeure conditionnée à la mise en œuvre des prescriptions du schéma départemental approuvé. Or, la mise en œuvre de ces prescriptions à caractère obligatoire est encore inssufisante : le taux de réalisation des prescriptions en nombre de places atteint ainsi à l'échelle nationale 75,4 % pour les aires permanentes d'accueil, 54,5% pour les aires de grand passage et seulement 20,1 % pour les terrains familiaux locatifs à fin 2021. Dans l'Ain, le bilan à fin 2021 des aires et terrains familiaux locatifs prescrits par le schéma révisé le 5 juin 2020 fait état de la réalisation d'une aire permanente d'accueil de 44 places sur les 3 aires et 80 places prescrites, soit un taux de réalisation de 55 % ; 6 aires de grand passage comptabilisant 740 places sur les 12 aires et 1 580 places prescrites, soit un taux de réalisation de 50 % ; et 3 sites terrains familiaux locatifs comptabilisant 44 places sur les environ 114 places prescrites, soit un taux de réalisation de 38,6 %. Pour résorber ce déficit structurel et ainsi limiter les installations illicites pour lesquelles les sanctions ont récemment été renforcées, notamment avec l'expérimentation de l'amende forfaitaire délictuelle sur les ressorts de six tribunaux judiciaires depuis octobre 2021, un vaste travail de relance des schémas départementaux a été engagé avec la circulaire du 10 janvier 2022 cosignée par le Ministre de l'Intérieur et la Ministre chargée du Logement. Par ailleurs, en cas de non réalisation des équipements prescrits et de trouble grave et manifeste à l'ordre public, les procédures de droit commun peuvent être mobilisées. A ce titre, le Gouvernement est conscient des problèmes engendrés – notamment de pollution – par des dépôts illégaux de déchets et de la charge que ces derniers représentent pour les collectivités locales. C'est pourquoi la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a édicté des mesures destinées à mieux lutter contre les auteurs de ces méfaits. Si l'auteur d'un tel dépôt peut être identifié, et après la procédure indiquée au 1er alinéa de l'article L541-3 du code de l'environnement, le maire peut désormais en même temps qu'il le met en demeure lui imposer le paiement d'une amende administrative dont il détermine le montant qui est plafonné à 15 000 euros. Cette procédure ne fait pas obstacle à ce qu'il soit aussi appliqué une sanction pénale par le tribunal judiciaire, laquelle dépendra de la qualification des faits reprochés puisque le fait d'abandonner des déchets ou de constituer un dépôt illégal de déchets peut être, selon le cas, une contravention de 4e ou de 5e classe, ou un délit (voir la réponse à la question écrite n° 18197 du Ministère de la transition écologique publiée dans le JO Sénat du 17/06/2021). De même sur le raccordement illégal aux réseaux d'eau et/ou d'électricité, l'article L. 111-6 du Code de l'Urbanisme permet au maire de s'opposer au branchement définitif aux réseaux d'eau, d'électricité, de gaz ou de téléphone d'une construction ou installation réalisée en méconnaissance des règles d'urbanisme. Ces dispositions s'appliquent aux caravanes, qu'elles aient ou non conservé leur mobilité (CE, 7 juillet 2004, n° 266478). Par ailleurs, le code pénal assimilant la soustraction frauduleuse d'énergie au vol (article 311-2), le maire peut s'il constate une telle infraction, saisir l'autorité judiciaire. Celle-ci pourra le cas échéant enjoindre l'auteur à régulariser les factures sur la base d'une consommation supposée, payer une amende pouvant atteindre jusqu'à 45 000€, verser des dommages et intérêts à la victime, payer une pénalité au fournisseur d'énergie ou, dans les cas les plus graves, effectuer une peine d'emprisonnement.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.