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Franck Allisio
Question N° 6962 au Ministère de la justice


Question soumise le 4 avril 2023

M. Franck Allisio attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur un rapport rendu par l'Institut pour la justice publié en février 2023 qui estime, d'une part, que 41 % des condamnés à de la prison ferme n'entrent jamais en prison et, d'autre part, que les condamnés à de la prison ferme effectuent en moyenne 62 % de leur peine de prison. Il lui demande s'il peut confirmer ou infirmer ces chiffres et présenter son plan pour rétablir la crédibilité du système judiciaire français.

Réponse émise le 9 janvier 2024

A titre liminaire, il n'est pas possible de confirmer les éléments chiffrés évoqués, pour des raisons liées à la méthodologie statistique appliquée dans le rapport rendu par l'institut pour la Justice publié en février 2023. En effet, la nature des données rapprochées diffère fortement selon les sources statistiques de ces données. Les peines privatives de liberté dénombrées au casier judiciaire national ne peuvent, directement, être rapprochées des flux d'écrous publiés par la direction de l'administration pénitentiaire. La première source recense des peines, et la seconde, des écrous de personnes. Or, il est très fréquent qu'un écrou unique déclenche l'exécution de plusieurs peines. Par ailleurs, le modèle démographique utilisé par l'auteur du rapport conduit à déduire du rapprochement de flux et de stocks, une durée de détention, que l'auteur appelle "effective". Cette méthode ne fonctionne que pour une population dite « stationnaire » (stable en effectif et en structure), caractéristique qui ne peut être utilisée pour décrire la population détenue. Le ministère de la Justice est pleinement mobilisé pour garantir l'effectivité des sanctions pénales prononcées et leur exécution dans un délai satisfaisant, indispensables pour assurer la crédibilité de la justice pénale et éviter la réitération d'infractions. Cet impératif, auquel le garde des Sceaux attache une importance particulière, est régulièrement rappelé aux parquets, et récemment dans la circulaire de politique pénale générale du 20 septembre 2022. S'agissant des peines d'emprisonnement ferme, si leur exécution ne donne pas systématiquement lieu à une incarcération en établissement pénitentiaire, l'absence d'incarcération n'est toutefois pas synonyme d'absence d'exécution : l'aménagement de peine, lorsqu'il est ordonné, est une modalité de l'exécution de la peine d'emprisonnement. En effet, les réformes engagées depuis 2004 ont développé les modalités d'exécution des peines d'emprisonnement ferme, alternatives à l'incarcération. La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation pour la justice (LPJ) s'est inscrite dans la continuité de ces réformes en favorisant l'aménagement des peines d'un quantum inférieur ou égal à 1 an dès leur prononcé. Au cours de l'aménagement de sa peine, la personne condamnée est soumise à des obligations et interdictions précisées par jugement du juge de l'application des peines dont l'inexécution, est sanctionnée, le cas échéant, par l'incarcération de l'intéressé. Au 1er janvier 2023, 92 % des peines d'emprisonnement ferme, ou en partie ferme, prononcées par les tribunaux correctionnels et leurs présidents (pour les peines homologuées dans le cadre des comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité-CRPC), devenues exécutoires en 2016, avaient été mises à exécution. Ce taux s'élevait à 95 % pour les peines prononcées par jugement contradictoire. S'agissant de la durée d'incarcération effective des condamnés placés sous écrou, il convient de souligner que le législateur a mis fin au dispositif du crédit de réduction de peine institué par la loi du 9 mars 2004 dite « PERBEN II » au profit d'un dispositif unique de réductions de peine que peut octroyer le juge de l'application des peines, après avis de la commission de l'application des peines, lorsque le condamné donne des preuves suffisantes de bonne conduite et manifeste des efforts sérieux de réinsertion (article 721 du code de procédure pénale - loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 dite « confiance dans l'institution judiciaire). En tout état de cause, l'autorité judiciaire assure une réponse pénale avec fermeté nonobstant le fait que les établissements pénitentiaires connaissent des taux d'occupation élevés.  Enfin, il faut relever que le taux d'exécution des peines s'élève à plus de 94%.

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