M. Christian Girard interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur l'utilisation par les éleveurs de plantes et produits naturels et peu préoccupants autorisés pour le traitement des animaux. La réglementation actuelle interdit aux éleveuses et éleveurs l'usage thérapeutique des plantes et, au sens large, des produits naturels non dangereux au moment même où est constatée une baisse d'efficacité des traitements conventionnels. De ce fait, les éleveurs se retrouvent dans une situation d'impasse technique car les pouvoirs publics demandent la réduction de l'usage des pesticides de synthèse pour conduire la transition écologique. De leur côté, les éleveurs qui utilisent couramment les plantes et les produits naturels non dangereux tels que les acides organiques (notamment en apiculture), ainsi que d'autres produits minéraux et animaux (biodynamie) pour le soin apporté à leurs animaux opèrent donc dans l'illégalité au sens du règlement européen n° 2019/6. Pourtant, ces produits constituent l'un des moyens incontournables pour assurer la transition écologique car ils sont utilisés depuis longtemps et reconnus pour leur efficacité. Les structures de développement et les instituts techniques conduisent d'ailleurs des actions de recherche et de développement pour attester de l'efficacité et encadrer les usages des plantes et produits naturels non dangereux. Les structures de développement et les instituts techniques sont aujourd'hui en difficulté pour expérimenter et communiquer sur ces pratiques sanitaires venant du terrain. Compte tenu de la pression sanitaire, les éleveurs devront donc continuer de pratiquer dans l'illégalité, sans encadrement ni accompagnement. L'ANSES s'est d'ailleurs autosaisie par deux fois, concluant à la fois à une situation de blocage dans l'usage des plantes et des produits naturels non dangereux en santé animale, et recommandant aussi la création d'une liste positive de plantes et produits naturels autorisés en santé animale, liste qui a déjà été proposée en France par l'Institut technique de l'agriculture biologique (ITAB). À titre d'exemple, une telle liste positive de plantes et produits naturels utilisables dans le cadre de la santé animale existe au Canada (CAN/CGSB 32.311). Le considérant n° 12 du règlement européen n° 2019/6 demande aux États membres de fournir à la Commission des informations sur les produits traditionnels à base de plantes utilisés pour le traitement des animaux sur leurs territoires afin de permettre la mise en place d'un système simplifié. Aussi, afin de protéger les éleveurs français pour qu'ils puissent continuer à soigner leurs animaux sereinement, il lui demande s'il envisage proposer une liste positive de plantes et produits naturels et peu préoccupants autorisés pour le traitement des animaux.
De multiples produits dits de phytothérapie ou d'aromathérapie sont aujourd'hui utilisés aussi bien sur les animaux de compagnie que les animaux producteurs de denrées alimentaires, sans allégations thérapeutiques écrites ou claires, alors que leurs usages s'inscrivent souvent dans des contextes propres à évoquer une action d'ordre préventive ou thérapeutique sur des pathologies animales. Ces constats ont conduit l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail à s'autosaisir afin de proposer une méthode d'évaluation adaptée aux médicaments vétérinaires à base de plantes. Ces réflexions ont fait l'objet des saisines 2013-SA-0122 et 2014-SA-0081 et 2020-SA-0083 (phytothérapie et aromathérapie chez les animaux producteurs de denrées alimentaires). Ces travaux d'ampleur se poursuivent afin de recenser les données disponibles et les listes de plantes qui pourraient faire l'objet d'une proposition au niveau européen en vue d'être intégrées au règlement « limites maximales de résidus » (LMR) (règlement (UE) n° 37/2010 de la Commission du 22 décembre 2009. Cette approche nationale fait maintenant l'objet de discussions au niveau européen qui pourraient à terme donner lieu à l'émergence d'une catégorie « Médicament vétérinaire à base de plantes ». Cela permettrait la mise sur le marché de produits répondant à des exigences minimales d'efficacité en lien avec l'allégation thérapeutique annoncée et d'innocuité pour les animaux et la personne chargée de l'administration (vétérinaire, éleveur, propriétaire). Ce travail sur les LMR pourra également servir d'appui à l'usage de ces produits chez des animaux de rente sous forme de préparations extemporanées sous prescription vétérinaire dans le cadre contraint de la cascade thérapeutique. Conscient des difficultés rencontrées sur le terrain pour encadrer ces pratiques, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire souhaite assurer que ses services mettent tout en œuvre pour offrir une solution pouvant répondre à la fois à la conformité à la réglementation européenne et aux attentes des vétérinaires et des éleveurs. La mise en place d'un cadre réglementaire adapté est un processus long et complexe mais qui permettra de mieux encadrer et sécuriser ces pratiques sur le long terme.
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