M. Christian Girard interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur le projet de règlement européen « usage durable des pesticides » (SUR). L'objectif imposé de réduction de 50 % de l'usage des produits phytosanitaires pour l'ensemble des pays européens s'annonce catastrophique pour la production de fruits et légumes. Les pertes de rendements conséquentes qu'il engendrerait ont pourtant été à plusieurs reprises signalées, depuis 2020, par les organisations agricoles mais également par des études d'impact. Les services de la Commission européenne ont eux-mêmes évalué à 7 % les pertes de production de fruits et légumes dues à la mise en œuvre de Farm to Fork. Par ailleurs, l'article 18 du projet de règlement prévoit toujours explicitement l'interdiction des traitements phytosanitaires au sein des zones Natura 2000 (incluses dans les « zones sensibles », à part quelques exceptions extrêmement encadrées). Cette disposition menace directement des milliers d'hectares de cultures arboricoles et maraichères. Pour la France, les données cartographiques d'Agreste révèlent ainsi que plus de 5 300 ha de vergers sont situés sur des zones Natura 2000, soit 4,5 % de la surface de production fruitière nationale. Faudra-t-il totalement raser ces vergers demain ? Ces contraintes supplémentaires sur les outils de production iraient totalement à l'encontre des objectifs du plan « souveraineté fruits et légumes », annoncé par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation le 1er mars 2023, visant à ce que les filières fruits et légumes regagnent 5 points de compétitivité d'ici 2030. Aussi, au regard des données alarmantes, il lui demande quelles positions le Gouvernement compte prendre dans le cadre des discussions au sein du Conseil de l'Union européenne sur le projet de règlement « usage durable des pesticides » afin de protéger la filière fruits et légumes française et la souveraineté alimentaire du pays.
La proposition de règlement pour une utilisation des produits phytopharmaceutiques compatible avec le développement durable (SUR) est en cours de discussion au sein du Conseil de l'Union européenne (UE) et du Parlement européen. Cette proposition a donné lieu, sous l'impulsion de la présidence tchèque, à une demande du Conseil de l'UE à la Commission européenne en décembre 2022 de produire des données complémentaires à l'étude d'impact, notamment sur les impacts économiques pour les entreprises ainsi que ceux résultant d'une interdiction totale ou partielle des produits phytopharmaceutiques dans les zones dites sensibles. L'étude complémentaire a été transmise par la Commission européenne le 5 juillet 2023 et a fait l'objet d'échanges lors du conseil agriculture et pêche du 25 juillet 2023. La France salue cette proposition de règlement qui permet d'avancer au niveau européen sur la transition agricole, porteuse de souveraineté alimentaire et de résilience face aux crises climatiques et environnementales. Cette transition est nécessaire pour assurer une protection commune du consommateur et répondre aux attentes des citoyens. Cette proposition doit permettre de mieux harmoniser l'encadrement de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques à l'échelle européenne afin d'obtenir des conditions de concurrence identiques, ce qui contribuera à regagner des points de compétitivité. De plus, la mise en place des mesures miroirs pour éviter la concurrence de produits en provenance de pays avec des normes moins-disantes est cruciale ; le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a rappelé qu'il s'agissait d'une priorité française lors du Conseil de l'UE du 25 juillet 2023. La France estime que cette proposition législative doit également permettre de renforcer l'accompagnement des agriculteurs pour réussir la transition écologique et ne laisser aucun agriculteur sans solution. À ce titre, le ministre a fait part, lors du Conseil de l'UE du 25 juillet 2023, des préoccupations des filières et du Gouvernement concernant les projections en termes de baisse de rendement et de production et a rappelé la nécessité de mettre à disposition des agriculteurs des alternatives crédibles économiquement et opérationnelles sur le terrain. Les filières des fruits et légumes françaises ont déjà fait des efforts importants dans ce domaine et la proposition de règlement devrait permettre de renforcer l'application des principes de la lutte intégrée dans tous les États membres et selon les mêmes modalités. La France soutient la définition de cibles contraignantes de réduction de produits phytopharmaceutiques au niveau de tous les États membres de l'UE. Si les efforts de réduction réalisés au sein de l'État sont déjà intégrés à la méthodologie de calcul des cibles à atteindre pour chaque État membre, cette dernière doit progresser pour mieux prendre en compte l'historique et les spécificités de chaque État membre, et notamment la diversité des systèmes de culture. Enfin, s'agissant des zones sensibles, le ministre a rappelé, lors du Conseil de l'UE du 25 juillet 2023, qu'il était nécessaire de s'accorder collectivement sur la définition des zones sensibles pour lesquelles il est souhaitable d'aboutir à des règles de gestion harmonisées de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et proportionnées aux risques dans les différents types de zones. Le non-papier de la Commission européenne repris dans l'étude d'impact complémentaire va dans cette direction, néanmoins des travaux complémentaires sont nécessaires pour affiner les options possibles en fonction des zones et des objectifs de protection associés.
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