M. Charles Fournier attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la situation très préoccupante des services psychiatriques dans les hôpitaux publics et les décisions de fermeture de lits qui continuent d'aggraver la situation. Considéré comme le parent pauvre de la médecine, la psychiatrie publique manque de moyens et d'effectifs. En France, il manque 30 % de psychiatres hospitaliers et les postes d'infirmiers non pourvus ont doublé entre avril 2022 (6 %) et 2019 (3 %). Le sous-effectif chronique des psychiatres et du personnel paramédical dans les hôpitaux publics pèse sur la prise en charge des patients dont le nombre a explosé ces dernières années. Le nombre d'usagers de la psychiatrie est passé de 1 million en 1997 à 2,3 millions en 2020. La crise sanitaire a accentué les besoins de prise en charge psychiatrique dans les hôpitaux, sans que les équipes de soin dans les services de psychiatrie soient renforcées à la hauteur de cette croissance. L'incapacité des structures à répondre à cette hausse de la demande psychiatrique conduit les directeurs d'hôpitaux à fermer des lits. Des patients graves sont condamnés à rentrer chez eux faute de prise en charge et de personnel soignant, alors que la France est un des pays européen au taux de suicide le plus élevé. Aujourd'hui, la psychiatrie dans le public met à disposition entre 50 et 55 lits pour 100 000 habitants. À ces difficultés structurelles s'ajoute la politique de réduction des coûts de l'hôpital public qui freine les investissements et les recrutements. Ainsi, dans cette logique, 80 lits en psychiatrie sur 250 lits supprimés sont prévus dans le nouveau CHRU de Tours. Le développement des offres en ambulatoire depuis le Ségur de la santé ne doit pas se faire au prix de l'hospitalisation complète. Si des lits ferment, c'est la santé publique qu'on en danger. Aussi, il souhaite savoir si, face à cette fermeture dramatique, le Gouvernement envisage d'augmenter le budget pour la psychiatrie publique, répondre aux difficultés de recrutement du secteur, rouvrir les lits fermés et geler la fermeture des lits dans les hôpitaux publics, en particulier dans les services psychiatriques du CHRU de Tours.
Le Gouvernement est conscient des difficultés rencontrées par la psychiatrie, notamment en termes de ressources humaines et d'attractivité et travaille pour y apporter des réponses, en lien avec la Commission nationale de la psychiatrie. Bien que le nombre de psychiatres soit dans la fourchette haute par rapport aux autres pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la discipline de la psychiatrie souffre d'un déficit d'attractivité qui se traduit par un nombre important de postes vacants dans les établissements, et une répartition très inégale des psychiatres sur le territoire. En pédopsychiatrie, la situation est encore plus sensible. Face à cette situation, plusieurs mesures ont été et sont mises en place. Tout d'abord, des mesures d'attractivité ont été prises et bénéficieront aux professionnels exerçant dans les services de psychiatrie. Il s'agit de faciliter l'exercice mixte entre la ville et l'hôpital et de revaloriser les salaires dans le cadre du Ségur de la santé. Le renforcement de l'universitarisation de la filière psychiatrique et pédopsychiatrique doit permettre également de valoriser la discipline en offrant des carrières attractives ainsi qu'une meilleure visibilité sur ces carrières. C'est pourquoi le Gouvernement, par une action conjointe du ministère de la santé et de la prévention et du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, a proposé aux jeunes générations depuis plusieurs années des postes supplémentaires de chefs de cliniques-assistants (CCA) pour développer la recherche, afin de constituer un vivier de candidats et favoriser de futures carrières hospitalo-universitaires. La promotion de la pratique avancée, qui a été introduite récemment pour la mention psychiatrie / santé mentale, est également une priorité. Lors des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie en septembre 2021 a été annoncé le financement de la formation de 540 infirmiers en pratique avancée en santé mentale. 3 M€ ont d'ores et déjà été délégués en 2022. Par ailleurs, 4 axes sont travaillés par le ministère de la santé et de la prévention avec la commission nationale de la psychiatrie pour 2023 : - renforcer la découverte de la psychiatrie et la santé mentale aux étudiants dès le 2ème cycle des études de médecine en envisageant, au-delà des expériences mises en place par quelques Unités de Formation et de Recherche (UFR), la généralisation d'un stage en psychiatrie (stage hospitalier privilégié, de manière non exclusive, pour la découverte de la psychiatrie de secteur) ; - identifier, pour les ouvertures semestrielles de postes, des lieux et terrains de stage agréés, que les internes et les coordonnateurs du Diplôme d'études supérieures (DES) trouvent pertinents et formateurs, en limitant les stages dans lesquels l'encadrement médical apparait insuffisant ou problématique ; - envisager la manière dont l'accès des internes aux gardes et astreintes peut être facilité et rémunéré tout en garantissant leur supervision ; - poursuivre la politique, conduite au cours des dernières années par le ministère de la santé et de la prévention et le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, de création de postes HU en psychiatrie adulte et en pédopsychiatrie (postes de PU-PH, MCU-PH et CCA), y compris en privilégiant des candidats et des postes « territoriaux » partagés entre centres hospitaliers universitaires et centres hospitaliers spécialisés (services hospitaliers et universitaires) et des postes contribuant directement à la continuité des soins et aux accueils en urgence. Les postes à privilégier dans un premier temps sont les postes de CCA qui pourront être rapidement pourvus. Ces créations s'inscrivent dans le prolongement des créations de postes prévues par les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie et par le Ségur de la santé. Concernant le nombre de lits d'hospitalisation en psychiatrie, sa diminution s'explique en partie par l'augmentation de l'offre de prise en charge à temps partiel et en ambulatoire : les places en hôpital de jour ont augmenté de 2 % entre 2014 et 2019 et le nombre de centres médico-psychologiques et d'unités de consultations en ambulatoire a augmenté de 36% pour les adultes et de 27 % pour les enfants et les adolescents entre 2014 et 2019. Cependant, l'augmentation de l'offre ambulatoire ne doit pas se faire au détriment de l'hospitalisation qui est nécessaire pour certains patients. Cette réalité a été réaffirmée lors des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie en septembre 2021. L'instruction N° DGOS/R4/2022/189 du 21 juillet 2022 relative aux modalités d'adaptation de l'offre de soins en psychiatrie pour mieux répondre aux besoins incite les établissements de santé autorisés en psychiatrie à ouvrir des lits d'hospitalisation supplémentaires de façon transitoire pour répondre aux besoins, mais également à mettre en place des dispositifs de renforcement de l'offre de soins en psychiatrie pour prévenir les venues aux urgences et limiter les hospitalisations. Enfin, le Gouvernement rappelle que les moyens alloués à la psychiatrie ont été en constante augmentation au cours des dernières années : + 2,2% en 2020 et en 2021 et + 2,6% en 2022, hors effets liés au Ségur, soit des taux supérieurs aux engagements pris dans le cadre du protocole d'accord sur l'évolution pluriannuelle minimale des ressources des établissements de santé.
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