M. Lionel Causse interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les difficultés liées à la gestion de l'eau qui menacent la souveraineté alimentaire du pays. Depuis plusieurs années, les impacts du dérèglement climatique conduit les gouvernements successifs à mettre en place des outils visant une meilleure gestion de l'eau afin que le secteur agricole puisse continuer à en faire usage. Parmi ces dispositifs, on peut retenir les projets de territoires pour la gestion de l'eau (PTGE) ou encore la construction de retenues d'eau sur les territoires. L'instruction du 7 mai 2019 a été élaborée afin de favoriser l'émergence dans l'ensemble des territoires de solutions adaptées aux besoins et aux contextes locaux. Au-delà du renforcement du rôle de l'État en tant que facilitateur et accompagnateur de la démarche, l'instruction met notamment l'accent sur l'importance de l'approche prospective dans le cadre du changement climatique et de l'analyse économique et financière dans le choix des actions du PTGE. Le rapport de mission interministérielle de 2022 visant un meilleur appui dans l'objectif de favoriser l'aboutissement des projets de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE) a apporté des pistes de réflexion intéressantes qui doivent être mises en œuvre rapidement face à la vitesse du dérèglement climatique mais qui ne permettent pas d'obtenir une vision d'ensemble de la situation. En effet, la profession agricole fait part de nombreuses difficultés sur l'ensemble du territoire concernant le déploiement de ces projets, notamment des lenteurs relatives aux travaux engagés. Ainsi, il n'existe pas, à ce jour, d'état des lieux précis et partagé des PTGE, avec une vision des volumes d'eau concernés et des stades d'avancement des projets. Par ailleurs, l'arrêté du 9 juin 2021 fixant les prescriptions techniques générales applicables aux plans d'eau et plus globalement la possibilité de construire de retenues d'eau introduit l'interdiction d'implanter des retenues en zone humide hors intérêt général majeur et l'obligation d'établir des calendriers pour leur remplissage du 15 juin au 30 septembre et leur vidange du 1er novembre au 31 mars. Les analyses réalisées sur certains départements comme la Corrèze illustrent une perte de centaines de milliers de mètres cube d'eau dont la retenue était initialement autorisée. La profession agricole est globalement inquiète des difficultés de plus en plus importantes pour aboutir à la création de retenues d'eau. Sur le département des Landes, depuis 1990, une seule retenue a dépassé 200 000 mètres cubes. Aucun projet d'envergure prévu sur le bassin de l'Adour n'a vu le jour. Aussi, il lui demande quelles actions sont prévues par son ministère pour permettre la concrétisation des différentes conclusions du Varenne agricole de l'eau et une véritable adaptation au changement climatique. Il lui demande également quels moyens sont prévus pour faire en sorte que les outils réglementaires à disposition des porteurs de projet leur apportent la sécurité nécessaire à un investissement indispensable à la souveraineté alimentaire du pays.
Les conséquences de la sécheresse touchent depuis plusieurs années de nombreux départements et l'agriculture est l'un des secteurs particulièrement exposés aux modifications hydrologiques. Il est donc important de réduire sa vulnérabilité à un risque accru de manque d'eau dans le contexte du changement climatique. À cet égard, les travaux du Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique se sont achevés le 1er février 2022, actant 24 actions à mettre en œuvre collectivement afin d'anticiper les effets du changement climatique sur l'agriculture pour mieux la protéger et s'adapter. Plusieurs de ces actions concernent l'échelon territorial en lien avec l'irrigation et les spécificités locales. Notamment, les filières agricoles se sont toutes engagées à travers la signature d'une charte, à décliner des plans d'actions à conduire d'ici 2025 afin d'adapter toutes les exploitations et les entreprises et d'impliquer les acteurs des territoires au cœur de la transition. D'un point de vue réglementaire, un additif à l'instruction relative à la mise en œuvre des projets de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE) du 7 mai 2019 a été publié le 17 janvier 2023. Il a comme objectif de faciliter la mise en œuvre opérationnelle des PTGE, démarches soutenues par le Gouvernement qui visent à impliquer les usagers de l'eau (eau potable, agriculture, industries, navigation, énergie, pêches, usages récréatifs, etc.) d'un territoire dans un projet global en vue de faciliter la préservation et la gestion de la ressource en eau. Viendra s'y adosser un guide de mise en œuvre des PTGE à destination des porteurs de projets, à paraître dans les prochaines semaines. Une délégation interministérielle chargée du suivi des conclusions du Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique est opérationnelle depuis septembre 2022. Cette délégation a vocation à garantir la continuité de la dynamique du Varenne de l'eau, de coordonner et promouvoir l'action des services de l'État en faveur de l'adaptation des filières agricoles au changement climatique et d'une politique publique de l'eau en agriculture tout en veillant à associer l'ensemble des autres parties prenantes. De plus, le plan d'action pour une gestion résiliente et concertée de l'eau annoncé le 30 mars 2023 par le Président de la République intègre plusieurs mesures pour optimiser la disponibilité de la ressource en eau, y compris pour l'agriculture. En particulier, un fonds d'investissement hydraulique agricole sera abondé dès 2024 à hauteur de 30 millions d'euros par an pour remobiliser et moderniser les ouvrages existants et développer de nouveaux projets dans le respect des équilibres des usages et des écosystèmes. Le plan prévoit également de massifier la valorisation des eaux non conventionnelles (REUT). Par ailleurs, afin d'adapter et accompagner l'agriculture face au changement climatique, le ministre, en étroite concertation avec les régions et le monde agricole, a lancé le 7 décembre 2022 les travaux relatifs au pacte et à la loi d'orientation et d'avenir agricoles, destinés à assurer l'avenir de l'agriculture tout en accompagnant mieux le parcours de celles et ceux qui font le choix de s'engager dans les métiers agricoles. La concertation lancée se poursuivra tout au long du premier semestre 2023. Elle se déroule au niveau national, pilotée par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, en étroite association avec Régions de France, et au niveau régional, copilotée par l'État et les régions et mise en œuvre par les chambres régionales d'agriculture. Cette concertation s'articule autour de quatre axes dont la transition et l'adaptation, en particulier face au changement climatique. Cette concertation aboutira à la rédaction d'un pacte et d'une loi d'orientation et d'avenir pour l'agriculture qui déterminera le cap à suivre et les outils opérationnels à déployer.
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