Mme Agnès Carel appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les violences faites aux femmes pouvant aller jusqu'aux féminicides. À l'occasion journée internationale des droits des femmes 2023, il peut être constaté que la France contrairement à certains de ces voisins européens affiche un triste chiffre : 122 femmes tuées sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint en 2021 et 102 en 2022. En Espagne par exemple, les féminicides ont fortement chuté, passant de 71 en 2020 à 48 en 2021. Ce modèle « inspirant » des voisins de la péninsule ibérique a été évoqué aux Assises nationales de lutte contre les violences sexistes en novembre 2022. Parmi les 290 mesures prises par le Gouvernement espagnol dès 2017, on peut noter le déblocage d'un milliard d'euros sur cinq ans pour lutter contre les violences et accompagner les victimes et la mise en place d'une plateforme informatique unique, VIoGen, qui fait rentrer la victime dans ce dispositif dès la première plainte. Ce dispositif est consultable par tous les maillons de la chaîne, services sociaux, magistrats, policiers. Il permet notamment d'évaluer les niveaux réels de danger estimés et les mesures policières de protection à adopter. Ce risque est réévalué en permanence. 70 000 cas ont été recensés sur cette plateforme depuis sa mise en place. En cas de risque élevé, les victimes sont surveillées par la police en permanence, les déplacements des enfants aussi. De plus, en Espagne, les femmes sont prévenues si l'auteur des violences est libéré de prison ; ce n'est pas le cas en France. Cette mesure aurait permis de faire baisser de 63 % le taux de récidive outre-Pyrénées. Au lendemain de trois nouveaux féminicides dont deux qui ont eu lieu peu après des dépôts de plaintes, non suivis de mise en place de protection, par les victimes, Mme la députée lui demande s'il entend étudier la mise en place d'une plateforme telle que VloGen afin de centraliser enfin toutes les plaintes dès la première alerte d'une victime. Elle lui demande également et plus largement quelles mesures il entend développer pour que les commissariats et gendarmeries soient plus à l'écoute des femmes victimes de violences.
La lutte contre les violences intrafamiliales et contre les violences sexuelles demeure une priorité du Gouvernement et plusieurs lois ont été votées par le Parlement depuis 2017. Le ministère de l'Intérieur et des Outre-mer est le premier contributeur de ce combat en moyens humains et financiers : policiers et gendarmes sont en première ligne. Les dispositifs d'accueil des victimes - notamment de violences intrafamiliales et sexuelles - existant de longue date au sein de la police et de la gendarmerie nationales ont été professionnalisés et renforcés au cours des dernières années. Depuis 2017, le sujet a constitué une priorité constante. Le « Grenelle de la lutte contre les violences conjugales » de l'automne 2019 s'est traduit par de nombreuses avancées, notamment dans la chaîne de traitement des violences conjugales (police, gendarmerie, justice) et les outils de protection des victimes. Depuis le « Grenelle », 90 000 policiers et gendarmes, ainsi que la totalité des élèves policiers et gendarmes, ont été formés à la prise en charge de ces faits de violence. Les audits menés par l'Inspection générale de la police nationale et l'Inspection générale de la gendarmerie nationale sur la qualité de l'accueil, en 2021, des victimes de violences conjugales font d'ailleurs apparaître un taux de satisfaction des victimes élevé. En effet, le taux de satisfaction atteint 79 % pour la police nationale, contre 75 % en 2020 (chiffres 2022 à paraître). En gendarmerie en 2022, 92% des victimes interrogées indiquent que leur situation a bien été comprise dans tous ses aspects par l'enquêteur dans le cadre d'un dépôt de plainte à la brigade. Par ailleurs, depuis avril 2022, la plate-forme numérique de signalement des atteintes aux personnes et d'accompagnement des victimes (PNAV), dispositif commun à la police et à la gendarmerie nationales, accessible notamment via l'application « Ma Sécurité », offre à toute victime ou témoin, notamment de violences conjugales, un accueil personnalisé, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, pour être informé de ses droits et guidé dans ses démarches. En termes de prévention, une doctrine relative à l'accueil et la prise en charge des victimes de violences conjugales par les services de police et de gendarmerie, régulièrement mise à jour, détaille l'ensemble des mesures à appliquer. D'importantes actions ont été mises en œuvre : utilisation d'une grille d'évaluation du danger élaborée en lien avec les associations, prise de plainte en milieu hospitalier ou dans le lieu choisi par la victime, audit des inspections de la police et de la gendarmerie sur l'accueil et l'orientation des victimes de violences conjugales, etc. La loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer, largement adoptée par le Parlement, renforce les moyens de lutte contre les violences intrafamiliales. Les victimes de violences sexuelles et intrafamiliales sont, en particulier, au cœur de la refonte du « parcours victime », avec un effort sans précédent pour mieux accueillir et accompagner les victimes. Le recours à la « visio-plainte », actuellement testée, constituera une importante avancée, à l'instar du projet de plainte en ligne engagé en application de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Le nombre d'enquêteurs spécialisés dans les violences intrafamiliales sera doublé au cours des 5 années à venir, pour passer à 4 000. Le nombre d'intervenants sociaux en commissariat et en gendarmerie passera de 400 environ à plus de 600. Un fichier de prévention des violences intrafamiliales sera également créé. Les associations pourront accompagner plus efficacement les femmes victimes de violences, en organisant le dépôt de plainte dans leurs locaux et en signalant les faits dont elles ont connaissance aux forces de l'ordre.
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