Mme Caroline Colombier interroge M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur les modalités de passage de l'épreuve d'enseignement moral et civique dans le cadre du baccalauréat. Depuis la réforme du baccalauréat, les élèves de terminale sont confrontés aux matières dites « de tronc commun » qui comprennent, notamment, un « Enseignement moral et civique » (EMC). La sanction de cette discipline se fait, pour les élèves des établissements publics et privés sous contrat, par contrôle continu et en classe durant leur année de première et de terminale, alors que les candidats individuels et les élèves du hors contrat sont examinés en épreuve ponctuelle (notes de service du 28 et du 29 juillet 2021 du ministère de l'éducation nationale), constituée par un oral de 30 minutes avec 30 minutes de préparation. Cette modalité d'un oral long soulève plusieurs questions et difficultés, tant pour les élèves que pour les professeurs chargés d'examiner les candidats : en effet, cette épreuve semble manifestement disproportionnée au regard de l'objectif de contrôler l'acquisition des savoirs et compétences. Par comparaison, l'oral de français dure 20 minutes, avec un coefficient 5, sanctionnant un volume horaire de 144 heures par an, alors que l'EMC a un coefficient de 2 pour un volume horaire de 18 heures par an. Cette disproportion incitera les élèves à « bachoter » pour privilégier leurs disciplines de spécialité, rendant contre-productif les modalités actuelles. Par ailleurs, seuls les candidats individuels et ceux des lycées hors contrat passent cet oral, provoquant une situation d'inégalité de traitement tout en remettant en cause l'exigence d'anonymat du baccalauréat. Par ailleurs, les enseignants jurys de telles épreuves, outre le fait qu'ils auront toutes les peines du monde à faire durer cet oral 30 minutes, devront interroger les élèves sur le contenu d'un cours laissant libre place à l'opinion personnelle des élèves et les interroger, seul à seul dans une salle de classe et sans autre témoin, peut les placer en difficulté. En effet, comment réagir face à des propos oraux déplacés ou comment assurer et garantir au candidat en situation de stress la libre expression de ses idées ? Ces difficultés n'existent pas dans le cadre d'une épreuve écrite grâce à l'anonymat et la preuve écrite apportée par la copie. La protection des enseignants demande donc qu'ils ne soient pas mis sans raison grave et proportionnée devant de telles difficultés. Enfin, ces modalités sont, en pratique, contraires à la fois à la vocation nationale du baccalauréat qui implique une uniformité et une égalité de traitement, mais aussi à la volonté du Président de la République qui souhaite une grande concertation nationale pour faire ensemble l'école dans le cadre du Conseil national de la refondation. Aussi, pour toutes ces raisons, elle lui demande s'il compte faire évoluer les modalités de cet examen, ou a minima, en raccourcir la durée.
L'enseignement moral et civique prépare le futur bachelier à l'exercice de la citoyenneté et le sensibilise à la responsabilité individuelle et collective. Cet enseignement contribue à lui transmettre les valeurs de la République, tout en favorisant l'exercice d'un jugement personnel. Il est au cœur d'un équilibre entre l'autonomie individuelle et l'appartenance à un collectif. Les capacités du candidat sont évaluées dans le souci de cet équilibre. L'évaluation orale de l'enseignement moral et civique repose sur une liste pour laquelle le candidat indique au début de l'évaluation à son examinateur, pour chacun des deux axes du programme de la classe de première et des deux axes du programme de la classe de terminale, les deux domaines qu'il a étudiés. Le programme de cet enseignement vise la mise en exergue des capacités du candidat, articulant notions, savoirs et pratiques et concourt ainsi à lui inculquer une culture citoyenne. Les débats inhérents à cette discipline sont une modalité d'apprentissage qui concourt au développement de compétences orales, argumentatives ne se réduisant pas à un exercice d'éloquence. Pour ce faire, le candidat doit mûrir ses idées et poser sa réflexion, exercice bien spécifique qui justifie que cette évaluation ponctuelle soit d'une durée de trente minutes. Enfin, il convient de noter que les candidats inscrits dans un établissement privé hors contrat ne peuvent être évalués pour le baccalauréat dans les mêmes conditions que les candidats de statut scolaire. En effet, le contrôle continu ne peut pas être mis en place dans les établissements privés hors contrat selon les mêmes modalités que celles prévues dans les établissements publics et privés sous contrat (prise en compte des moyennes annuelles des élèves) car la liberté pédagogique des établissements privés hors contrat ne permet pas d'imposer, et par la suite de vérifier, le respect des programmes d'enseignement. Dans son arrêt n° 424260 du 3 juillet 2019, le Conseil d'État a confirmé que la liberté pédagogique propre auxdits établissements de respecter ou non les programmes nationaux légitime les spécificités des modalités d'organisation du contrôle continu dans les établissements d'enseignement privé hors contrat.
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