Mme Félicie Gérard attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur le non-remboursement de certains traitements contre le cancer en France. En effet, des traitements s'inscrivant dans le cadre de thérapies ciblées afin de soigner les cancers issus de mutations génétiques ont été approuvés par la Food and Drugs Administration américaine ainsi que l'Agence européenne des médicaments, mais pour autant rejetées par la Haute Autorité de santé. Bien que ces thérapies soient essentiellement utilisées dans des essais cliniques, elles semblent améliorer distinctivement la qualité de vie des patients, avec des effets secondaires moindres. Ces traitements semblent représenter une réelle alternative pour des patients qui n'ont pas d'autres options pour se faire soigner. La HAS considère pour autant ne pas avoir assez de données pour accorder à ces traitements un remboursement. Ces décisions amènent évidemment des conséquences tant pour le déploiement de la recherche française mais également dans l'égalité d'accès aux traitements pour les concitoyens comparativement aux citoyens des pays voisins. C'est pourquoi elle lui demande des précisions sur la stratégie que le Gouvernement souhaite mettre en œuvre afin de statuer sur la place de ces nouveaux médicaments innovants au sein du système de santé en vue de pouvoir leur accorder un potentiel remboursement.
L'évaluation des produits de santé en France et en Europe vise à garantir que les médicaments autorisés sur le marché en France ou en Europe présentent un niveau d'efficacité suffisant et un profil bénéfice / risque jugé favorable au vu des alternatives disponibles, afin que les patients puissent en retirer un bénéfice. La prise en charge des produits de santé et en particulier des médicaments, repose en France sur une double exigence : - d'une part, identifier parmi les médicaments de profil bénéfice / risque préalablement jugé favorable, les médicaments présentant un niveau d'efficacité justifiant leur prise en charge par la solidarité nationale et identifier, dans le cadre d'accès précoce, les médicaments pour lesquels la présomption de bénéfice est suffisamment forte pour justifier cette prise en charge également ; - d'autre part, permettre à l'ensemble des patients qui y sont éligibles, l'accès aux médicaments identifiés ci-dessus. La Haute autorité de santé (HAS) est chargée de manière collégiale et en toute indépendance, d'évaluer pour chaque médicament demandant son remboursement par l'assurance maladie : - son Service médical rendu (SMR) ; - l'amélioration du service médical rendu (ASMR) qu'il apporte par rapport aux alternatives existantes le cas échéant. À ce titre, son niveau d'exigence est élevé, en particulier concernant les données soumises par les industriels en vue de cette évaluation. Des études cliniques comparatives randomisées en double aveugle restent ainsi un prérequis afin de pouvoir juger de l'intérêt clinique d'un médicament au sein du panier de soins. Néanmoins, il peut exister des situations particulières dans lesquelles ces études cliniques comparatives randomisées en double aveugle sont impossibles. La commission de la transparence a fait évoluer ses modalités d'évaluation pour tenir compte de ces situations particulières. Pour exemple, la HAS indique que des comparaisons indirectes de bonne qualité méthodologique pourront conduire à une valorisation du niveau de service médical rendu. Enfin, certains de ces traitements font l'objet d'Autorisation de mise sur le marché (AMM) dite « conditionnelle », ce qui signifie que le rapport bénéfice / risque n'a pas encore été confirmé de manière certaine, et que l'agence européenne du médicament conditionne cette autorisation à la collecte de nouvelles données pour confirmer cette présomption de bénéfice clinique. De nombreuses réflexions sont en cours sur ce sujet, que ce soit au niveau européen dans le cadre de la révision de la législation pharmaceutique, ou aux Etats-Unis, et qui vont dans le sens d'une plus grande sécurisation sur les procédures de confirmation du bénéfice clinique apporté par le traitement. Par ailleurs, il est rappelé que notre système unique de prise en charge précoce des médicaments, récemment réformé en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) 2021, permet un accès aux thérapies présumées innovantes pour les patients souffrant de maladies graves, rares, dont le traitement ne peut être différé et pour lesquels il n'y a pas d'autre traitement approprié disponible en France. Le principe même des accès dérogatoires (qui par définition dérogent au niveau d'exigence exposé ci-dessus) existe depuis la crise du sida dans les années 80, où des traitements prometteurs mais non encore complètement évalués ont obtenu des dérogations pour être prescrits. La situation d'impasse thérapeutique est une des raisons qui permet de telles dérogations aujourd'hui. La réforme de 2021 permet ainsi aux patients français d'accéder aux médicaments les plus innovants avant même qu'ils ne disposent d'une autorisation de mise sur le marché. A titre informatif, depuis cette réforme, ce sont plus de 200 000 patients qui ont été traités via un accès dérogatoire.
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