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Damien Maudet
Question N° 5628 au Ministère du travail


Question soumise le 14 février 2023

M. Damien Maudet interpelle Mme la Première ministre au sujet du projet de baisser les cotisations à la caisse AT-MP pour compenser la hausse des cotisations vieillesses sur les entreprises. Fidèle à sa règle d'or de ne jamais augmenter les charges pour les entreprises, elle déclarait lors de la présentation de son projet de réforme : « Nous demanderons aux employeurs une contribution supplémentaire pour le financement de la retraite. Mais nous refusons qu'elle augmente le coût du travail. C'est pourquoi nous baisserons, symétriquement, la cotisation des employeurs au régime des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui est très excédentaire. ». Présenté de cette façon, elle donne l'impression à ceux qui l'écoutent que ce fameux excédent de la caisse AT-MP est une aubaine pour les finances de la sécurité sociale et qu'il suffirait de s'en saisir pour ne léser personne - à l'exception des travailleurs évidemment. Or elle sait pertinemment que cet excédent n'est pas là par hasard : les entreprises ont une tendance systématique à sous-déclarer le nombre de leurs accidents du travail afin de payer moins de cotisations à la branche AT-MP. L'excédent apparent de cette branche est donc naturellement reversé à l'assurance maladie pour compenser ce phénomène et ne pas léser cette dernière. Le présenter comme une manne financière à disposition comme elle le fait est une gigantesque arnaque qu'elle essaie en plus de passer sous silence. Déjà sur ce sujet, elle acte tous les ans un cadeau au patronat sur le dos de l'assurance maladie : tous les ans, la Cour des Comptes évalue le coût pour l'assurance maladie de ces sous-déclarations à des montants qui varient entre 1 et 2 milliards d'euros. Ce montant est déjà fortement sous-estimé, notamment au niveau des maladies psychosociales liées à l'emploi. Malgré ce rapport annuel, alors que le transfert de la branche AT-MP vers la branche AM est voté au sein du PLFSS, elle choisit de systématiquement prévoir un transfert inférieur au montant estimé par le rapport. Ce cadeau annuel au patronat consiste ni plus ni moins qu'à financer une baisse de cotisations patronales par l'argent de la collectivité. Mais cette réforme va bien plus loin dans le cynisme : en faisant baisser les cotisations à la branche AT-MP pour les entreprises, afin de compenser la hausse des cotisations vieillesses et pour s'assurer que les entreprises n'aient surtout pas à contribuer à votre réforme des retraites, elle empêche mécaniquement le transfert des coûts de sous-déclaration d'accidents du travail. Pourtant, ce coût est directement lié à une fraude de la part des employeurs et elle demande à l'assurance maladie, financée par la collectivité, de le prendre en charge. Avec les variations envisagées, nous pouvons estimer qu'il représentera 800 millions d'euros de perte pour l'assurance maladie tous les ans. Nous avons ici un cas typique où elle créé artificiellement un déficit dans une caisse d'argent public et elle tentera très certainement dans quelques années de justifier une réforme injuste pour compenser ce même déficit. Il lui demande si elle a été nommée pour représenter les intérêts des Français, ou pour garantir les profits des entreprises.

Réponse émise le 2 mai 2023

La branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) est excédentaire depuis une décennie, à l'exception de l'année 2020 marquant un déficit dû à la crise sanitaire. Toutes hypothèses confondues, les projections financières confirment une augmentation des dépenses à un rythme moins soutenu que les recettes, renforçant la tendance excédentaire de la branche dans les années à venir. Cette situation favorable va permettre de couvrir tant le transfert de cotisations de la branche AT-MP au profit de la branche vieillesse, que les améliorations de la prise en compte de l'usure professionnelle telles que prévues dans le projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale. S'agissant de la sous-déclaration des AT/MP ainsi que ses répercussions financières tant sur la branche AT-MP que sur la branche Maladie, ce phénomène se caractérise par une multiplicité de facteurs qui appellent, pour la réduire, des mesures nombreuses et très variées (formation des professionnels de santé, amélioration des procédures administratives, contrôles, organisation de l'expertise et de la veille en santé-sécurité au travail …). La plupart de ces mesures nécessitent, pour être pleinement efficaces, une mise en œuvre sur une période longue. Le montant du transfert de la branche AT-MP vers la branche maladie au titre de la sous-déclaration, resté stable à 1 Md€ de 2015 à 2021, a augmenté substantiellement en étant fixé à 1,1 Md€ en 2022 puis 1,2 Md€ en 2023. Par ailleurs, la commission indépendante en charge de l'évaluation de cette sous déclaration fera le bilan des actions mises en œuvre dans la perspective de son nouveau rapport dont les travaux commenceront dès la fin de 2023 pour aboutir en 2024. Il est rappelé l'entière détermination du Gouvernement à renforcer tant la pérennité financière des politiques de sécurité sociale dans leur ensemble que la poursuite des objectifs de la branche AT/MP, l'amélioration de son caractère incitatif à la prévention en particulier.

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