Mme Marine Hamelet interroge Mme la ministre de la culture sur les difficultés rencontrées par les communes pour assurer l'entretien et la rénovation des églises communales. Ces difficultés concernent en particulier l'obtention des subventions, y compris pour les établissements classés aux monuments historiques. Dans cette situation, les propos récents d'une ancienne ministre de la culture, parlant de « sauvetage inconsidéré d'une église sans intérêt patrimonial », appellent l'État à clarifier la situation budgétaire de ce dossier. En effet, aux termes de la loi de séparation de l'Eglise et de l'État du 9 décembre 1905, les communes sont propriétaires et donc responsables des églises construites avant cette date, des meubles les garnissant, de leur rénovation, mais également de la sécurité des personnes les fréquentant. Néanmoins, les communes n'ont aucune obligation d'entretien des églises non protégées, tant que cela ne pose pas un risque de sécurité vis-à-vis des fidèles. Les autres sources de financement, comme le recours au mécénat, sont insuffisantes et n'ont pas vocation à remplacer l'effort que doivent accomplir les finances publiques. Dans le Tarn-et-Garonne comme partout en France, il n'est pas rare que des églises communales soient fermées pour cause de risques d'effondrement et, dans un nombre alarmant de cas, détruites, faute de moyens. Par conséquent, elle lui demande quelles actions le Gouvernement compte mettre en place pour financer la sauvegarde du patrimoine français que représentent les églises communales. Partant du constat que seuls 15 000 édifices religieux sont actuellement protégés au titre des monuments historiques, elle lui demande également de se prononcer sur l'opportunité de créer un nouveau régime de protection commun et de conduire un nouvel inventaire national de ces églises. Les recenser permettrait de faire le point sur leur nombre, leur état de conservation et l'opportunité de nouveaux classements pour des édifices présentant un intérêt jusque-là insoupçonné.
Depuis bientôt soixante années, l'Inventaire général du patrimoine culturel poursuit sa mission (recenser, étudier et faire connaître les éléments du patrimoine qui présentent un intérêt culturel, historique ou scientifique) sur l'ensemble du territoire, suivant une méthodologie éprouvée et étayée par de nombreux supports scientifiques et des principes normés. Le patrimoine religieux a toujours occupé une place importante dans ses travaux. À ce jour, dans les bases de données patrimoniales du ministère de la culture, le patrimoine religieux représente environ 23 000 dossiers « architecture » et 160 000 dossiers « objets », ces chiffres étant à ajouter à ceux des bases de données régionales, en constante évolution. En application de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, la compétence de l'Inventaire général du patrimoine culturel a été décentralisée aux régions et le patrimoine religieux fait partie intégrante de la programmation des services décentralisés, que ce soit dans le cadre d'opérations topographiques, qui prennent en compte l'ensemble des champs patrimoniaux d'un territoire, ou dans celui d'opérations thématiques. Le patrimoine religieux protégé au titre des monuments historiques fait l'objet d'une attention soutenue : plus de la moitié des crédits des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) destinés aux monuments historiques est consacrée au patrimoine religieux (132,4 M€ sur les 234,5 M€ de crédits alloués à la conservation des monuments historiques en 2022 par les DRAC). Par ailleurs, le ministère de la culture a mis en place, en 2018, un fonds incitatif, ciblé et partenarial (le « fonds incitatif pour le patrimoine » ou FIP), permettant de financer une intervention accrue, d'une part, de l'État, au travers de taux de subventions majorés, et d'autre part, des régions, dès lors qu'elles participent à hauteur de 15 % aux travaux de restauration sur des monuments historiques appartenant à des petites communes. Ce fonds cible en priorité les communes de moins de 2 000 habitants. Dans le cadre de ce dispositif, l'État peut accompagner des projets jusqu'à 80 % (contre un taux de référence de 40 à 50 %), voire 90 % en outre-mer, pour les immeubles classés, et jusqu'à la limite légale de 40 % (contre un taux habituel de 20 %) pour les immeubles inscrits. Depuis sa création, ce fonds a permis de financer 695 opérations sur l'ensemble du territoire national, pour un montant engagé de 65 M€ entre 2019 et 2022. Ces opérations concernent, dans leur très grande majorité, des édifices religieux appartenant à des communes. En raison de son succès, ce dispositif est reconduit et accompagné dans sa montée en puissance pour 2023 par une dotation de 18 M€. Depuis 2018, la Mission patrimoine (Loto du patrimoine) a aidé 762 sites pour leurs travaux de restauration, dont 108 emblématiques du patrimoine régional et 654 sites départementaux. Aujourd'hui, 60 % d'entre eux sont sauvées ou sur le point de l'être. 230 chantiers sont terminés et 240 sont en cours de travaux. Ainsi, ce sont près de 230 millions d'euros qui ont permis d'aider les travaux de restauration de l'ensemble des sites sélectionnés : plus de 125 millions d'euros issus du Loto du patrimoine ; 73 millions d'euros de crédits dégelés attribués par le ministère de la Culture aux projets protégés qui concernent des monuments historiques ; 30 millions d'euros collectés par la Fondation du patrimoine, provenant de mécénat d'entreprises (dont AXA, FDJ et FFDJ, parrainage de la Monnaie de Paris), de dons de particuliers et de ses ressources propres. Pour ce qui concerne les édifices non protégés au titre des monuments historiques, et notamment les édifices du culte appartenant aux communes, ceux-ci sont éligibles à la dotation d'équipement des territoires ruraux ou à la dotation de soutien à l'investissement local, dans les conditions prévues respectivement aux articles L 2334 32 à L. 2334-39 et L. 2334-42 du code général des collectivités territoriales. Ces subventions ne relèvent pas de la compétence du ministère de la culture. Le financement des travaux sur le patrimoine rural non protégé ne relève en effet plus du ministère de la culture. Les crédits correspondants ont été transférés aux départements, en application du IV de l'article 99 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales. Quant à la création d'un troisième niveau de protection d'État, complétant les régimes existants du classement et de l'inscription, elle n'apparaît pas nécessaire. En ce domaine comme en d'autres, l'État ne peut ni ne doit tout faire. C'est pourquoi l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme a prévu que les règlements des plans locaux d'urbanisme (PLU) peuvent protéger des immeubles, îlots ou quartiers en raison de leur intérêt culturel, historique ou architectural. Les édifices du culte non protégés au titre des monuments historiques figurent généralement au nombre des immeubles protégés par le règlement du PLU, lorsqu'il utilise ce dispositif. La conservation des édifices religieux, protégés ou non au titre des monuments historiques, repose donc sur l'engagement de toutes les parties prenantes, chacune à son niveau : propriétaire public ou privé, département, région, État via le ministère de la culture ou les dotations préfectorales. L'inventaire, œuvre considérable et de longue haleine que l'État mène en étroite liaison avec les régions, n'est heureusement pas une condition de la réalisation des travaux indispensables que le ministère de la culture conduit, ou auxquels il concourt, sur le patrimoine religieux partout en France.
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