M. Bruno Bilde interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur le dispositif de reconnaissance des droits des ayants droits du régime minier au titre du rachat des indemnités logement et chauffage. Ce dispositif créé en 1988 offrait la possibilité aux ayants droits de racheter leur logement en utilisant les indemnités logement et chauffage perçus dans le cadre des article 22 et 23 du statut des mineurs. Ce dispositif a été élargi à tous les salariés à partir de la circulaire du 9 février 1988 alors qu'il était auparavant uniquement destiné aux cadres. Par circulaire, le directeur du personnel et des relations humaines de Charbonnage de France a détaillé les modalités de remboursement de l'indemnité de logement due aux personnes bénéficiaires du statut de mineur. Les mineurs pouvaient ainsi choisir de racheter leur indemnité logement sous forme d'un prêt à intérêt. La loi de finances pour 2009 a reconnu le droit aux signataires au maintien de la circulaire de 1988 de façon rétroactive. Plus de 15 000 personnes sont encore concernés par cette circulaire, dont l'application a donné lieu à de nombreux litiges et à une jurisprudence importante. Les justiciables qui ont obtenu gain de cause et donc légitimes à bénéficier de ce dispositif se heurtent à des lenteurs administratives importantes. Il apparaît nécessaire de préserver cet acquis social et de rendre effectivement applicables les droits spécifiques qui avaient été ouverts par le régime minier jusqu'au dernier ayant droit. Il s'agit pour la très grande majorité des cas de personnes âgées qui ont donné leur vie pour l'industrie française au prix de nombreuses souffrances. Il lui demande quelles mesures il entend prendre pour faire en sorte que le droit en vigueur s'applique et ainsi mettre fin à ces lenteurs administratives.
Les articles 22 et 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du mineur prévoient que les membres du personnel des exploitations minières ou assimilées perçoivent des prestations de chauffage et de logement. Ces avantages perdurent au-delà de la date d'entrée en retraite du mineur et bénéficient également, sous conditions, au conjoint survivant. Pour favoriser les projets personnels d‘acquisition de leur logement ou de construction d'un logement neuf, Charbonnages de France a offert à ses salariés, la possibilité de capitaliser, au moment de leur départ en retraite ou le cas échéant jusqu'à l'âge de 65 ans, leurs indemnités de chauffage et de logement, au lieu de continuer à les percevoir au fil du temps, tous les trimestres. Toutefois, sur le plan fiscal, l'imposition de ce capital l'année de sa perception pouvait avoir des conséquences financières lourdes pour les mineurs. Par conséquent, un mécanisme plus adapté et très avantageux pour l'intéressé a été mis en place. Ainsi, dans le cadre de la formule dite du contrat « viager », le capital versé par l'employeur n'est pas un revenu imposable. En revanche, les indemnités dont les intéressés restent bénéficiaires en vertu du statut du mineur - bien qu'elles cessent de leur être versées - sont considérées comme un revenu annuel ; elles sont donc imposables et supportent des cotisations sociales. En contrepartie, l'agent renonce de manière définitive au versement des indemnités. Ainsi, le principe depuis l'origine est que le mineur qui opte librement et en toute connaissance de cause pour la capitalisation de ses indemnités renonce définitivement pour l'avenir à la perception future de ses avantages en nature, sous quelque forme que ce soit. Pour un couple, ce principe est néanmoins atténué lorsque la capitalisation est faite sur une tête (cas le plus fréquent), en ce sens qu'au décès de celui sur la tête de qui la capitalisation a été calculée le conjoint survivant retrouve le service des avantages en nature en espèces. Ce mécanisme de rachat des indemnités a été validé dès 1949 par le ministre de l'industrie et du commerce dans un courrier du 13 octobre 1949. Sur cette base, Charbonnages de France, dans le cadre de son pouvoir de direction, a organisé concrètement au fil des ans, par voie de circulaires, la mise en œuvre du dispositif. Les modalités d'application ayant fait l'objet d'interprétations différente selon les bassins houillers, il a été décidé en 1988 d'harmoniser le dispositif et une circulaire du 9 février 1988 en a redéfini les principes généraux et les modalités d'application. Cette circulaire - qui a été annexée par arrêté interministériel du 7 juin 2006 au décret n° 2004-1466 du 23 décembre 2004 relatif aux missions de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) - a certes été déclarée illégale sur la forme par le Conseil d'Etat en 2009, mais elle n'a pas été annulée et cet arrêt n'emporte en tant que tel aucun effet sur les contrats de capitalisation, qui n'ont pas un fondement réglementaire. En effet, les contrats de capitalisation sont des contrats de droit privé régi par le code civil et plus particulièrement des contrats aléatoires au sens du code civil (articles 1964 à 1983) et nullement des contrats de prêt. L'aléa est en l'espèce la date du décès du mineur : s'il décède avant l'âge retenu pour le calcul du capital, son conjoint survivant ou ses héritiers ne sont pas tenus de rembourser à l'ANGDM jusqu'à concurrence de la somme versée initialement ; s'il vit au-delà de l'âge de référence, il ne peut plus prétendre aux indemnités qu'il aurait perçues en l'absence de contrat. Au fil du temps, le mécanisme fiscal du contrat de rachat qui avait un caractère viager, dans la mesure où il prenait fin au décès de l'intéressé, devenait source de nombreux contentieux. En effet, ce mécanisme qui avait pour but initial d'être favorable en étalant l'imposition s'est révélé défavorable avec l'augmentation de l'espérance de vie. C'est la raison pour laquelle, dans un souci d'équité, l'article 3 la loi de finances n° 2008-1425 du 27 Décembre 2008 pour 2009 est venu limiter dans le temps, (une fois atteint l‘âge de référence ayant servi au calcul du capital) la durée de la fiscalisation, l'objectif étant que ce dispositif fiscal viager prenne fin dès que le souscripteur du contrat s'est acquitté de l'intégralité des impôts correspondant au capital perçu. Par ailleurs, dans un souci de sécurité juridique, cet article 3 est venu confirmer que le choix de la capitalisation est un choix définitif, c'est-à-dire qu'il emporte renoncement définitif aux prestations viagères visées par le statut du mineur. Bien que la renonciation définitive aux prestations ait pour fondement la liberté contractuelle, qu'elle résulte de l'esprit même du dispositif et qu'elle ait été confirmée par l'article 3 de la loi de finances pour 2009, ce principe a continué à être fortement contesté en justice. Par arrêts du 27 février 2013, la Cour de cassation a jugé que dès lors que les contrats de capitalisation ont été signés lors du départ à la retraite des anciens mineurs (ce qui est le cas de la très grande majorité des contrats), la renonciation au bénéfice des indemnités viagères est licite. En revanche, par arrêt du 2 décembre 2014, la Cour de cassation a considéré que, dès lors que le contrat de capitalisation a été signé avant le départ à la retraite de l'intéressé, ce dernier recouvre le droit au versement de ses indemnités une fois atteint l'âge retenu pour le calcul du capital. Enfin, par arrêt du 11 septembre 2019, la Cour de cassation s'est placée sur le terrain de la prescription pour rejeter la demande des anciens mineurs de recouvrer leurs indemnités et ce, quelle que soit la date de signature du contrat. Ainsi, les anciens mineurs ont opté en toute connaissance de cause pour la capitalisation de leurs indemnités de chauffage et de logement issues du statut du mineur, parce que ce dispositif était avantageux. Si ce dernier a pu se révéler déséquilibré avec l'augmentation de l'espérance de vie, tel n'est plus le cas depuis que l'article 3 de la loi de finances pour 2009 a mis un terme à la fiscalisation viagère, rendant ainsi le dispositif équitable. Par ailleurs, la Cour de cassation ayant définitivement tranché la question du retour aux indemnités après l'âge retenu pour le calcul du capital, il n'est pas envisagé dans le contexte actuel un retour au versement des indemnités après l'âge retenu pour le calcul du capital.
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