M. Laurent Jacobelli interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports sur les limitations en matière de télétravail pour les travailleurs frontaliers au Luxembourg. En effet, depuis le 30 juin 2022, le régime fiscal dérogatoire mis en place durant l'épidémie de covid-19 est supprimé. Désormais, les travailleurs français employés par des entreprises luxembourgeoises sont de nouveau limités à 29 jours de télétravail par an. Au-delà de ce plafond annuel, l'employeur doit fournir des fiches de paye françaises. Cela pénalise fortement à la fois les travailleurs français, mais également les entreprises luxembourgeoises qui sont alors obligées de recourir à un gestionnaire spécifique, source de complexité et sont par conséquent dissuadées d'embaucher des frontaliers. Le seuil actuel étant déjà considéré comme largement insuffisant avant la période épidémique, son relèvement à 34 ou 55 jours ne règlerait que partiellement cette difficulté. Il est de plus en totale déconnexion avec les enjeux environnementaux, économiques et sociaux d'aujourd'hui, ainsi qu'avec les attentes des frontaliers français, comme en témoigne le succès d'une pétition organisée en Lorraine demandant le passage à 2 jours de télétravail par semaine. Le quota de jours télétravaillés plébiscité par cette pétition, correspondant à 90 jours par an, répond directement aux enjeux et attentes précités. Avec une réduction de 25 % des trajets transfrontaliers quotidiens, le régime dérogatoire en vigueur lors de la période covid a prouvé qu'il allège fortement la pression sur les infrastructures de transport (actuellement surchargées). Il lui demande donc pourquoi, face à tel constat, la France refuse de mettre en place les 90 jours de télétravail par semaine pour les travailleurs frontaliers au Luxembourg et d'adapter en conséquence les règlements (CE) n° 883/2004 et (CE) n° 987/2009.
Compte tenu du développement important du télétravail dans le contexte de la crise sanitaire, la France et le Luxembourg se sont accordés, dans le cadre de la conférence intergouvernementale (CIG) du 19 octobre 2021, pour porter de 29 à 34 jours le forfait de télétravail prévu par la convention fiscale bilatérale du 20 mars 2018. Cet accord a donné lieu à la signature, le 7 novembre 2022, d'un avenant modifiant la convention fiscale en ce sens. Cet avenant est soumis à ratification dans chacun des États. Les jours de travail effectués dans cette limite de 34 jours seront ainsi considérés et imposés comme s'ils avaient été effectués dans l'État de situation de l'employeur. Ces dispositions ont vocation à bénéficier essentiellement aux nombreux frontaliers qui se rendent quotidiennement au Luxembourg pour y travailler. Cette nouvelle règle s'applique à compter des revenus perçus en 2023, le temps de définir, avant la fin de l'année 2024, une solution pérenne. S'agissant du volet sécurité sociale, dans le cadre de la crise sanitaire, et sur le fondement de la force majeure, les États membres de l'Union européenne ont mis en place une période de flexibilité en faveur des travailleurs frontaliers et transfrontaliers qui exercent une part substantielle de leur activité en télétravail dans leur État de résidence, afin d'éviter un changement de législation applicable en matière de couverture sociale du fait d'un recours accru au télétravail. Cette période transitoire a été prolongée à plusieurs reprises et a pris fin le 30 juin 2023. Elle est valable pour l'ensemble des États de l'Union européenne. Le groupe de travail chargé d'assister la commission administrative pour la coordination des systèmes de sécurité sociale dans la détermination de nouvelles règles en matière de télétravail dans le cadre des règlements de coordination préconise, à long terme, l'introduction d'une nouvelle règle pérenne spécifique au télétravail transfrontalier dans le cadre de la révision des règlements européens. À court terme, ce groupe de travail européen propose la conclusion d'un accord multilatéral dérogatoire aux règlements européens, sur le fondement de l'article 16 du règlement n° 883/2004, permettant aux travailleurs frontaliers et transfrontaliers de télétravailler dans leur État de résidence dans une limite inférieure à 50 % (soit jusqu'à deux jours et demi par semaine) sans changement de législation sociale applicable. Au regard de l'évolution des pratiques dans le monde professionnel et du recours désormais habituel au télétravail, les autorités françaises ont décidé de signer cet accord-cadre, qui prend effet à partir du 1er juillet 2023. Ses stipulations s'appliquent à tous les salariés frontaliers et transfrontaliers qui en font la demande, si leur résidence est située en France et leur employeur ou leur entreprise a son siège social ou son siège d'exploitation situé sur le territoire d'un autre État signataire. La liste des États signataires, dont le Luxembourg fait partie, est consignée par les autorités belges, qui agissent comme dépositaire de l'accord : télétravail transfrontalier dans l'UE, l'UEEE et la Suisse / Service Public Fédéral - Sécurité Sociale (belgium.be). À l'issue d'une période de six mois, une première évaluation des conséquences de la signature de cet accord sera conduite, au regard notamment de son impact à court et moyen terme sur l'emploi, le chômage, la sécurité sociale et les conditions de travail.
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