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Charlotte Leduc
Question N° 4878 au Ministère du travail


Question soumise le 24 janvier 2023

Mme Charlotte Leduc appelle l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances, sur les inégalités de pension scandaleuses entre les hommes et les femmes. En effet, selon la DREES en 2020, la pension de droit direct pour les femmes est, en moyenne, de 1 154 euros contre 1 931 euros pour les hommes, soit un écart de 40 %. Même si les ministres ne cessent de répéter, dans tous les médias, que la réforme des retraites est « juste », force est de constater que le projet présenté le 10 janvier 2023 ne comporte aucune mesure permettant de réellement s'attaquer aux inégalités genrées de pension. Pire, en reculant l'âge légal de départ et en accélérant le passage à 43 annuités cotisées pour bénéficier du taux plein, la réforme portée par le Gouvernement touche particulièrement les personnes avec des carrières hachées et des périodes de temps partiel. Or les femmes sont surreprésentées dans ces situations d'emploi. Alors même que les femmes arrivant à la retraite partent déjà plus souvent avec des carrières incomplètes (40 % des femmes sont concernés contre 32 % des hommes) et s'arrêtent plus tard que leurs homologues masculins (19 % des femmes sont allées jusqu'à 67 ans contre 10 % des hommes), la réforme envisagée propose d'augmenter le nombre de trimestres nécessaires pour bénéficier d'une carrière complète et retarde l'âge de départ à la retraite. Les femmes partiront donc encore plus tard et avec des carrières encore moins complètes. Cette injustice majeure va donc être fortement aggravée avec la réforme du Gouvernement. Le sujet de la pauvreté de nombreux et surtout nombreuses retraitées est le grand absent du texte qui sera bientôt présenté aux parlementaires. L'augmentation du minimum contributif à 85 % du SMIC est sans cesse mis en avant par les défenseurs de la réforme, mais cette garantie ne concernera qu'une infime partie des retraités. C'est d'ailleurs une mesure hypocrite car elle figurait déjà dans la réforme des retraites de 2003. Cette disposition présentée comme une avancée sociale traduisant le désir de « justice » du Gouvernement ne correspond donc qu'au respect de la loi existante. Enfin, il n'est pas inutile de rappeler que les inégalités genrées de pension ne tombent pas du ciel. Elles découlent directement des discriminations en matière d'embauche, de salaire et de carrière que subissent les femmes dans le monde du travail. Il est donc temps d'agir pour une réforme des retraites qui réduit les inégalités au lieu de les exacerber mais également d'en finir avec les inégalités dans le monde du travail avec des mesures fortes. Il n'est jamais trop tard pour enfin sanctionner les entreprises qui discriminent et pour revaloriser les métiers principalement féminins (dans la santé, l'éducation, les services à la personne...). D'ailleurs si les femmes étaient payées autant que les hommes, les surplus de cotisations ainsi générés suffiraient à combler le déficit du régime général de retraite. Il n'y a donc que de bonnes raisons de s'attaquer à ce problème plutôt que de mener une réforme des retraites qui va accroître les inégalités et dont une immense majorité de Françaises et de Français ne veulent pas. Elle lui demande quelles initiatives en ce sens seront prises par le Gouvernement dans les semaines qui viennent.

Réponse émise le 17 octobre 2023

L'égalité entre les femmes et les hommes a été érigée comme grande cause du quinquennat permettant de mettre au cœur de toute l'action du Gouvernement les enjeux de discriminations de genre. En 2020, selon la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, la pension brute moyenne des hommes, tous droits confondus, s'établissait à 1 820 € contre 1 370 € pour les femmes, soit un écart de 25 %. Cette différence est en résorption depuis 2004, où elle représentait alors 30 % de la pension des hommes, et est réduite grâce à l'effet compensatoire pour les femmes des pensions de réversion, qui leur sont octroyées à 88 % (la différence de pensions sans prise en compte de la réversion s'élève à 37 %). Rappelons tout d'abord que le système de retraite ne peut pas à lui seul compenser les inégalités accumulées tout au long de la vie de nos concitoyens ; il se doit néanmoins de les atténuer ; les droits familiaux et conjugaux de retraite répondent à cet objectif. S'agissant de la situation actuelle des droits familiaux de retraite, les femmes ont un nombre de trimestres cotisés qui s'élève à 126 trimestres en moyenne contre 150 pour les hommes, ce qui traduit encore une participation un peu plus faible des femmes au marché du travail. Toutefois, les trimestres acquis au titre des majorations de durées d'assurance pour enfants, au titre de la maternité, de l'adoption et de l'éducation, ainsi que de l'Assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) permettent aux femmes d'atteindre une durée d'assurance équivalente à celle des hommes, soit 161 trimestres pour les femmes et 160 pour les hommes. Ce dispositif permet donc une compensation au sein du système de retraite des impacts de l'éducation des enfants sur la carrière des femmes. Ces mesures ont été renforcées depuis le 1er septembre 2023, d'une part avec la prise en compte de l'AVPF et la création d'une assurance vieillesse pour les proches aidants (AVA) pour ouvrir droit au dispositif de retraite anticipée pour carrières longues et au minimum contributif. D'autre part, un minimum de deux trimestres, sur les quatre validables au titre de la majoration de la durée d'assurance pour l'éducation d'un enfant et répartis entre les parents assumant l'éducation, sera désormais réservé à la mère. Une surcote à partir de 63 ans a en outre été introduite permettant de continuer à valoriser les trimestres de majoration de durée d'assurance pour enfant acquis, indépendamment du report de l'âge de départ à la retraite. Enfin, la réforme de la prise en compte des indemnités journalières d'assurance maternité, initiée par la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites pour les congés maternité débutant après le 1er janvier 2012, a été étendue pour permettre la prise en compte dans le salaire annuel moyen des indemnités journalières au titre de la maternité versées avant cette date. Plus globalement, la question renvoie à l'évolution des droits familiaux et conjugaux de retraite qui ont fait l'objet de débats dans le cadre de la réforme des retraites. Dans ce cadre, la Première ministre a souhaité confier une mission au comité d'orientation des retraites pour étudier les évolutions souhaitables, tout en s'attachant à ce que les propositions formulées soient compatibles avec l'objectif de pérennité financière du système des retraites et que les effets redistributifs soient analysés.

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