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Raphaël Gérard
Question N° 4875 au Ministère de la justice


Question soumise le 24 janvier 2023

M. Raphaël Gérard alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la mauvaise application des dispositions prévues au II de l'article 30 de la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique concernant les modalités d'inscription du sexe à l'état civil des enfants présentant une variation du développement génital. Le droit positif prévoit qu'il est possible pour un officier d'état civil de reporter l'indication du sexe de l'enfant au-delà du délai légal de cinq jours suivant l'accouchement en cas d'impossibilité pour le médecin de déterminer ce sexe à l'issue de ce délai. L'ajout de la mention du sexe médicalement constaté intervient alors dans un délai ne pouvant excéder trois mois à la demande des représentants légaux ou du Procureur de la République. Cette mesure est une avancée très attendue par les familles, ainsi que l'ensemble des associations de personnes concernées. Elle permet à la fois de simplifier les modalités d'inscription de la mention du sexe de ces enfants en évitant de recourir à une procédure judiciaire de rectification d'un acte d'état civil et de renforcer le droit au respect de la vie privée des personnes concernées en autorisant que ces modifications ne soient pas mentionnées sur l'extrait d'acte de naissance ou sur la copie intégrale de l'acte de naissance. Cette question est fondamentale en matière d'effectivité des droits des personnes intersexes en France dans la mesure où les difficultés d'assignation du sexe à la naissance ont longtemps servi de justification pour procéder à des interventions dépourvues de toute nécessité médicale. Or plusieurs mois après l'entrée en vigueur de la réforme dont les modalités d'application ont été précisées par la voie du décret n° 2022-290 publié en date du 1er mars 2022, il apparaît que ces dispositions ne sont pas respectées par les services d'état civil des communes saisies de ces cas. À titre d'exemple, les mairies de Dijon ou de Dax affirment que le logiciel d'enregistrement des actes d'état civil utilisé ne permet pas de produire une copie intégrale de l'acte de naissance sans mention des modifications apportées à l'état civil de l'enfant dans le cadre de la procédure de report. Dès lors, des mentions marginales liées à la rectification de la mention du sexe sont visibles, ce qui n'est pas conforme au souhait clairement exprimé par le législateur et le Gouvernement au moment des travaux préparatoires de la loi de protéger le droit à la vie privée des familles. La mairie de Nîmes a produit un acte d'état civil avec la mention de « sexe indéterminé », en violation des dispositions légales et réglementaires en vigueur et en méconnaissance des recommandations formulées par les équipes des centres de références spécialisés dans la prise en charge médicale de ces enfants. Ce choix est absolument préjudiciable dans la mesure où il est de nature à nourrir le traumatisme qui peut être ressenti par les parents de l'enfant au moment de la découverte de la variation. Il interroge M. le ministre sur les moyens envisagés pour faire appliquer le droit positif et garantir le respect des droits des personnes intersexes, conformément aux engagements pris dans le cadre de l'action 10 du Plan national d'actions pour l'égalité, contre la haine et les discriminations anti-LGBT+ 2020-2023.

Réponse émise le 28 février 2023

La loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique a mis en place de nouveaux dispositifs afin de permettre une meilleure prise en compte de la situation des personnes présentant une variation du développement génital. Cette loi (article 30 II 1°) a inséré un nouvel alinéa à l'article 57 alinéa 2 du code civil qui permet à l'officier de l'état civil de reporter, au-delà du délai de cinq jours après la naissance (délai prévu pour les déclarations de naissance, article 55 du code civil) et pour une durée maximale de trois mois, l'indication du sexe à l'état civil, en cas d'impossibilité pour le médecin de le déterminer dans ce délai. Cette loi (article 30 II 2°) a également inséré un nouvel alinéa à l'article 99 alinéa 2 du code civil qui prévoit expressément la possibilité pour les personnes présentant une variation du développement génital de faire rectifier la mention de leur sexe et de leur (s) prénom (s) à l'état civil dans l'hypothèse où la mention du sexe aurait été inscrite par erreur, soit parce que la pathologie n'était pas détectable à la naissance, soit parce que le sexe n'était pas déterminable dans le délai légal de trois mois. Enfin, dans un objectif de respect de l'intimité de la vie privée et afin de tirer les conséquences de ces nouveaux dispositifs, le décret n° 2022-290 du 1er mars 2022 portant application de certaines dispositions de la loi relative à la bioéthique au cas des personnes qui présentent une variation du développement génital (article 4) a modifié l'article 38 du décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l'état civil afin de prévoir que, sauf autorisation du procureur de la République, les copies intégrales des actes de l'état civil seront délivrées sans faire apparaître les mentions marginales relatives à la rectification d'une erreur ou d'une omission relative au sexe. Le décret du 1er mars 2022 rappelle que ces dispositions s'appliquent aux copies intégrales des actes de l'état civil délivrées à compter de l'entrée en vigueur du décret, quelle que soit la date de l'acte et de sa rectification (article 5). A ce jour, aucune difficulté n'a été identifiée lors de la phase de demande de suspension d'inscription de la mention du sexe (article 57 du code civil), ni de celle de demande de rectification lorsque celle-ci est nécessaire (article 99 du code civil). De rares difficultés rencontrées dans l'application concrète de l'article 38 modifié du décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 (délivrance de copies intégrales d'actes de l'état civil ne faisant pas apparaître la mention de l'erreur ou de l'omission du sexe et de sa rectification) ont été signalées au ministère de la Justice. Si une partie de ces difficultés peut être liée au délai nécessaire d'appropriation de ce nouveau dispositif par les officiers de l'état civil, d'autres sont d'ordre technique et nécessitent une adaptation des logiciels de gestion de l'état civil. Le ministère de la Justice travaille actuellement à l'élaboration d'une nouvelle circulaire visant à résoudre ces difficultés afin que l'ensemble des personnes concernées puisse bénéficier effectivement du dispositif de l'article 38 modifié du décret n° 2017-890 du 6 mai 2017. Sa diffusion permettra d'attirer l'attention des parquets et, sous leur contrôle, des officiers de l'état civil sur cette problématique, et aux éditeurs de logiciels de gestion de l'état civil de procéder à une mise à jour de ceux-ci.

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