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Philippe Fait
Question N° 4855 au Ministère de la justice


Question soumise le 24 janvier 2023

M. Philippe Fait alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la protection des enfants en cas de suspension de l'autorité parentale. Dans le cadre de la protection des enfants victimes de violence, l'autorité parentale peut-être suspendue pour motif grave dès l'ordonnance de protection édictée au moment du divorce ou par le juge pénal. Si ces décisions de retrait de permis de parentalité se démocratisent davantage aujourd'hui, elles cachent néanmoins une tout autre réalité qui est celle des rencontres imposées qui privent ces mêmes victimes de protection. Par asymétrie, la justice impose pourtant des droits de visites à ces mêmes enfants que l'on souhaite préserver. Cette injonction paradoxale prive les victimes de leur droit à la reconstruction et redonne le contrôle au parent condamné sur la vie des victimes très fréquemment affectée par un stress post-traumatique qui brise leur vie sociale, leur vie scolaire et même leur santé. Quand le retrait de l'autorité parentale est fondé sur des violences faites aux enfants, le droit de visite devrait être suspendu de droit à moins que le juge n'en décide autrement avec une décision dûment motivée. Par conséquent, il aimerait connaître les solutions que le Gouvernement entend mettre en place pour éliminer ce paradoxe qui peut gravement nuire à la vie de ces enfants.

Réponse émise le 9 mai 2023

L'autorité parentale est définie à l'article 371-1du code civil comme un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant. Elle résulte du lien de filiation. Chaque parent est ainsi investi, en principe, de la titularité de l'autorité parentale, d'une part, et de son exercice, d'autre part, par le seul fait qu'un lien de filiation est établi entre lui et son enfant. La titularité de l'autorité parentale, ou son seul exercice, peut faire l'objet d'un retrait. L'article 378 du code civil encadre les conditions de ce retrait dans un cadre pénal. En cas de condamnation d'un parent en qualité, soit d'auteur, coauteur ou complice d'un crime ou d'un délit commis sur la personne de son enfant ou sur la personne de l'autre parent, soit d'auteur, coauteur ou complice d'un crime ou d'un délit commis par son enfant, le juge pénal peut, par décision expresse, retirer l'autorité parentale ou l'exercice de l'autorité parentale. L'article 378-1 du code civil encadre les conditions de ce retrait dans un cadre civil. En dehors de toute condamnation pénale, le tribunal judiciaire peut ainsi ordonner le retrait de l'autorité parentale dans les deux cas visés au premier et au deuxième alinéa de cet article. L'alinéa 1er vise les père et mère qui mettent manifestement en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l'enfant soit par de mauvais traitements, soit par une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ou un usage de stupéfiants, soit par une inconduite notoire ou des comportements délictueux, notamment lorsque l'enfant est témoin de pressions ou de violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l'un des parents sur la personne de l'autre, soit par un défaut de soins ou un manque de direction. L'alinéa 2 vise les père et mère qui s'abstiennent volontairement pendant plus de deux ans d'exercer les droits et de remplir les devoirs que leur laissait l'article 375-7 du code civil, alors qu'une mesure d'assistance éducative a été prise à l'égard de l'enfant. Le retrait de l'autorité parentale porte de plein droit sur tous les attributs, tant patrimoniaux que personnels, rattachés à l'autorité parentale : perte du droit d'être informé des choix importants relatifs à la vie de l'enfant, de surveiller son éducation, de l'administration légale, des prérogatives fondamentales de l'autorité parentale (consentement au mariage, à l'adoption, à l'émancipation). Il en résulte qu'en cas de retrait de l'autorité parentale dans un cadre civil ou pénal, aucun droit de visite ou d'hébergement ne subsiste. L'autre parent, unique titulaire de l'autorité parentale, conserve seul le devoir de protéger l'enfant dans sa sécurité, sa moralité et sa santé, de fixer sa résidence, et de conduire son éducation. Le retrait de l'exercice de l'autorité parentale prive le parent du seul exercice de son droit. Il reste en revanche investi de la titularité de celle-ci. A ce titre, il conserve le droit d'entretenir des relations personnelles avec l'enfant par l'exercice des droits de visite et d'hébergement. Ce droit peut toutefois, dans l'intérêt de l'enfant, être refusé pour des motifs graves (article 373-2-1, alinéa 2 du code civil). Ces motifs graves peuvent de surcroît être identiques à ceux qui ont conduit à retirer cet exercice de l'autorité parentale. En tout état de cause, si les droits de visite ne sont pas retirés, le juge aux affaires familiales peut, si nécessaire, fixer le droit de visite dans un espace de rencontre désigné à cet effet en vue d'assurer de manière effective la protection due à l'enfant. Dans le cadre d'une ordonnance de protection, la protection de l'enfant est également assurée. L'article 515-11 5° du code civil prévoit en effet que le juge aux affaires familiales peut interdire tout contact entre le parent violent et son enfant ou encore fixer la résidence de l'enfant chez l'autre parent. Enfin, le juge aux affaires familiales peut accorder au parent violent des droits de visite médiatisés, sans qu'il ne s'agisse d'une obligation. Par ailleurs, si le juge interdit à la partie défenderesse de recevoir ou de rencontrer certaines personnes spécialement désignées, le droit de visite du parent violent doit alors obligatoirement être ordonnée dans un espace de rencontre désigné ou en présence d'un tiers de confiance, sauf motivation spéciale contraire. En pratique, l'appréciation de l'intérêt de l'enfant dépend de chaque cas d'espèce. Si le retrait de la titularité de l'autorité parentale peut apparaître comme plus protecteur dans certains cas, dans d'autres, il pourrait être contraire à cet intérêt que l'enfant soit privé de tout lien avec son parent. La décision de prononcer l'un plutôt que l'autre dépend des circonstances d'espèce et doit donc rester soumise à l'appréciation d'un juge. Le Gouvernement reste particulièrement attentif à la protection des enfants confrontés aux violences intrafamiliales. C'est pourquoi il soutient la proposition de loi déposée par la députée Madame Isabelle Santiago le 15 décembre 2022, en cours de discussion au Parlement, et visant à mieux protéger les enfants victimes de violences intrafamiliales. Ladite proposition de loi a notamment pour objet d'élargir le champ des faits criminels et délictueux, en particulier incestueux, susceptibles de conduire à un retrait de l'autorité parentale ou de son exercice, aux fins d'une protection effective des enfants.

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