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Florence Goulet
Question N° 4828 au Ministère du ministère de l’économie


Question soumise le 24 janvier 2023

Mme Florence Goulet appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les conditions de résiliation des contrats d'assurance. L'article R. 113-10 du code des assurances prévoit, au bénéfice des assureurs et à leur discrétion, une faculté de résiliation après sinistre, à la seule condition qu'elle soit expressément stipulée dans le contrat. Cette faculté de résiliation joue même pour un sinistre de faible ampleur ou dont l'assuré n'est pas responsable. Cette disposition est régulièrement mise en œuvre par les assureurs pour renégocier une police d'assurance à la hausse après seulement deux ou trois sinistres dérisoires ou alors que la responsabilité d'un tiers est entièrement établie. Il en résulte que de plus en plus de Français se trouvent soudainement privés d'assurance, à moins d'en souscrire une nouvelle bien plus onéreuse, alors même qu'ils n'ont commis aucune faute ou des erreurs sans gravité. Dans le premier cas, il est bon de rappeler que l'assureur de la victime d'un sinistre peut normalement se retourner contre celui du responsable. Dans le second, c'est à priori l'objet même du contrat d'assurance que de couvrir des sinistres. Cela est particulièrement préjudiciable aux personnes en situation de handicap, d'autant plus pénalisées par ce problème qu'elles sont plus vulnérables et que les sinistres peuvent avoir pour elles des conséquences plus graves. Il est difficile de discerner en quoi la survenance de tels évènements justifie qu'une compagnie d'assurance résilie brusquement et unilatéralement un contrat au seul motif qu'elle s'est trouvée devoir l'appliquer. Aussi, elle demande au ministre quelles solutions sont envisagées pour pallier ce problème qui concerne de nombreuses personnes.

Réponse émise le 30 janvier 2024

Le droit des assurances est un droit d'inspiration consumériste. Afin de rééquilibrer les rapports de force entre assureurs et assurés, le code des assurances comporte de nombreuses obligations à la charge des professionnels destinées à protéger les souscripteurs d'un contrat d'assurance. L'assureur est ainsi débiteur d'une obligation d'information et de conseil au profit de son client, et c'est à lui que revient la charge de prouver qu'elle a bien été respectée. Tout manquement à cette obligation est susceptible d'engager la responsabilité civile de l'assureur. En outre, les assureurs sont soumis au régime des clauses abusives lorsqu'ils contractent avec un consommateur. Aux termes de l'article L. 212-1 du code de la consommation en effet, toute clause ayant pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, est réputée non écrite. Le régime de résiliation des contrats d'assurance dispose d'un encadrement spécifique, comprenant lui aussi des dispositions favorables aux droits des consommateurs. L'article L. 113-15-2 du code des assurances reconnaît ainsi un droit de résiliation infra-annuel (RIA) unilatéral aux consommateurs pour certains contrats. Le Gouvernement a souhaité renforcer l'effectivité de ce droit. Ainsi, la loi du 16 août 2022 dite « MUPA » est venue faciliter l'utilisation de ce droit, en prévoyant une procédure de résiliation en ligne de ces contrats selon une procédure dite en « trois clics ». Le décret du 16 mars 2023 est venu préciser les modalités d'application de cette procédure de résiliation simplifiée, dont l'entrée en vigueur a été fixée au 1er juin 2023. En parallèle, le code des assurances reconnaît aux assureurs un droit de résiliation unilatéral dans certains cas spécifiques. L'article R. 113-10 de ce code permet aux assureurs de résilier unilatéralement une police d'assurance à la suite d'un sinistre dans des conditions strictement définies : cette résiliation doit être prévue au contrat et elle ne peut prendre effet qu'à l'expiration d'un délai d'un mois à dater de la notification à l'assuré. En outre, lorsque ce droit à résiliation est prévu au contrat, l'article R. 113-10 permet à l'assuré de résilier les autres contrats d'assurance qu'il peut avoir souscrits auprès de l'assureur, la résiliation prenant effet un mois à dater de la notification à l'assureur. En outre, ce droit à résiliation de l'assureur n'est pas absolu et est soumis au contrôle du juge. À cet égard, la Cour de cassation a jugé dans un arrêt du 18 janvier 2018 (Civ. 2e, n° 16-26.494) que l'usage de ce droit pouvait, dans certaines circonstances, comporter un caractère abusif et que la seule survenance d'un sinistre ne pouvait fonder l'assureur à utiliser à bon droit cette faculté. Dans cet arrêt, la Cour, ayant constaté que le nombre de sinistres n'avait pas augmenté avant la résiliation par l'assureur, invite ainsi les juges du fond à examiner les circonstances de fait pour déterminer si cette résiliation avait ou non un caractère abusif. Le Gouvernement est particulièrement attentif à la protection des consommateurs et continuera à s'assurer du bon équilibre des droits et obligations entre assureurs et assurés.

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