M. Nicolas Forissier alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la prolifération conséquente et dangereuse du frelon asiatique (Vespa Velutina) en France et sur l'importance d'établir une stratégie nationale de lutte contre cette espèce. Du danger que cet insecte représente pour la population générale aux conséquences désastreuses que celui-ci est susceptible d'avoir sur les ruchers des apiculteurs et, plus globalement, sur la biodiversité, les problématiques posées par le frelon asiatique sont multiples. Signalé pour la première fois dans le département du Lot-et-Garonne il y a une vingtaine d'années, il se développe depuis de manière exponentielle sur l'ensemble du territoire métropolitain en profitant d'un climat favorable et d'une absence de prédateurs à son encontre. Toutefois, malgré les problématiques implicites susmentionnées et inhérentes à cette espèce, aucune stratégie collective à l'échelle nationale ne semble avoir été mise en place pour lutter contre sa prolifération. Si son placement sur la liste des dangers sanitaires de deuxième catégorie pour l'abeille domestique Apis mellifera permit certes à la filière apicole de prendre des mesures de surveillance et de lutte dès 2012, aucune stratégie collective ne fut toutefois mise en place par l'État. Aussi, même si l'article L. 411-8 du code de l'environnement stipule que « l'autorité administrative peut procéder ou faire procéder à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction des spécimens de cette espèce », le code de l'environnement n'apporte pas de précisions sur les modalités de financement de ces opérations de lutte revenant régulièrement à la charge des particuliers. Enfin, cette espèce n'étant pas catégorisée dans la loi de santé animale européenne de 2021, il n'existe aucune obligation de prévention ou d'éradication à l'échelle européenne. Il demande donc au Gouvernement ce que ce dernier compte mettre en place afin de s'inscrire dans une démarche globale de lutte contre le frelon asiatique en France. Engager une campagne nationale de prévention et de piégeage des fondatrices dès le printemps, prendre en charge les interventions de destruction des nids par les départements ou encore appuyer la reconnaissance de cette espèce au sein de la loi de santé animale européenne, les demandes des apiculteurs sont aujourd'hui nombreuses et méritent d'être entendues. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.
La lutte contre le frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax), espèce ayant connu une expansion rapide dès son introduction accidentelle en Aquitaine en 2004, est encadrée par un corpus législatif et réglementaire complet et détaillé ci-après. Le plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation qui a été lancé conjointement par les ministères de la transition écologique et de l'agriculture en novembre 2021 est de nature à soutenir une bonne application des moyens de lutte (action 4.4.4 du plan, disponible ici : https://agriculture.gouv.fr/plan-national-en-faveur-des-insectes-pollinisateurs-et-de-la-pollinisation-2021-2026-DP). Depuis fin avril 2021, une seule réglementation concourt à la lutte contre cette espèce : celle portant sur les espèces exotiques envahissantes (EEE) pilotée par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTECT). Celle portant sur les organismes de quarantaine, pilotée par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA), a exclu le frelon asiatique au regard de la nouvelle législation européenne dite "loi de santé animale » (Cf ci-après). Concernant la réglementation spécifique sur les EEE, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a complété le code de l'environnement pour intégrer des dispositions législatives permettant d'agir contre les EEE (articles L. 411-5 et suivants). Au regard de l'intérêt de préservation du patrimoine biologique, des milieux naturels et des usages associés, l'article L.411-6 de du code de l'environnement interdit sur le territoire national, l'introduction, la détention, le transport, le colportage, l'utilisation, l'échange, la vente ou l'achat de tout spécimen vivant d'EEE, dont la liste est fixée par l'arrêté interministériel du 14 février 2018. Le frelon asiatique est inscrit sur cette liste. Les opérations de lutte sont définies à l'article L.411-8 du code de l'environnement. Ainsi, dès constat de la présence dans le milieu d'une EEE, le préfet de département peut « procéder ou faire procéder (…) à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction de spécimens » d'EEE. Un arrêté préfectoral précise alors les conditions de réalisation de ces opérations. Les préfets peuvent notamment ordonner la destruction de nids sur des propriétés privées. Le financement des opérations de lutte contre le frelon n'est pas pris en charge par l'État, au regard du degré très large d'envahissement du territoire métropolitain par l'espèce. La destruction des nids reste à la charge des particuliers et ses coûts peuvent être, le cas échéant, pris en charge en tout ou partie par des financements locaux émanant de collectivités territoriales. Parallèlement, la direction générale de l'alimentation du MASA accompagne financièrement l'Institut technique et scientifique de l'apiculture et de la pollinisation (ITSAP – Institut de l'Abeille) et le MNHN (Muséum national d'Histoire naturelle) pour leurs actions techniques et scientifiques relatives à l'identification et à la validation des outils de lutte contre le frelon asiatique. Les actions financées comportent deux volets : une méthode concernant le piégeage des fondatrices au printemps et le développement d'un protocole pour la destruction de nids par appâts empoisonnés. Le premier volet des travaux concernant le piégeage est arrivé à son terme et a montré que le nombre de nids du frelon asiatique décroît significativement lorsque la méthode est conduite durant plusieurs printemps successifs, avec un maillage spatial fin et régulier (plus de 200 pièges répartis de façon homogène sur environ 10 km2 autour d'un rucher à protéger). Un complément d'étude est envisagé sur 2023, afin d'approfondir les résultats. Le second volet vise à vérifier l'efficacité d'appâts empoisonnés et leurs impacts sur l'environnement. Dans le cas où la méthode se montrerait efficace, il reviendra à la filière et/ou à un industriel de réaliser les démarches d'obtention des autorisations « substances biocides », puis « produits ». Ce projet devrait également permettre de proposer une méthode alternative au fipronil (hautement toxique) utilisé sans autorisation pour lutter contre les frelons. Enfin, il est à noter que le frelon asiatique n'est pas réglementé par le ministère de la santé et des solidarités au titre des espèces nuisibles pour la santé humaine car il s'avère, au regard des données des centres anti-poisons, que l'espèce ne présente pas de danger supérieur par rapport d'autres hyménoptères (frelon européen, guêpes, etc). Si cette situation venait à changer du fait de l'extension de l'espèce, la question de sa réglementation serait à réexaminer.
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