Mme Angélique Ranc rappelle à M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées le taux de pauvreté grandissant en France et plus spécifiquement dans certains quartiers de Troyes. La troisième édition du rapport sur la pauvreté de l'Observatoire des inégalités parue fin 2022 affiche des résultats qui ne surprennent plus. Les habitants des quartiers prioritaires ont un niveau de vie inférieur de 640 euros par mois à ceux des quartiers voisins. 44 % de la population de ces territoires vit sous le seuil de pauvreté. À Troyes, deux de ces quartiers (Jules-Guesde et les Sénardes) figurent parmi les 20 quartiers les plus défavorisés de France, Jules-Guesde en faisait déjà parti en 2017 selon l'Insee. Ces quartiers figuraient également parmi les deux plus pauvres de l'Aube en 2016 alors que le département voyait quatre de ses dix quartiers parmi les vingt plus pauvres du Grand Est. Ce sont 65 % de la population du quartier Jules-Guesde, le plus pauvre de la région Grand Est, qui sont en dessous du seuil de pauvreté. Aujourd'hui, le rapport montre plus de 40 % de la population de ces deux quartiers troyens ont moins de 24 ans et que la moitié des habitants sont des personnes isolées. Le taux d'emploi des 15-64 ans est très bas puisqu'il frôle les 30 %. Requalifiés il y a une quinzaine d'années, les Sénardes devraient faire face sans investissement majeur sur le plan urbanistique, à la différence de Jules-Guesde dont le chantier a été lancé en mars 2021. Ce premier quartier, comme beaucoup d'autres, nécessite par exemple le retour d'une activité économique urgente, d'autant plus lorsqu'on sait qu'il n'a plus de commerce alimentaire. Compte tenu des concertations du pacte des solidarités au sujet de l'amplification de la politique d'accès au travail pour tous et la lutte contre la grande exclusion, elle souhaiterait connaître les mesures d'urgence que le Gouvernement envisage de mettre en place pour répondre aux différentes problématiques dont souffrent ces quartiers prioritaires.
Le Gouvernement porte une ambition et une démarche renouvelée dans la politique de lutte contre la pauvreté pour la mandature 2022-2027. Il s'agit de lutter de manière structurée contre la pauvreté dans la continuité de la stratégie nationale initiée en 2018 et de faire face de manière réactive aux difficultés rencontrées par les plus vulnérables. Le Pacte des Solidarités prendra ainsi la suite, sur la période 2024-2027, de la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté. Il porte plusieurs priorités : - lutter contre les inégalités à la racine et éviter la reproduction de la pauvreté entre générations, en confortant l'orientation stratégique en faveur de l'investissement social, et engageant des actions visant à prévenir la pauvreté ; - assurer la sortie de la pauvreté par l'activité et l'emploi, en lien avec la démarche France Travail, en améliorant l'accompagnement à l'insertion professionnelle, et en levant les freins à l'emploi. Une attention particulière est dans ce cadre apportée aux publics les plus fragiles, les plus éloignés de l'emploi ; - assurer l'égale dignité de chacun par la garantie d'un accès aux droits essentiels et protéger les personnes dans les moments de rupture, afin d'éviter un basculement vers la grande précarité ; - organiser une transition écologique et solidaire qui participe à la réduction du poids des dépenses contraintes (alimentation, mobilité, énergie…) pour les personnes les plus précaires. Parce que la mobilisation croissante des compétences des collectivités est essentielle en matière de lutte contre la pauvreté, le Pacte des Solidarités ambitionne de poursuivre la démarche partenariale initiée par la Stratégie pauvreté avec les collectivités, avec les conventions d'appui à la lutte contre la pauvreté et d'accès à l'emploi et renforcer la gouvernance contractuelle des politiques de solidarités. Le volet national du Pacte sera ainsi complété et décliné, sur les territoires, par des pactes locaux, afin de poursuivre la dynamique de contractualisation avec les collectivités territoriales. Il s'agit d'adapter les mesures nationales aux spécificités locales et de développer la gouvernance territorialisée. Les conventions seront signées entre l'Etat et les Conseils départementaux d'une part, et l'Etat et les métropoles d'autre part, afin de déployer des actions co-financées, à la main des territoires et dans les 4 champs du Pacte des Solidarités, sur l'ensemble de la période 2024-2027. Des crédits dédiés seront mobilisés par l'Etat, aux côtés des collectivités co-contractantes. Ces pactes locaux auront, notamment, pour objectif la levée des freins sociaux à l'accès à l'emploi des publics qui en sont le plus éloignés, de cibler les publics les plus fragiles et de renforcer les capacités de repérage et d'accompagnement adapté. Ils viseront également, afin de développer l'accès aux droits, à développer les démarches de détection et d'allers vers, renforcer l'accompagnement des publics détectés et former les professionnels du champ social. En matière de prévention de la reproduction de la pauvreté, le président de la République a récemment annoncé que les collèges de réseaux d'éducation prioritaire allaient être progressivement ouverts de 8 à 18 heures et que la maternelle serait accessible dès l'âge de 2 ans, à commencer par Marseille. En matière d'accès à l'emploi des jeunes des quartiers prioritaires, le récent rapport de l'Inspection générale des affaires sociales sur la mise en œuvre du contrat d'engagement jeunes, lancé en 2022 montre que 19,2 % des bénéficiaires de ce dispositif d'accompagnement renforcé assorti d'une allocation financière, sont issus des quartiers politiques de la ville (QPV) (alors qu'ils ne représentent que 7 % de la population générale). Le Gouvernement poursuit enfin ses engagements, afin de renforcer la qualité de l'aide alimentaire et de permettre l'accès à une alimentation saine, durable et de qualité pour les personnes en situation de vulnérabilité économique ou sociale. Le programme « Mieux manger pour tous », pluriannuel, d'un montant de 60 millions d'euros, se décline à partir de 2023 en deux volets : - un volet national (40 millions d'euros) à destination des associations de lutte contre la précarité alimentaire habilitées au niveau national pour l'achat de denrées, à savoir des fruits, légumes, légumineuses et produits sous label de qualité. - un volet local (20 millions d'euros) qui a pour but de renforcer les alliances locales de solidarité alimentaire, s'appuyant sur les associations et collectivités, notamment dans le cadre des projets alimentaires territoriaux. Le programme « Mieux manger pour tous » a ainsi pour ambition de favoriser l'émergence de nouvelles formes de solidarités alimentaires, notamment dans les QPV en soutenant des actions portant sur la transformation de l'organisation de la lutte contre la précarité alimentaire et la lutte contre les zones blanches de l'aide alimentaire. Ainsi, le programme Mieux manger pour tous visera à déployer des initiatives de type groupements d'achat en lien avec les bailleurs sociaux, expérimentation de chèques alimentaires locaux, etc.
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