Mme Marina Ferrari interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie, sur les perspectives d'accompagnement à long terme pour les entreprises électro-intensives et hyper électro-intensives, qui sont à l'avant-garde de la préservation de la souveraineté industrielle française. Au regard des tensions actuelles sur les marchés de l'électricité, ces entreprises bénéficient d'un soutien ponctuel sans précédent de la part du Gouvernement afin de réduire leurs charges et de préserver leur compétitivité. Par ailleurs, ayant un poids très important pour l'économie française, les entreprises électro-intensives et hyper électro-intensives sont également soutenues par le biais de divers dispositifs tels que la valorisation de la flexibilité de consommation, l'abattement de tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité ou bien la compensation des coûts du système communautaire de quotas carbone incorporé dans le prix de l'électricité. Malgré les dernières décisions de relèvement du quota plafond, l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique ainsi que les dispositifs susmentionnés ne constituent pas une solution pérenne pour la survie des entreprises électro-intensives et hyper électro-intensives. De plus, certaines entreprises hyper électro-intensives bénéficient des dispositions de l'article 8 de la Loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, mais ces dispositions arrivent à échéance au 31 décembre 2022. Enfin, la compétitivité de ces entreprises - qui évoluent dans un marché concurrentiel mondial - reste fortement soumise à la variation des prix de l'électricité sur les marchés de gros, alors qu'elles ont besoin d'une fourniture entre 20 et 30 euros/MWh rendu aux bornes de leurs usines, transports et taxes compris, avant flexibilité, avec une visibilité de 15 ans minimum. Cette visibilité à long terme est nécessaire pour que les industriels continuent de stimuler l'emploi dans les territoires (les industries hyper électro-intensives représentent 50 000 emplois directs et indirects ; 50 % des sites hyper électro-intensifs sont localisés dans le Département de la Savoie et les départements limitrophes), mais également pour éviter les ruptures des chaînes de valeur globales desquelles ils se trouvent en amont. Au vu de la nature des enjeux, le Gouvernement a lancé, à l'occasion d'une table-ronde interministérielle avec les industriels électro-intensifs, un groupe de travail sur les contrats long-terme piloté par Philippe Darmayan de janvier à juin 2022. Le rapport remis au Gouvernement vise à recenser des formules contractuelles envisageables pour le futur. À date, la question se pose toujours des suites opérationnelles que le Gouvernement proposera aux industries électro-intensives et hyper électro-intensives. À l'heure où plusieurs Gouvernement européens appellent de leurs vœux une réforme structurelle du marché de l'électricité en Europe, Mme la députée, élue de Savoie où sont implantés 50 % des sites hyper-électro intensifs français, souhaite savoir dans quelle mesure le Gouvernement compte soutenir la compétitivité des entreprises électro-intensives et hyper électro-intensives françaises sur le long terme, en leur garantissant un cadre sûr concernant leur approvisionnement électrique.
Le Gouvernement est pleinement engagé pour soutenir ces entreprises qui jouent un rôle stratégique pour assurer la souveraineté de notre économie en ce que leurs activités se situent généralement en amont des chaînes de valeur. Le soutien de ce secteur est primordial, dans un contexte où l'Inflation Reduction Act (IRA) américain intensifie la concurrence internationale à laquelle ces entreprises font face. Le prix de l'électricité représente un poste de coût important pour ces entreprises. Depuis plusieurs années, ces industriels peuvent bénéficier de la « boîte à outils électro-intensifs », composée des dispositifs de compensation des coûts indirects du carbone, d'abattement du tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (TURPE), de fiscalité énergétique réduite et de l'interruptibilité, qui peuvent réduire considérablement le prix de l'électron. De plus, leur profil de consommation plat et anticyclique, leur confère un approvisionnement accru à l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH), sous réserve de négociations avec leurs fournisseurs, qui constitue aujourd'hui un avantage compétitif majeur en raison du produit livré (bandeau annuel) et du prix de 42 €/MWh. Conscient du besoin de visibilité de ces entreprises, le Gouvernement travaille activement au développement d'un nouveau cadre régulatoire qui succédera à l'ARENH à partir de 2026. L'objectif est de faire bénéficier les entreprises françaises de l'avantage compétitif que constitue le parc nucléaire existant au travers d'un prix stable et attractif. Par ailleurs, la France est pleinement engagée dans la réforme du marché européen de l'électricité. Cette réforme constitue un levier majeur pour accélérer la décarbonation de notre économie, dans laquelle beaucoup des entreprises électro-intensives sont engagées et renforcer leur compétitivité. Cette réforme doit permettre de faciliter l'atteinte de l'objectif de neutralité carbone à horizon 2050 en stimulant l'investissement dans des capacités de production décarbonées et en électrifiant notre industrie. Ces objectifs ne pourront être atteints qu'en donnant de la visibilité à l'ensemble des acteurs du système électrique, consommateurs comme producteurs. Ces consommateurs pourraient dans ce cadre bénéficier d'un prix plus stable et d'une prévisibilité accrue. C'est la raison pour laquelle la France est attachée à rapprocher les prix payés par tous les types de consommateurs, y compris industriels, des coûts de production du mix énergétique national. Les premières propositions formulées par la Commission européenne le 14 mars dernier sont encourageantes et la France continuera de porter ces positions au niveau européen afin d'aboutir à l'adoption d'un texte d'ici la fin de l'année 2023. De plus, le Gouvernement souhaite favoriser la conclusion de contrats de long terme permettant de sécuriser le coût de l'approvisionnement en électricité et donner de la visibilité aux acheteurs, via des contrats de long terme dits « power purchase agreements » (PPA) assis sur les énergies renouvelables et des contrats de long terme assis sur le parc nucléaire. Les échéances visées pourraient ainsi aller de 10 à 15 ans pour accompagner les investissements importants dans les appareils productifs et leur décarbonation. Le rapport remis par M. Darmayan a en effet esquissé de premières propositions sur la forme que pourraient prendre des contrats de long terme reflétant la compétitivité du parc nucléaire français. Les travaux se poursuivent à ce sujet avec les parties concernées. Aussi, les autorités françaises ont confirmé leur objectif de développer de tels contrats de long terme et de lever les freins juridiques à leur développement dans le cadre de la consultation engagée par la Commission européenne sur la réforme du marché de l'électricité. Par ailleurs, le Gouvernement a annoncé le 10 novembre dernier la création d'un fonds de garantie pour encourager le développement des contrats d'approvisionnement à long terme assis sur des énergies renouvelables (PPA EnR). En couvrant le risque de défaut de l'industriel acheteur, ce fonds vise à orienter le développement des producteurs d'électricité renouvelable vers la conclusion de contrats de long terme avec des industriels (plutôt que le cadre existant de soutiens publics directs). Le dispositif concerne toutes les énergies renouvelables électriques et doit être opéré par Bpifrance. L'objectif est de prendre en garantie des premiers contrats en 2023. Le fonds est d'ores et déjà dimensionné pour pouvoir prendre en garantie des contrats représentant jusqu'à 500 MW de puissance installée cumulée.
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