M. Yannick Monnet appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les pratiques dites « d'urbex », qui s'étendent aujourd'hui à des bâtiments qui ne sont pas abandonnés, voire qui sont habités. Le Château de Lévis, dans l'Allier, est ainsi régulièrement « visité » par des adeptes de l'urbex, y compris en présence des propriétaires. L'entrée dans le bâtiment par effraction, la dégradation d'une porte ou d'une fenêtre, la diffusion des clichés ou des vidéos de ces explorations sur les réseaux sociaux, sont autant d'éléments traumatisants pour les propriétaires des lieux. Ces dérives en matière de violation de propriété privée posent des problèmes de sécurité, tant pour les occupants que pour les adeptes de l'urbex. Les forces de police et de gendarmerie semblent également démunies, face à ces dérives et à l'ampleur que prend l'urbex. Il lui demande quelles sont les mesures que le Gouvernement compte prendre pour mieux encadrer cette pratique et mieux protéger les propriétaires des lieux.
Le droit de propriété ainsi que le droit au respect de la vie privée constituent des principes à valeur constitutionnelle. Les personnes s'introduisant à l'intérieur des domiciles à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte sont susceptibles de faire l'objet de poursuites pour violation du domicile en application de l'article 226-4 du code pénal, si ces faits sont portés à la connaissance de la justice. La peine encourue est alors d'un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende. Si la notion de domicile n'est pas définie par le code pénal, la Cour de cassation considère qu'il n'y a pas lieu de distinguer l'habitation effectivement occupée au moment des faits et celle qui est momentanément vide de tout habitant. A cet égard, la jurisprudence assimile au « domicile d'autrui » au sens de l'article 226-4 du code pénal, un local industriel ou commercial, des sites industriels clos dont l'accès est interdit à toute personne non expressément autorisée et gardés. En conséquence, dès lors que la pratique dénoncée consiste à visiter des bâtiments, historiques ou non, qui ne sont nullement abandonnés, mais bien habités régulièrement, les intéressés sont susceptibles d'être poursuivis sur ce fondement. Par ailleurs, l'introduction dans ces locaux implique fréquemment la commission de dégradations, notamment pour altérer les dispositifs de fermeture interdisant l'accès. Dès lors, les faits de dégradations de biens privés, le cas échéant aggravées si elles sont commises sur un bien classé ou inscrit au titre des monuments historiques, en application de l'article 322-3-1 du code pénal, sont également susceptibles d'être poursuivis. Les peines encourues s'élévent à 2 ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende en cas de dégradations sans cause d'aggravation, mais sont portées à 7 ans d'emprisonnement et 100.000 euros d'amende en cas de faits commis sur un immeuble classé.. Outre les poursuites qui pourront être intentées contre l'intrusion et les dégradations susceptibles de l'accompagner, l'action de la justice pourra également s'orienter vers la lutte contre la diffusion des contenus illicites sur internet et les réseaux sociaux, préoccupation essentielle du ministère de la Justice. L'article 6 I 8 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique permet ainsi à l'autorité judiciaire de prescrire aux hébergeurs ou, à défaut, aux fournisseurs d'accès à internet, en référé ou sur requête, « toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication au public en ligne ». Le texte permet ainsi d'enjoindre aux fournisseurs d'accès à internet, le blocage à partir du territoire national des accès aux sites internet et autres contenus susceptibles de faire naître un dommage ou occasionnant un dommage. A ce titre, le fait de propager des contenus tendant à inciter à la commission d'infractions, telles que des atteintes aux biens ou à la propriété, est susceptible de caractériser le dommage visé par le texte précité. Ainsi, le droit existant comporte d'ores et déjà des dispositions permettant de lutter contre les pratiques dites « d'urbex ». Il est à noter qu'une proposition de loi visant à protéger les logements contre l'occupation illicite, déposée par Guillaume KASBARIAN le 18 octobre 2022 et actuellement en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, prévoit d'une part, de renforcer les sanctions pesant sur les auteurs du délit de violation de domicile, pour les porter à 3 ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende, et d'autre part, de sanctionner l'introduction et le maintien frauduleux dans un local d'habitation ou à usage économique d'une peine de 2 ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende. Si cette proposition de loi est adoptée, elle permettra de sanctionner encore plus efficacement les atteintes à la proprieté que vous mentionnez.
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