Mme Nathalie Serre souhaite appeler l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur les enjeux de la prorogation de l'expérimentation du cannabis thérapeutique pour le développement d'une filière française de production de ces médicaments. Lancée en mars 2020 sous le pilotage de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et des produits de santé, pour une durée initiale de deux ans, cette expérimentation sur l'usage médical du cannabis vient d'être prorogée pour une année supplémentaire par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, dans une logique de poursuite de l'évaluation thérapeutique mais aussi de structuration de la filière française, aujourd'hui en retard. En effet, de nombreuses questions restent en suspens sur des points majeurs (le cadre et la définition des standards de production, le statut du produit, les indications thérapeutiques pertinentes, leur évaluation, les modalités de définition de leur prix et de leur remboursement), ne permettant pas aux acteurs industriels nationaux d'obtenir la visibilité nécessaire à leurs démarches, notamment en matière de R&D. Ce retard pris est fortement préjudiciable, à la fois pour les patients en quête de soulagement et qui espèrent une pérennisation rapide et qualitative de l'expérimentation, mais aussi pour notre souveraineté sanitaire, alors que le pays recourt actuellement à des produits étrangers. C'est pourquoi elle lui demande de bien vouloir lui indiquer comment le Gouvernement entend combler ce retard et mettre à profit l'année restante de l'expérimentation, afin de favoriser le développement d'une filière industrielle française de cannabis médical au bénéfice des patients, dans l'hypothèse où l'expérimentation viendrait à être pérennisée.
A titre liminaire, plusieurs limites ont été identifiées lors de l'évaluation intermédiaire de l'expérimentation du cannabis thérapeutique : l'étude de l'utilisation et de l'impact de l'initiation du cannabis sur le recours aux autres ressources médicales n'a pu être menée ; un circuit qui ne permet pas d'offrir un accès équitable sur l'ensemble du territoire ; un suivi des patients qui mérite d'être consolidé pour disposer de données plus robustes, avant une généralisation. L'ensemble de ces éléments ont conduit à prolonger l'expérimentation d'une année, afin de préparer l'encadrement en droit commun de ces médicaments particuliers, notamment sur la définition d'un statut et le cas échéant des modalités de prise en charge. Parallèlement à l'expérimentation du cannabis à usage médical, il est apparu nécessaire de créer une filière de culture et de production de cannabis à usage médical en France, ceci afin d'envisager, en vue d'une entrée en droit commun du cannabis médical, la fourniture de médicaments fabriqués sur le territoire national. Le décret n° 2022-194 du 17 février 2022 relatif au cannabis à usage médical ouvre ainsi la possibilité de cultiver du cannabis à usage médical sur le territoire national. Il appelle un arrêté interministériel permettant de fixer les modalités techniques de détention, de culture, d'importation, d'exportation, de transport ainsi que de stockage de la plante de cannabis à des fins médicales. A cet effet, un projet d'arrêté a été mis à la consultation des parties prenantes en début d'année, dont la version définitive intégrant une partie de leurs propositions a fait l'objet d'une présentation en réunion plénière. Cet arrêté précise le cadre dans lequel s'exercera la culture et la production de la plante de cannabis à des fins médicales sur le territoire national. Il fixe notamment les obligations incombant aux acteurs concernés, le contenu de la demande d'autorisation administrative, les critères relatifs aux installations concernées ainsi que les modalités de sécurisation du dispositif. Ce texte doit désormais être notifié à la Commission européenne au titre de la directive (UE) 2015/1535, et sous réserve d'une absence d'avis circonstancié de la Commission européenne, il pourrait être publié trois mois plus tard. Dans le cadre du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, les discussions se poursuivront en lien avec les parties prenantes afin de décider de l'issue de cette expérimentation et autour des spécifications et du statut de ces futurs médicaments, duquel dépendra leur éventuelle prise en charge.
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