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Christine Pires Beaune
Question N° 4148 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 20 décembre 2022

Mme Christine Pires Beaune attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le phénomène de retrait-gonflement des sols argileux (RGA). Les phénomènes d'aléas climatiques récurrents, liés à une situation de forte sécheresse avant une réhydratation des sols provoquent chaque année des mouvements de terrain et endommagent un certain nombre d'habitations par des fissures et des affaissements des bâtis. Ce phénomène est appelé à se multiplier avec les conséquences du réchauffement climatique. Afin de prévenir de futurs dommages en matière de sécheresse, un amendement a été adopté à la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan), pour encadrer les constructions en zone argileuse, de manière à s'assurer qu'elles soient construites avec les dispositions constructives adaptées. Ainsi, l'article 68 de la loi Elan met en place un dispositif permettant le respect des règles de l'art pour les maisons individuelles construites à compter du 1er janvier 2020 dans les zones exposées au phénomène de RGA. Si l'avenir est assuré pour les constructions neuves, la question du bâti ancien reste d'actualité. En effet, de nombreux sinistrés se retrouvent dans des situations très compliquées, voire désespérées, car les assurances refusent de leur rembourser les sinistres faute d'arrêté interministériel de reconnaissance de catastrophe naturelle qui précise les zones et les périodes où elle s'est située. Au regard de l'intensification des catastrophes naturelles due au changement climatique, les questions indemnitaires mais aussi assurantielles doivent en effet être repensées. Un fond d'indemnisation pourrait être créé. Une interdiction d'urbaniser dans les zones à risques majeures dans les PLUI pourrait être introduite. Elle lui demande donc quelles solutions le Gouvernement envisage à long terme, face à ce phénomène de plus en plus récurrent.

Réponse émise le 13 juin 2023

L'attention du Gouvernement a été appelée sur l'évolution des modalités d'indemnisation des habitants dont les biens sont sinistrés par le phénomène de sécheresse-réhydratation des sols dans le cadre du régime de la garantie catastrophe naturelle. Une réforme législative de ce régime a été adoptée par le Parlement et promulguée le 28 décembre 2021. Le texte a notamment procédé à des adaptations du régime permettant une meilleure prise en compte des spécificités du risque de retrait-gonflement d'argiles. Ainsi, cette loi institue des délais plus favorables aux assurés et mieux adaptés à la cinétique lente du phénomène de retrait-gonflement d'argiles. Cette adaptation des délais s'est matérialisée par un allongement de 18 à 24 mois du temps laissé au maire pour déposer une demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Dans le même esprit, le délai maximum dans lequel les assurés doivent déclarer le sinistre à leur assureur a été porté de 10 à 30 jours. Enfin, le délai de prescription pour ce phénomène n'est plus biennal mais quinquennal. La loi encadre également mieux les pratiques des assureurs qui ont, avec leurs experts, un rôle central pour déterminer l'éligibilité d'un sinistre à la couverture par le régime des catastrophes naturelles et pour définir les travaux nécessaires à la réparation du préjudice subi. Elle oblige les assureurs à transmettre désormais automatiquement aux sinistrés le rapport définitif d'expertise ainsi que toutes les constatations faites par l'expert au cours de la procédure. De même, il est fait obligation aux entreprises d'assurance de rappeler le droit à contre-expertise dont dispose chaque assuré. Enfin, les assureurs sont désormais contraints de proposer une indemnisation d'un montant suffisant pour financer des travaux « permettant un arrêt des désordres existants consécutifs à l'événement lorsque l'expertise constate une atteinte à la solidité du bâtiment ou un état du bien le rendant impropre à sa destination ». Malgré ces apports multiples, les dispositions de la loi du 28 décembre 2021 ne modifient pas en profondeur les conditions d'indemnisation des épisodes de sécheresse-réhydratation des sols qui sont identiques aux autres phénomènes naturels couverts par le régime de la garantie catastrophe naturelle. Conscient des limites des modalités actuelles de prise en charge des effets du phénomène, le législateur a, par l'article 161 de la loi dite 3DS du 21 février 2022, habilité le gouvernement à adopter par voie d'ordonnance des modalités d'indemnisation spécifiques à la sécheresse-réhydratation des sols au sein du régime de la garantie catastrophe naturelle. Au terme de travaux interministériels approfondis, l'ordonnance no 2023-78 du 8 février 2023 a été adoptée. Cette ordonnance, ainsi que les textes d'application qui l'accompagneront dans les prochains mois, prévoient d'abord un assouplissement des critères utilisées pour caractériser l'intensité des épisodes de sécheresse-réhydratation des sols afin d'augmenter sensiblement le nombre de communes éligibles à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Cet assouplissement interviendra, par voie réglementaire, sur trois plans : – assouplissement des critères pris en compte pour analyser le caractère anormal des épisodes de sécheresse en retenant une période de retour de 10 ans au lieu de 25 ans ; – prise en compte des communes ayant subi une succession anormale de sécheresses d'ampleur significative, mais dont l'intensité mesurée année par année n'est pas exceptionnelle. – et meilleure prise en compte de la situation des communes adjacentes aux communes reconnues en état de catastrophe naturelle afin de répondre aux effets de bord des critères actuels. L'ordonnance prévoit par ailleurs d'encadrer plus fermement les modalités de réalisation des expertises diligentées par les assureurs. Cet encadrement sera assorti de contrôles et de sanctions pesant sur les experts des assureurs qui ne remplissent pas les exigences de qualité qui seront fixées par décret. Enfin, afin de mieux cibler l'indemnisation, celle-ci sera concentrée sur les sinistres susceptibles d'affecter la solidité ou d'entraver l'utilisation normale du bâtiment endommagé. Par ailleurs, la Première ministre a confié le 13 avril dernier à Monsieur Vincent LEDOUX, député du Nord, une mission visant à identifier des mesures susceptibles d'améliorer la prévention des mouvements de terrains différentiels provoqués par la sécheresse-réhydratation des sols et la sensibilisation des particuliers et des collectivités exposées à ce risque naturel. Il est également invité à proposer des mesures visant à améliorer l'indemnisation des sinistrés les plus modestes en complément du dispositif actuel fondé sur le régime de la garantie catastrophe naturelle.

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