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Eva Sas
Question N° 4010 au Ministère de la justice


Question soumise le 13 décembre 2022

Mme Eva Sas attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation de jeunes habitants de sa circonscription, parfois mineurs, faisant face à des dettes de contraventions considérables. Cette situation résulte de nombreuses verbalisations pour divers motifs comme les tapages ou plus récemment les contraventions liées au non-respect des confinements et couvre-feu. Au-delà du questionnement légitime que peut susciter ce cumul de contraventions sur un même individu, il convient ici de souligner que cette accumulation rend impossible le règlement de ces contraventions. De plus, cette situation plonge ces jeunes dans une grande difficulté financière au moment de rentrer dans la vie active et à la réception de leurs premiers salaires. Mme la députée interroge donc M. le ministre sur les dispositifs qu'il pourrait mettre en place afin de s'assurer que ces jeunes aient la possibilité de recouvrir leur dette sans compromettre leur avenir personnel et professionnel. Mme la députée demande notamment à M. le ministre s'il envisage de porter une modification du code pénal permettant de prononcer à titre principal une peine de travail d'intérêt général pour les contraventions de la 2e classe à la 4e classe ; le travail d'intérêt général étant un outil de prévention de la récidive ainsi qu'une sanction à visée pédagogique de réinsertion. Enfin, elle souhaite savoir s'il envisage de porter la création d'une procédure permettant de transformer des dettes de contraventions passées en heures de travail d'intérêt général.

Réponse émise le 7 mars 2023

Il existe deux catégories d'amendes susceptibles d'être prononcées à l'encontre un mineur : les amendes prononcées par une juridiction et les amendes forfaitaires contraventionnelles. Elles sont toutes deux conformes aux principes fondamentaux de la justice pénale des mineurs, tels que le principe d'individualisation, de cohérence avec le parcours du mineur et de proportionnalité de la sanction à la gravité des faits. L'article L. 121-6 du code de la justice pénale des mineurs encadre de plus le prononcé de ces amendes. Il est interdit de prononcer une peine d'amende supérieure à la moitié de la peine encourue ainsi que de prononcer une peine d'amende excédant 7 500 euros. Par ailleurs, les juridictions pour mineurs ont peu recours à la peine d'amende. En effet, en 2020, sur 39 354 mineurs condamnés, 1 910 l'ont été à une peine d'amende ferme ou avec sursis. A côté de ces amendes, les amendes forfaitaires contraventionnelles sanctionnent les infractions courantes et de faible gravité, telles les hypothèses évoquées. Le paiement de ces amendes met fin aux poursuites et permet d'éviter un procès (articles 529 et suivants du Code de procédure pénale). A l'inverse, le travail d'intérêt général (TIG) sanctionne des faits constitutifs d'une contravention de 5ème classe ou d'un délit. Contrairement aux infractions de faible gravité, le TIG sanctionne donc des faits de gravité moyenne et multiples. Il peut être prononcé comme peine principale autonome ou comme obligation particulière d'une peine d'emprisonnement assorti d'un sursis probatoire, et ne peut être prononcé qu'à l'égard d'un mineur âgé de plus de 16 ans (âge légal à compter duquel un mineur est autorisé à travailler). Une réforme en profondeur du TIG a été opérée par la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Elle s'est notamment traduite par une extension des possibilités du prononcé de la peine de TIG (offre de places de TIG, habilitation simplifiée). Toutefois, le TIG demeure une mesure répressive et restrictive de liberté dont l'inexécution constitue un délit autonome, passible d'une peine d'emprisonnement de deux ans. Aussi, au regard de la potentielle lourdeur de cette peine, étendre le prononcé du TIG aux contraventions de la 2ème classe à la 4ème classe, serait disproportionné au regard de l'échelle des peines comme de l'intérêt supérieur du mineur. Cet élargissement aboutirait à un renforcement de la répression à leur encontre, et ce malgré les vertus pédagogiques et d'insertion associées au TIG. Le recouvrement des amendes forfaitaires, comme le recouvrement des amendes prononcées par les juridictions, constitue à la fois un enjeu financier et une question de crédibilité de la réponse pénale. Dans le prolongement du rapport d'information n° 330 (2018-2019) de M. Antoine LEFÈVRE, il conviendra davantage d'améliorer le traitement et le recouvrement des amendes pénales, notamment par une réflexion sur les délais de paiement, plutôt que de créer de nouveaux dispositifs plus lourds.

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