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Delphine Batho
Question N° 3702 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 6 décembre 2022

Mme Delphine Batho interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la prise en charge des dommages causés aux habitations par les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols. La sécheresse que subit le pays en 2022 risque de devenir la norme dans les prochaines années en raison de l'accélération du réchauffement climatique. Elle engendre déjà des phénomènes de retrait-gonflement des argiles qui ont des conséquences importantes sur les habitations, notamment dans le département des Deux-Sèvres. Or l'indemnisation des habitants dépend de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour la commune et une circulaire n° INTE1911312C du 10 mai 2019 a procédé à une révision des critères permettant de caractériser l'intensité des épisodes de sécheresse-réhydratation des sols à l'origine de mouvements de terrains différentiels en appuyant l'analyse de ces épisodes sur un critère géotechnique et hydrométéorologique. Comme l'ont démontré le rapport de la Cour des comptes paru en février 2022 (« Sols argileux et catastrophes naturelles - Des dommages en forte progression, un régime de prévention et d'indemnisation inadapté ») et des travaux du Sénat, la procédure actuelle n'est nullement satisfaisante. L'État a modifié de façon restrictive les critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle liée aux retrait-gonflement des argiles de sorte que, depuis quelques années, seulement 50 % des demandes de reconnaissance des communes aboutissent. Par exemple, pour l'année 2021, 27 communes des Deux-Sèvres qui demandaient légitimement ce classement ne l'ont pas obtenu. À cette division par deux des communes reconnues, s'ajoute ensuite la division par deux des dossiers effectivement indemnisés par les assurances. En effet, une fois que la commune est reconnue en état de catastrophe naturelle pour la sécheresse, les habitantes et habitants sont confrontés à la réticence de certains assureurs et à la contestation de l'origine des fissures par leurs experts. De ce fait, à l'échelle nationale, le préjudice non reconnu, subi par les sinistrés de la sécheresse, a été estimé à 5 milliards d'euros entre 2003 et 2015. L'article 161 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale dispose que « le Gouvernement est habilité à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi afin d'améliorer la prise en charge des conséquences exceptionnellement graves sur le bâti et sur les conditions matérielles d'existence des assurés des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse ou à la réhydratation des sols ». Aussi, elle souhaite connaître les mesures qui seront inscrites dans l'ordonnance en préparation et les dispositions qu'entend prendre le Gouvernement pour remédier aux injustices que génère un dispositif totalement inadapté à l'aggravation des conséquences du réchauffement climatique.

Réponse émise le 31 janvier 2023

L'attention du Gouvernement a été appelée sur les modalités de prise en charge des sinistrés concernés par le phénomène de sécheresse-réhydratation des sols. Une réforme législative du régime de la garantie catastrophe naturelle a été adoptée par le Parlement et promulguée le 28 décembre 2021. Le texte renforce notamment la transparence des décisions prises pour l'ensemble des phénomènes concernés par la garantie y compris le phénomène de sécheresse-réhydratation des sols. Par ailleurs, l'article 161 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale habilite le Gouvernement à entreprendre par voie d'ordonnance, dans un délai d'un an, une réforme des modalités d'indemnisation du phénomène sécheresse-réhydratation des sols au sein du régime de la garantie catastrophe naturelle. Les travaux du Gouvernement sont en cours pour mettre en œuvre cette réforme. Ainsi, le Gouvernement souhaite rappeler la mise œuvre en 2020 d'une aide aux sinistrés les plus affectés par l'épisode de sécheresse de l'année 2018 dont les communes n'avaient pas été reconnues en état de catastrophe naturelle. Le dispositif a été précisé par les décrets n° 2020-1423 du 19 novembre 2020, n° 2021-640 du 21 mai 2021 et n°2021-1278 du 29 septembre 2021, publiés au Journal officiel. De plus, le décret n° 2022-1737 du 30 décembre 2022 relatif à l'indemnisation des catastrophes naturelles introduit également de nouvelles dispositions. Ainsi, il définit la composition de la future commission nationale consultative des catastrophes naturelles, instance regroupant des représentants des assureurs, des élus locaux, des associations de sinistrés, des représentants d'entreprises, des personnalités qualifiées et des directions ministérielles concernées. Cette commission, présidée par un élu local, sera chargée de rendre annuellement un avis sur la pertinence des critères retenus pour déterminer la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle et sur les conditions effectives d'indemnisation des sinistrés. Ce décret prévoit ensuite la généralisation de la prise en charge des frais de relogement d'urgence par la garantie couverte par le régime Cat Nat, jusqu'à 6 mois, pour les sinistrés assurés dont la résidence principale serait rendue inhabitable à la suite d'une catastrophe naturelle. Enfin, il encadre les franchises applicables aux particuliers et aux professionnels à compter du 1er janvier 2024, afin de mieux protéger les sinistrés. Conscient des limites du dispositif actuel de prise en charge des désordres provoqués par le retrait-gonflement des argiles et des enjeux dans le contexte de réchauffement climatique, le Gouvernement se mobilise pour travailler à l'amélioration de l'indemnisation de ce phénomène complexe.

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