Mme Edwige Diaz interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les moyens matériels et humains ainsi que sur la territorialisation de la flotte aérienne à disposition des services de la sécurité civile. Les violents incendies qui touchent actuellement la Gironde démontrent des failles importantes dans le dispositif aérien français pour lutter contre les feux de forêts. En premier lieu, la diminution de la flotte d'avions, passée de 26 en 2006 (rapport d'information n° 452 (2005-2006) de M. Claude Haut, fait au nom de la commission des finances du Sénat, déposé le 5 juillet 2006) à 21, démontre l'insuffisance des moyens matériels à disposition face à la hausse prévisible des feux de forêts au cours des années à venir. Une insuffisance renforcée par le manque de pilotes, de mécaniciens, de pièces détachées pour assurer les dépannages et des lacunes importantes du prestataire, Sebena Technics, responsable de la maintenance des appareils. Autant de problèmes dénoncés récemment par le porte-parole du Syndicat national du personnel navigant de l'aéronautique civile. Cette accumulation de défaillances fait qu'un grand nombre d'appareils ne sont pas opérationnels cet été, saison pourtant la plus à risque en matière d'incendies et rend la France dépendante de la solidarité des partenaires européens. Qu'en sera-t-il si des feux de l'importance de ceux que l'on vit se déclarent concomitamment dans ces pays ? Comment pourra-t-on lutter s'ils doivent rapatrier en urgence leur flotte mise à disposition des services ? Une autre grave anomalie réside dans l'absence de moyens aériens pérennes à proximité du massif forestier des Landes de Gascogne alors même qu'il compte parmi les plus inflammables de France, comme l'a souligné un rapport de la mission interministérielle « Changement climatique et extension des zones sensibles aux feux de forêts » de juillet 2010. Alors que chaque minute est cruciale face à un incendie, cette absence provoque des retards considérables dans le déploiement des moyens aériens puisque ceux-ci sont stationnés dans le Gard, à plus de 500 kilomètres de la Gironde. Elle lui demande de préciser les efforts que compte mettre en œuvre son ministère pour renforcer le maillage territorial de la flotte aérienne, augmenter sa taille, améliorer son niveau de disponibilité et les moyens dédiés à sa maintenance.
Le groupement des moyens aériens (GMA) de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) met tout en œuvre pour prévenir et lutter contre l'augmentation des feux de forêts. Le GMA dédie 120 personnels à l'utilisation, à l'entretien et au fonctionnement des avions du groupement d'avions de la sécurité civile (GASC), en sus de l'externalisation des fonctions de maintenance. Les pilotes d'avions représentent un effectif de 95 personnels (46 pilotes Canadair, 33 pilotes Dash, 11 pilotes Beech, 5 pilotes bénéficient de repos compensateurs). La commande de 6 DASH en 2018 et l'arrêt de la flotte des Focker 27 et des Tracker ont respectivement permis la création de 20 emplois techniques en loi de finances et le recrutement de personnels navigants (commandants de bord, co-pilotes, personnels sécurité cabine). Néanmoins, le GMA doit composer avec des difficultés de recrutement liés à l'expertise très pointue et au risque quotidien des missions. Le GMA s'appuie sur ces personnels pour armer et maintenir la flotte de 23 avions, composée de Canadair (12), de Dash (8) et de Beech (3). L'avenir à long terme de la flotte des Canadair est à l'étude, avec une cible fixée à 16 appareils, comme l'a annoncé le Président de la République lors de la rencontre avce les acteurs des feux de forêts qu'il a réuni le 28 octobre 2022. Le 7 mai 2020, la DGSCGC a demandé le lancement d'un marché d'acquisition de 2 DHC-515 (nouveaux Canadair), cofinancés par le programme RescUE de la DG ECHO de la Commission européenne. Il prévoit également la possibilité de commander 2 avions supplémentaires sur fonds propres du ministère de l'Intérieur et des Outre-mer. Au terme d'un long processus entre les 6 pays candidats (France, Espagne, Italie, Croatie, Grèce, Portugal), la DG ECHO et la société Viking devenue De Havilland Canada (DHC), le lancement effectif de la chaîne de production a été officiellement annoncé le 31 mars 2022, sécurisant ainsi le programme avec 22 commandes. 90 % des coûts d'acquisition de 2 appareils par pays seront couverts par la DG ECHO, soit 12 appareils (2 pour la France) ; les 10 % supplémentaires seront à la charge de chaque pays acquéreur. La France ayant été le premier pays à avoir contracté une subvention GRANT avec la Commission européenne, elle est prioritaire dans le calendrier de livraison des appareils. Selon les prévisions, le premier avion français est attendu en 2026, le deuxième en 2027. L'estimation des coûts est particulièrement difficile à ce stade puisque l'on ne peut connaître à l'avance le prix final après négociation. L'ordre de grandeur se monte aujourd'hui à 55M€ TTC par avion, soit 110 M€ TTC au total avec les hausses économiques prévisibles pour les deux premiers appareils. La flotte des Dash, initialement composée de 2 avions en 1995, a connu une évolution majeure en janvier 2018 avec la notification d'un marché pour l'acquisition de 6 appareils neufs aux capacités multi-rôles améliorées. Le dernier appareil sera livré en 2023. Leur action, complémentaire à celle des Canadair, est dimensionnée pour parvenir à maîtriser et contenir les feux de cet été, notamment par le largage de retardant. L'implantation géographique de la flotte d'avions sur Nîmes est stratégique, notamment pour des raisons logistiques de maintenance. La souplesse de l'organisation opérationnelle actuelle permet de faire face aux besoins et d'organiser des détachements opérationnels sur des sites identifiés en fonction de l'analyse des risques et des besoins. Ainsi, lors de ces détachements, seules la maintenance quotidienne et les réparations simples sont réalisées sur place. Les opérations lourdes et complexes sont réalisées sur la base de Nîmes. La durée de ces détachements est variable en fonction des risques identifiés. Aujourd'hui, la DGSCGC arme durant l'été un détachement en Corse, mais est en capacité d'armer des détachements ponctuels sur tout le territoire et à l'étranger en tant que de besoin. En l'absence de risque sur la Corse, les 2 CL415 présents peuvent être réemployés sur le continent comme cela a été le cas à plusieurs reprises cet été. Le déploiement des moyens est opérationnellement facilité par le développement croissant de pélicandromes sur l'ensemble du territoire national. Ils sont dédiés aux ravitaillement des DASH et armés par des sapeurs-pompiers des SDIS locaux. De manière très complémentaire avec les avions, la DGSCGC emploie lors de la saison feux de forêt depuis 2020, 2 hélicoptères bombardiers d'eau, d'une capacité de largage de 4 tonnes, loués à une société privée. Par ailleurs, devant l'ampleur des feux de l'été 2022, elle a réquisitionné jusqu'à 8 hélicoptères supplémentaires qui sont intervenus sur l'ensemble du territoire. En outre, elle étudie la possibilité d'une acquisition, dans le cadre RescUE, de 2 hélicoptères (d'une capacité 4000 litres). Enfin, le renouvellement de la flotte d'hélicoptères inscrit dans le projet de LOPMI permettra de réinvestir le champ de mission de bombardier d'eau avec des appareils plus puissants que ceux actuellement détenus. Elle aura ainsi pour conséquence de disposer d'une capacité bombardier d'eau, à partir des bases hélicoptères qui sont réparties sur tout le territoire.
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