M. Thierry Benoit attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la surveillance numérique ciblée illégale. La surveillance numérique ciblée illégale représente un danger pour les droits humains. Depuis plusieurs années, des associations défendant les droits de l'homme alertant sur la crise liée à la surveillance numérique dont sont responsables certains acteurs étatiques et du secteur privé. Des révélations s'inscrivent dans un contexte d'utilisation croissante de technologies de surveillance ciblée pour museler et réprimer toute voix dissidente, dans la plus grande opacité et en toute impunité. La France pourrait jouer un rôle moteur dans le cadre des efforts multilatéraux entrepris, notamment au niveau du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, de l'Assemblée générale des Nations unies et lors des cycles de l'examen périodique universel, afin de travailler à des normes solides relatives aux droits humains pour régir la vente, le transfert et l'utilisation des technologies de surveillance. Aussi, il lui demande ce que le Gouvernement compte faire pour travailler à une régulation du secteur de la surveillance numérique ciblée.
Forte d'une diplomatie numérique active, la France soutient les principes d'ouverture, de collaboration et de liberté qui ont été aux origines de l'internet et ont créé de nouvelles possibilités de progrès, de développement culturel, de promotion des libertés, d'égal accès au savoir et à la culture, d'ouverture et de collaboration. Les priorités de la France dans la gouvernance de l'internet sont ainsi le renforcement de son caractère ouvert et diversifié, ainsi que de la confiance dans son utilisation. Face aux nouvelles menaces qui se développent dans le cyberespace, la France œuvre également au service de la sécurité et de la stabilité dans le cyberespace et promeut activement, dans un cadre européen et multilatéral, la défense d'un cyberespace libre, ouvert, inclusif, stable, sûr et non-fragmenté. Dans ce contexte, la prolifération internationale de logiciels de surveillance numérique, souvent non encadrée quant à leurs usages finaux et leur compatibilité avec les droits de l'Homme, constitue pour la France un sujet de préoccupation. C'est pourquoi la France encadre à titre national l'exportation de technologies liées à la cybersurveillance. Toute autorisation d'exportation, qu'elle relève des matériels de guerre ou des biens à double usage, est le fruit d'un processus interministériel visant notamment à s'assurer du respect des engagements internationaux et européens de la France, et notamment les droits de l'Homme, ainsi que le Traité sur le commerce des armes. Cela est également vrai pour ces matériels. Ce contrôle se fonde sur des listes agréées au sein de l'Arrangement de Wassenaar, un régime multilatéral de contrôle des exportations auquel la France participe, et qui intègre les biens de cybersurveillance. Cette liste de biens est reprise dans la règlementation européenne en matière de biens à double usage, que la France met en œuvre. Par ailleurs, le règlement (UE) 2021/821 renforce le contrôle de ces biens, en permettant la mise en œuvre de la clause dite « attrape-tout » lorsque des risques de non-respect des droits de l'Homme sont identifiés. Cette clause permet de soumettre à autorisation préalable l'exportation de biens ne figurant pas dans la liste des biens à double usage, ce qui entraîne également pour les exportateurs une obligation de vigilance. Ainsi, la France, au titre de ses engagements internationaux, et européens, évalue avec précision le risque que ce type de biens soit utilisé à des fins de répression interne ou dans le cadre de la commission de violations graves des droits de l'Homme ou du droit humanitaire, à travers une analyse interministérielle approfondie et vigilante. Au niveau international, la France a fait de la lutte contre la prolifération des logiciels malveillants et des pratiques informatiques destinées à nuire l'une des priorités de sa cyber-diplomatie. Celle-ci constitue ainsi l'un des 9 principes fondateurs de l'Appel de Paris pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace - initiative multi parties prenantes lancée par le Président de la République en 2018, qui rassemble plus de 1200 soutiens à travers le monde dont 80 États, plus de 700 entreprises et 350 organisations de la société civile. Cette thématique a donné lieu à la mise en place d'un groupe de travail en 2021-2022, visant à identifier les approches, mécanismes et outils possibles pour encadrer plus efficacement ce type de prolifération, en prenant en compte les avis des États, du secteur privé, et de la société civile. Par ailleurs, la France soutient l'initiative lancée à l'occasion du Sommet pour la Démocratie en décembre 2021, d'un Code de conduite par lequel les États s'engageraient politiquement à un meilleur usage de leurs outils de contrôle des exportations pour prévenir la prolifération des logiciels et autres technologies utilisés à des fins de violation grave des droits de l'Homme. Les discussions pour élaborer ce code de conduite sont encore en cours, et la France travaille avec les États-Unis et d'autres partenaires pour que ce texte soit ambitieux et rassemble un nombre significatif d'États. Il devrait être adopté lors du second Sommet pour la Démocratie, fin mars 2023. Enfin la préservation du droit à la vie privée est une priorité pour l'Union européenne et pour la France qui ont adapté leurs cadres juridiques, notamment avec le règlement général pour la protection des données, qui fait figure de référence à l'international. La France agit également à l'Assemblée générale des Nations unies et au Conseil des droits de l'Homme, avec ses partenaires. Elle y soutient les résolutions relatives au respect du droit à la vie privée, y compris dans le contexte des communications numériques et des technologies numériques nouvelles et émergentes. Elle a soutenu, en octobre 2022, le renouvellement du mandat du Rapporteur spécial sur le droit à la vie privée, dont les derniers rapports traitent notamment de l'intelligence artificielle et du droit à la vie privée, des applications de traçage de contact et des données de santé ainsi que des technologies de surveillance.
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