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Chantal Bouloux
Question N° 3548 au Ministère auprès de la première ministre


Question soumise le 29 novembre 2022

Mme Chantal Bouloux appelle l'attention de Mme la ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances, sur l'article 21 de la loi n° 2010-769 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. Cet article traite de la formation initiale et continue des professionnels sur cette thématique. Il liste une série de professionnels, tenus de recevoir « une formation sur les violences intrafamiliales, les violences faites aux femmes, sur les mécanismes d'emprise psychologique ainsi que sur les modalités de leurs signalements aux autorités administratives et judiciaires ». Les professionnels concernés sont les médecins, les personnels médicaux et paramédicaux, les travailleurs sociaux, les magistrats, les fonctionnaires et personnels de justice, les avocats, les personnels enseignants et d'éducation, les agents de l'état civil, les personnels d'animation sportive, culturelle et de loisirs, les personnels de la police nationale, des polices municipales et de la gendarmerie nationale, les personnels de préfecture chargés de la délivrance des titres de séjour, les personnels de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et les agents des services pénitentiaires. L'obligation de formation implique la prise en compte, dans les différents référentiels de formation de ces professionnels, des violences intrafamiliales, des violences faites aux femmes, des mécanismes d'emprise psychologique ainsi que des modalités de leurs signalements aux autorités administratives et judiciaires. Par ailleurs, la loi n'est pas explicite concernant les professionnels de la psychologie ne relevant pas directement de la médecine. Or ces professionnels sont impliqués dans les parcours de soin des victimes, notamment pour faire face aux mécanismes de l'emprise psychologique mentionnée dans la loi et aux psycho-traumatismes. Aussi, elle lui demande, d'une part, si l'obligation de formation reposant sur l'article 21 de la loi n° 2010-769 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes est effectivement transcrite dans l'ensemble des référentiels de formation des professions mentionnées dans la loi et, d'autre part, si les professionnels de la psychologie, en tant qu'intervenants du secteur médical, paramédical ou social, sont effectivement concernés par l'obligation de formation.

Réponse émise le 14 février 2023

L'élimination des violences faites aux femmes est le premier pilier de la grande cause nationale des quinquennats du Président de la République, et la formation des professionnels à la spécificité de ces violences en est un axe fort. La mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF) placée auprès du Ministère chargé de l'Egalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Egalité des chances s'est vue confier à sa création en 2013 l'élaboration d'un plan national de formation des professionnels sur les violences faites aux femmes. Ce plan national de formation repose sur 2 grands axes : Permettre aux professionnels d'acquérir une connaissance des violences faites aux femmes, de leur spécificité, des mécanismes et des conséquences ; Améliorer les pratiques professionnelles sur le repérage, la prise en charge et l'orientation des victimes. De nombreux outils pédagogiques ont été réalisés avec les ministères concernés, les instances professionnelles, ordinales, des professionnels de terrain, des experts, etc… Ils couvrent toutes les formes de violences (violences au sein du couple, violences sexuelles, conséquences des violences au sein du couple sur les enfants, les violences et le harcèlement sexuels dans les transports, les mutilations sexuelles féminines, les mariages forcés, les violences sexistes et sexuelles dans les relations professionnelles). Pour les professionnels de santé, la thématique « violences faites aux femmes » a été introduite dans les référentiels de formation d'aide-soignant et d'auxiliaire de puériculture lors de la réingénierie de ces diplômes réalisée en 2021. En ce qui concerne les autres formations paramédicales, les écoles et instituts de formation sont tenus d'adapter leur projet pédagogique aux besoins de santé publique. S'agissant des études de maïeutique, le référentiel de formation doit faire prochainement l'objet d'une refonte globale, afin notamment de former les futures sages-femmes au repérage et au suivi des situations de précarité, de dépression ou encore d'exposition aux violences des femmes les plus vulnérables. Enfin, concernant la formation continue, plusieurs formations sont déployées sur le périmètre des violences intrafamiliales et violences faites aux femmes.  D'une part dans le cadre de l'arrêté du 7 septembre 2022 définissant les orientations pluriannuelles prioritaires de développement professionnel continu pour les années 2023 à 2025des professionnels de santé D'autre part, dans le cadre de la note annuelle d'information aux Agences régionales de santé du 19 janvier 2022 relative aux orientations retenues pour 2022 en matière de développement des compétences des personnels des établissements de la fonction publique hospitalière, Pour les professionnels des forces de sécurité, les travaux résultant du Grenelle des violences conjugales ont permis en 2020 de consolider le dispositif de formation des forces de sécurité. Tous les opérateurs de la plateforme nationale de signalement des violences et d'accompagnement des victimes (PNAV) ont reçu une formation spécifique avec des intervenants spécialisés sur les violences conjugales. Au sein de la gendarmerie nationale, le dispositif de formation comprend trois niveaux : Le niveau élémentaire concerne la formation des élèves gendarmes et des élèves officiers intégrant l'accueil et la prise en compte d'une victime de violences intrafamiliales, la victimologie et les techniques de communication. Le niveau intermédiaire est relatif à la formation continue des gendarmes au sein des groupements et s'articule autour d'un enseignement à distance et d'une formation en présentiel incluant divers modules : l'accueil, la prise en charge d'une victime, l'intervention, le cycle de la violence, les mécanismes d'emprise et ses conséquences ainsi qu'un volet accompagnement et partenariat. Le niveau d'expertise des mécanismes de violences intrafamiliales (VIF) concerne les officiers de police judiciaire affectés en unité territoriale ou au sein des Maisons de Protection des Familles (MPF) volontaires et impliqués dans la lutte contre les VIF. Au sein de la police nationale, tous les corps de métiers (commissaires de police, officiers de police, gardiens de la paix et policiers adjoints) bénéficient de modules spécifiques sur les VIF en formation initiale. La formation continue s'est enrichie grâce aux outils élaborés dans le cadre du Grenelle et elle est régulièrement actualisée avec les évolutions législatives et les instructions afin d'améliorer les dispositifs de prise en charge des violences conjugales et intrafamiliales. Les formations digitales se sont développées et permettent de former un grand nombre d'agents, telle la formation « violences conjugales et évaluation du danger ». Pour les magistrats, depuis le Grenelle des violences conjugales, toutes les fonctions pénales et civiles ont intégré les différentes réformes dans leurs séquences, dans leurs fascicules et fiches techniques, tant en formation initiale qu'en préparation aux premières fonctions. Pendant la scolarité, la thématique est abordée dans des actions de formations transversales spécifiques (conférences, tables rondes, débats…) qui incluent les enjeux de la prise en charge, les impacts des violences, les dispositifs de protection, dispositifs judiciaires, dispositifs mis en place dans les juridictions pour améliorer le traitement de ce contentieux, et dans des actions de formation transversale générale qui abordent notamment la prise en charge médicolégale et le psychotrauma. En formation continue, l'accent est mis sur la spécificité des mécanismes des violences faites aux femmes et aux réflexes professionnels à acquérir pour y répondre (deux sessions distinctes de trois jours chacune). Par ailleurs, le traitement judiciaire des violences conjugales est un sujet de formation fortement relayé en région, dans le cadre de la formation continue déconcentrée (journées de sensibilisation pluridisciplinaires) et un sujet de formation à distance.  Pour les avocats, l'Ordre des avocats organise de manière pluriannuelle des formations sur les violences au sein du couple et les conséquences sur les enfants afin de permettre aux avocats de se former dans le cadre de leur formation continue. Le Barreau de Paris a mis en place une liste d'avocats spécialement formés pouvant être désignés au titre de l'aide juridictionnelle, permettant à une victime d'avoir un seul et même avocat pour l'ensemble des procédures en lien avec sa situation de victime de violences au sein du couple. Pour être inscrits sur cette liste, les avocats doivent avoir suivi 7 modules de formation et avoir validé un QCM. Pour être maintenus sur cette liste, les avocats doivent justifier de 6 heures de formation continue par an en la matière. Pour les professionnels du travail social, la problématique des violences faites aux femmes est intégrée dans les formations. Pour les agents des préfectures : Dans le cadre de la formation initiale et continue, le ministère de l'Intérieur et des Outre-mer met à disposition du personnel de préfecture chargé de la délivrance des titres de séjour, chaque année, des formations "prises de poste"et"perfectionnement" sur les thématiques relatives au droit au séjour des étrangers victimes de violences familiales. Pour les personnels de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), tous les officiers de protection qui instruisent les demandes d'asile bénéficient en formation initiale d'un module qui aborde les différentes formes de violences faites aux femmes et présente l'ensemble des outils d'aide à l'instruction et ressources disponibles en interne sur la thématique. Pour les professionnels du champ sportif : Une stratégie ministérielle de lutte contre les violences dans le sport a été impulsée à partir de février 2020 par le ministère des Sports à travers plusieurs outils de sensibilisation (vadémécum, guide, module de formation, RéglO'sport, …) à destination des éducateurs sportifs comme des personnels sportifs en clubs, CREPS (centre de ressources, d'expertise et de performance sportive) et fédérations mais également à destination des pratiquants. Les travaux relatifs aux évolutions réglementaires de l'habilitation des organismes de formation pour les diplômes délivrés par le ministère des sports, rendent obligatoire la formation des stagiaires et des formateurs sur le respect de la dignité et la préservation de l'intégrité physique et morale des pratiquants en toute circonstance. Près de 30 fédérations ont adopté depuis 2019 un plan formalisé de prévention et de lutte contre les violences sexuelles dans le sport, avec des actions de communication, de formation sur les violences faites aux femmes et aux enfants, et de traitement d'un signalement ; près de 14 établissements ont formalisé une stratégie éthique et éducative, et 4 régions ont formalisé un plan stratégique.

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