M. Alexis Corbière attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la réforme des lycées professionnels, qui risque d'impacter fortement et de manière négative la scolarité des 650 000 élèves concernés. Le 14 septembre 2022, le Président de la République annonce sa réforme du lycée professionnel et les changements que celle-ci va impliquer. Voyant les conséquences désastreuses qu'une telle réforme engendrerait, syndicats, lycéens et professeurs se sont mobilisés le 18 octobre 2022 : 23 % du corps enseignant des lycées professionnels était ainsi en grève. L'école devrait être un lieu d'apprentissage à visée émancipatrice, où les élèves se forgent un esprit critique et, dans le cas des lycées professionnels, découvrent différents métiers. Cette réforme signe purement et simplement la liquidation de l'enseignement professionnel initial à l'avantage de l'apprentissage. Avec cette réforme, le Gouvernement souhaite donc augmenter de 50 % le temps de stage pour, selon lui, permettre aux élèves de se former. Or passer de 22 à 33 semaines de stages, c'est réduire drastiquement le temps d'enseignement en classe pour les autres matières. Il est par ailleurs difficile aujourd'hui de trouver un stage en entreprise. Avec la multiplication des heures de stages, cela sera davantage compliqué ; le risque étant que les étudiants se retrouvent à faire des stages d'observation sans apprendre réellement un métier, d'où l'importance du maintien de l'enseignement général. Les enseignants seront aussi impactés par cette réforme puisqu'ils passeront moins d'heures à enseigner. De plus, la réforme prévoit la révision de certaines filières en fonction des besoins locaux des entreprises. C'est-à-dire qu'un élève n'apprendra pas forcément un métier qu'il souhaite faire mais plutôt un métier demandé dans le secteur où se trouve son lycée. Des professeurs de certaines filières risquent eux de perdre leur emploi. En Île-de-France, ce n'est pas moins de six lycées professionnels, notifiés par le rectorat, qui sont menacés de fermetures dès la rentrée 2023, à savoir le lycée Brassaï, Armand-Carrel, Valadon, Charles-De-Gaulle, le site de Charenton de Théophile-Gautier et enfin, le site Friant de Lucas-de-Nehou. Le rectorat justifie ces fermetures par des arguments sans lien avec l'amélioration de la formation des lycéens. Des élèves se retrouvent désabusés, dans l'angoisse de ne pas trouver d'établissements pour l'année suivante. Les cours ne seront pas non plus les mêmes selon le lycée professionnel puisque les heures de cours par discipline seront décidées au niveau local. Chaque lycée aura donc ses propres spécificités, ce qui est un danger pour la conservation d'un enseignement national commun. Tous ces changements vont entraîner une perte de valeur du diplôme, alors que la quasi-totalité des syndicats alertent sur les conséquences désastreuses que pourrait provoquer cette réforme. En plus de cela, des professeurs pointent du doigt leurs conditions de travail catastrophiques. Il souhaite savoir dans quelle mesure il prendra en compte la parole de tous ceux qui ont dénoncé la réforme du lycée professionnel afin que les élèves de ces mêmes lycées puissent poursuivre leur scolarité dans les meilleures conditions.
Le travail à mener pour la réforme des lycées professionnels a donné lieu au lancement le 21 octobre dernier par la ministre déléguée à l'enseignement et à la formation professionnels de 4 groupes de travail portant respectivement sur la question de la lutte contre le décrochage scolaire, la poursuite d'études des lycéens professionnels, une meilleure insertion professionnelle des lycéens professionnels et les marges de manœuvre dont peuvent disposer les lycées professionnels tout en conservant le caractère national des diplômes. Chacun de ces groupes a été piloté par un recteur avec l'appui d'un inspecteur général de l'éducation, du sport et de la recherche, et un très large public (élèves, enseignants, personnels de direction, personnels d'inspection, familles et monde économique) a été invité à y participer. Ces travaux ont duré trois mois, durant lesquels 160 participants se sont régulièrement réunis et ont pu mettre en commun leurs propositions respectives et constater ainsi les consensus et les divergences sur chacune des pistes. À l'issue des pistes qui ont été proposées le 27 janvier dernier, des concertations seront lancées avec les syndicats éducatifs pour déterminer les leviers de la mise en œuvre de la réforme. L'augmentation de la durée des PFMP ne se fera pas au détriment des enseignements au lycée. La réforme ne se fera pas en renonçant aux enseignements fondamentaux car le diagnostic est posé : Les élèves de voie professionnelle ont une maîtrise nettement plus faible des savoirs fondamentaux que les élèves de la voie générale et technologique. La priorité de la réforme que je souhaite mettre en œuvre sera donc de consolider les savoirs en français et en mathématiques, dès la classe de 2nde professionnelle. Il faudra en ce sens, repenser l'organisation temporelle des stages au sein de l'ensemble de la durée de scolarité, améliorer la qualité des stages et leur ciblage afin qu'ils correspondent bien au parcours pédagogique des élèves et à leurs projets professionnels. La réforme du lycée professionnelle vise à assurer une meilleure insertion dans l'emploi des lycéens professionnels, et de faire en sorte que la voie professionnelle réponde mieux aux besoins de l'économie et particulièrement à l'essor des métiers d'avenir. La carte des formations est fixée par les recteurs, en accord avec les régions. Nous sommes déterminés à accélérer la révision de cette carte des formations, parce que la situation actuelle est loin d'être optimale. Seulement environ 1 % de l'offre de formation évolue chaque année, bien loin de la réalité des évolutions des métiers. Pour y parvenir, nous allons nous appuyer sur le secrétariat général à l'investissement afin d'accélérer la transformation de l'offre de formation pour répondre aux enjeux de France 2030. L'appel à manifestation d'intérêt (AMI) « Compétences et métiers d'avenir » (CMA) offre une solution pertinente. Il permettra de cofinancer aussi bien la modernisation des plateaux techniques, la formation continue des personnels éducatifs, l'attractivité des filières qui recrutent auprès des jeunes et notamment des collégiens. La voie professionnelle doit devenir un tremplin vers de nombreux métiers porteurs d'avenir dans toutes les filières attractives qui participeront demain à la souveraineté économique et industrielle de la Nation. S'agissant de la réorganisation des lycées de l'académie de Paris, c'est un sujet totalement indépendant de la réforme de la voie professionnelle à venir. Ce sujet est lié à un travail engagé entre la Région et le rectorat à la suite du transfert à la Région par la Ville de Paris de plusieurs lycées municipaux le 1er janvier dernier. Les lycées relèvent, pour leur dimension immobilière, des régions. Mais s'agissant de ce qui relève de l'Etat, la capacité d'accueil en voie professionnelle à l'échelle de l'académie de Paris sera maintenue, sinon renforcée, et il n'y aura aucune fermeture de spécialité sur la ville de Paris. La décision de la région a conduit le rectorat à mettre en œuvre un transfert intégral des formations vers 14 autres lycées parisiens plus neufs ou adaptés aux besoins d'un enseignement moderne, afin de conforter le regain d'attractivité pour la voie professionnelle que l'académie de Paris a connu à la rentrée 2022 (+ 300 élèves).
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