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Sébastien Chenu
Question N° 3471 au Secrétariat d'état à l’écologie


Question soumise le 29 novembre 2022

M. Sébastien Chenu attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les attaques des frelons asiatiques sur les ruches qui se multiplient et inquiètent les apiculteurs de France, dont les Hauts-de-France. C'est un phénomène particulièrement inquiétant cette année : les nids de frelons asiatiques sont de plus en plus nombreux dans la région. L'insecte est maintenant bien installé dans le Nord et le Pas-de-Calais et prolifère de plus en plus. Le frelon asiatique, qu'on reconnaît à ses pattes jaunes, n'est normalement pas plus dangereux pour l'homme qu'une guêpe, mais, le dimanche 21 août 2022, deux cyclistes ont été hospitalisés en urgence absolue dans la Loire après avoir été piqués plus de 50 fois. Si ces attaques sur les humains restent rares, les frelons asiatiques s'en prennent aussi aux abeilles, au grand dam des apiculteurs. Un documentaire de France Info dénombre trois fois plus d'appels cette année. Les attaques devraient se calmer au fur et à mesure du mois de septembre, avec la mort des frelons ouvrières. Néanmoins, il est désormais trop tard pour lutter contre l'installation de l'insecte, présent en France depuis 2004 et dans la région depuis 2016-2017. Les entreprises spécialisées dans les destructions de nid attestent de la démultiplication des attaques. En moyenne, c'est trois appels par jours pour des frelons asiatiques et de moins en moins pour des frelons européens. En Seine-et-Marne, un rucher de deux frères apiculteurs à Lagny-sur-Marne a été attaqué par des frelons asiatiques. En trois semaines, au mois d'octobre 2022, ce sont 120 ruches qui ont perdu leurs abeilles. Les frelons ont tout mangé. Les deux apiculteurs ont lancé une cagnotte solidaire pour relancer leur activité. Une ruche pouvant contenir entre 30 000 à 40 000 hôtes, cela signifie que plus de 3 millions d'abeilles sont mortes en quelques semaines. Ils déplorent : « C'est plus de 10 ans de travail anéanti en moins d'un mois. Nous avons pensé abandonner. Une fois que les frelons sont à l'intérieur, ils mangent tout. Le miel, la cire ». Selon l'un des apiculteurs, les températures trop clémentes du mois d'octobre 2022 ont permis aux frelons de rester actifs bien plus tard dans la saison. Avec le lancement d'une cagnotte solidaire, ils espèrent récupérer les 30 000 euros nécessaires pour réimplanter 120 colonies d'abeilles mais aussi les moyens de piéger les frelons asiatiques. On a appris que, face à un nid de frelon, il faut appeler une entreprise spécialisée, la mairie de la commune ou les pompiers en cas de danger immédiat. Cependant, il souhaiterait connaître les actions du Gouvernement sur ce sujet pour pouvoir informer les élus.

Réponse émise le 17 janvier 2023

La lutte contre le frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax), espèce ayant connu une expansion rapide dès son introduction accidentelle en Aquitaine en 2004, est encadrée par un corpus législatif et réglementaire complet et détaillé ci-après. Le plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation qui a été lancé conjointement par les ministères de la transition écologique et de l'agriculture en novembre 2021 est de nature à soutenir une bonne application des moyens de lutte (action 4.4.4 du plan, disponible ici : https://agriculture.gouv.fr/plan-national-en-faveur-des-insectes-pollinisateurs-et-de-la-pollinisation-2021-2026-DP). Depuis fin avril 2021, une seule réglementation concourt à la lutte contre cette espèce : celle portant sur les espèces exotiques envahissantes (EEE) pilotée par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTECT). Celle portant sur les organismes de quarantaine, pilotée par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA), a exclu le frelon asiatique au regard de la nouvelle législation européenne dite "loi de santé animale » (Cf ci-après). Concernant la réglementation spécifique sur les EEE, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a complété le code de l'environnement pour intégrer des dispositions législatives permettant d'agir contre les EEE (articles L. 411-5 et suivants). Au regard de l'intérêt de préservation du patrimoine biologique, des milieux naturels et des usages associés, l'article L.411-6 de du code de l'environnement interdit sur le territoire national, l'introduction, la détention, le transport, le colportage, l'utilisation, l'échange, la vente ou l'achat de tout spécimen vivant d'EEE, dont la liste est fixée par l'arrêté interministériel du 14 février 2018. Le frelon asiatique est inscrit sur cette liste. Les opérations de lutte sont définies à l'article L.411-8 du code de l'environnement. Ainsi, dès constat de la présence dans le milieu d'une EEE, le préfet de département peut « procéder ou faire procéder (…) à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction de spécimens » d'EEE. Un arrêté préfectoral précise alors les conditions de réalisation de ces opérations. Les préfets peuvent notamment ordonner la destruction de nids sur des propriétés privées. Le financement des opérations de lutte contre le frelon n'est pas pris en charge par l'État, au regard du degré très large d'envahissement du territoire métropolitain par l'espèce. La destruction des nids reste à la charge des particuliers et ses coûts peuvent être, le cas échéant, pris en charge en tout ou partie par des financements locaux émanant de collectivités territoriales Parallèlement, la direction générale de l'alimentation du MASA accompagne financièrement l'Institut technique et scientifique de l'apiculture et de la pollinisation (ITSAP – Institut de l'Abeille) et le MNHN (Muséum national d'Histoire naturelle) pour leurs actions techniques et scientifiques relatives à l'identification et à la validation des outils de lutte contre le frelon asiatique. Les actions financées comportent deux volets : une méthode concernant le piégeage des fondatrices au printemps et le développement d'un protocole pour la destruction de nids par appâts empoisonnés. Le premier volet des travaux concernant le piégeage est arrivé à son terme et a montré que le nombre de nids du frelon asiatique décroît significativement lorsque la méthode est conduite durant plusieurs printemps successifs, avec un maillage spatial fin et régulier (plus de 200 pièges répartis de façon homogène sur environ 10 km2 autour d'un rucher à protéger). Un complément d'étude est envisagé sur 2023, afin d'approfondir les résultats. Le second volet vise à vérifier l'efficacité d'appâts empoisonnés et leurs impacts sur l'environnement. Dans le cas où la méthode se montrerait efficace, il reviendra à la filière et/ou à un industriel de réaliser les démarches d'obtention des autorisations « substances biocides », puis « produits ». Ce projet devrait également permettre de proposer une méthode alternative au fipronil (hautement toxique) utilisé sans autorisation pour lutter contre les frelons. Enfin, il est à noter que le frelon asiatique n'est pas réglementé par le ministère de la santé et des solidarités au titre des espèces nuisibles pour la santé humaine car il s'avère, au regard des données des centres anti-poisons, que l'espèce ne présente pas de danger supérieur par rapport d'autres hyménoptères (frelon européen, guêpes, etc). Si cette situation venait à changer du fait de l'extension de l'espèce, la question de sa réglementation serait à réexaminer.

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