M. Bertrand Bouyx interroge Mme la ministre de la culture sur la conciliation entre la protection du patrimoine et les enjeux face au dérèglement climatique. Le patrimoine culturel doit s'adapter, comme tous les secteurs, à l'évolution du climat. Tous les secteurs ont pour objectif la réduction de consommation énergétique à hauteur de 10 % à l'horizon 2024. L'inscription du patrimoine culturel dans la société s'est toujours faite sous l'angle du développement durable : conserver des bâtiments et des œuvres d'art, c'est les préserver et les transmettre à de nouvelles générations. Or aujourd'hui, la construction ou la rénovation d'un bien aux normes actuelles dans un secteur protégé, comme les sites patrimoniaux remarquables, peut paraître complexe. Préserver le patrimoine et adapter ou transformer celui-ci afin de respecter les normes environnementales pour faire face aux conséquences du dérèglement climatique semble relever de deux injonctions contradictoires. L'enjeu de la rénovation thermique dans ce secteur impose de trouver des solutions adaptées, avec discernement. Par ailleurs, la hausse du coût de l'énergie met en difficulté les collectivités et les propriétaires pour atteindre les objectifs fixés. Des intérêts importants se retrouvent donc opposés et si personne ne remet en cause l'importance de ces deux enjeux, il convient de trouver des solutions sur mesure pour ce secteur particulier. Il lui demande les pistes envisagées par le Gouvernement pour adapter les impératifs de la transition environnementale et climatique tout en assurant au mieux la préservation du patrimoine sur les sites patrimoniaux remarquables.
La conciliation des enjeux de la transition énergétique et de la protection du patrimoine est l'un des objectifs du ministère de la culture, inscrits dans la « Feuille de route pour la transition écologique de la culture ». Dans le contexte actuel de transformation des secteurs de l'énergie et afin de faire face à l'urgence climatique, les questions de performance énergique du bâti existant revêtent une grande importance. Ces problématiques doivent pouvoir s'articuler avec les objectifs de conservation du patrimoine architectural, urbain ou paysager, notamment dans les sites patrimoniaux remarquables, qui constituent une composante du cadre de vie des concitoyens. La loi « climat et résilience » du 22 août 2022 impose des objectifs d'amélioration de performance énergétique aux logements et prévoit également l'interdiction progressive de la mise en location des plus consommateurs en énergie parmi eux. Pour tenir ces objectifs, les logements anciens les moins performants feront l'objet de travaux de rénovation énergétique, qui pourront inclure des mesures ayant trait au remplacement des équipements de chauffage, à l'amélioration de l'isolation intérieure (isolation des planchers, toiture, remplacement des huisseries, etc.) ou à l'isolation extérieure. Les services de l'État assurent un contrôle sur la mise en œuvre de ces objectifs et de leur conciliation avec la préservation du patrimoine. C'est tout particulièrement vrai pour les travaux visant à isoler par l'extérieur un immeuble en abords de monuments historiques ou dans les sites patrimoniaux remarquables. Ils requièrent l'accord de l'architecte des bâtiments de France qui, conformément à l'article L. 632 2 du code du patrimoine, s'assure du respect de l'intérêt public attaché au patrimoine, à l'architecture, au paysage naturel ou urbain, à la qualité des constructions et à leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant. Il s'agit donc de veiller à ce que le recours à ce type d'isolation, avec ses conséquences sur l'aspect et l'état des façades, n'aboutisse pas à la dénaturation d'éléments d'architecture remarquables et, d'une manière plus générale, à une uniformisation et une dégradation de paysages urbains de qualité. La réalisation de travaux d'isolation thermique, spécialement ceux extérieurs, doit prendre en compte les particularités du bâti ancien. Étanchéifier des immeubles anciens peut risquer de dégrader la substance même du bâti – par concentration d'humidité, notamment – et entraîner des dommages irréversibles. L'utilisation raisonnée de techniques adaptées et de matériaux respectueux de l'équilibre constructif du bâti ancien offre, en revanche, des perspectives positives. Cette démarche qualitative favorise par exemple des matériaux bio-sourcés, issus de filières durables et innovantes. Les services patrimoniaux du ministère de la culture accompagnent les porteurs de projets sur ces questions en recommandant en particulier un diagnostic global dans les logements et immeubles anciens, plus représentatif des singularités de ces constructions. Les unités départementales de l'architecture et du patrimoine prodiguent des conseils, en amont du dépôt des demandes d'autorisation de travaux, et favorisent les solutions les plus adaptées à la conservation des qualités esthétiques des constructions. Les demandeurs peuvent aussi s'appuyer sur la documentation produite par le centre de ressources pour la réhabilitation du bâti ancien. Enfin, un groupe de travail interministériel « Rénovation énergétique et patrimoine » a été instauré avec le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires en juin 2022, dans le but de favoriser des solutions techniques respectueuses du bâti ancien et d'étudier notamment les modalités de chauffage. Le bon entretien et la mise aux normes d'habitabilité du bâti ancien concourent in fine à la préservation de ce patrimoine. Ils renforcent en outre l'attractivité des logements, l'une des clés de la revitalisation des centres anciens, sujet majeur qui fait l'objet des programmes interministériels « Action cœur de ville » et « Petites villes de demain ».
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