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Laure Lavalette
Question N° 3352 au Ministère de l’éducation nationale


Question soumise le 22 novembre 2022

Mme Laure Lavalette alerte M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur l'offensive vestimentaire et religieuse qui perturbe de nombreux établissements depuis le début de l'année scolaire 2022-2023. En 2020, le ministre Jean-Michel Blanquer affirmait au micro de RTL que les élèves devaient venir à l'école « d'une façon républicaine ». Cette formule floue a semé le doute quant au respect des règlements intérieurs et du minimum de courtoisie et de décence attendue dans les établissements scolaires du pays. Depuis le mois de septembre 2022, un nouvel épisode de turbulence secoue l'éducation nationale et un certain nombre d'établissements à travers le territoire. La recrudescence de tenues à connotation culturelle et religieuse constitue non seulement une atteinte à la laïcité mais aussi une provocation, parfaitement revendiquée sur les réseaux sociaux où ces pratiques sont fortement relayées. Les violences et menaces qui ont découlé de cette situation ne sont pas anodines et témoignent d'un climat malsain pour une part de la communauté éducative, des familles et des enfants. Il est fort regrettable que le ministre ait d'abord fait peu de cas des premières alertes, avant que la situation ne dégénère dans les Hauts-de-Seine ou en Tarn-et-Garonne. Dans la circulaire du 9 novembre 2022 à destination des directeurs d'écoles et des chefs d'établissements, le ministre esquisse des éléments de réponse tout à fait insuffisants : invitation au dialogue et appel au professionnalisme des agents. Le ministère ne dit rien quant à la qualification de tenues religieuses pourtant bien connue comme les abbayas ou les qamis. La situation est extrêmement grave, de nombreux professeurs témoignent de leur crainte de se rendre dans leur établissement pour y faire leur travail et se sentent abandonnés par une hiérarchie désemparée. La fuite vers le privé souvent dénoncée par le ministre à travers les médias n'est pas juste un sujet de ségrégation sociale mais aussi le désir de familles, y compris modestes, qui souhaitent sortir leur enfant de situations intenables et malsaine pour leur développement humain. Ce n'est d'ailleurs pas seulement une tentation des parents d'élèves mais également celle de plus en plus de professeurs qui souhaitent basculer dans le privé sous contrat. Mme la députée est attachée à la sauvegarde d'une école publique, gratuite, laïque, républicaine et à la hauteur des enjeux d'instruction des jeunes générations, et souhaite donc savoir si le Gouvernement compte prendre le sujet à bras le corps et y apporter la fermeté qui a beaucoup trop manqué jusqu'alors. Elle souhaite savoir si le ministre compte relancer par exemple le sujet d'une tenue scolaire au collège et de règles vestimentaires claires au lycées, excluant de fait de nouvelles provocations.

Réponse émise le 11 avril 2023

Depuis 2017, le respect de la laïcité, des valeurs et des principes de la République est une priorité du Gouvernement, rappelée dans la mesure 1 du plan national de prévention de la radicalisation (PNPR) « Renforcer le respect de la laïcité à l'école ». Le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse (MENJ) s'est engagé résolument dans cette action gouvernementale à travers 2 axes stratégiques : adapter le cadre réglementaire et législatif afin de lutter efficacement contre toutes les formes d'atteintes à la laïcité et aux valeurs républicaines ; améliorer la capacité opérationnelle de l'administration centrale et des services déconcentrés afin d'apporter une aide concrète aux équipes des écoles et des établissements et ainsi garantir une réponse ferme et unifiée à toutes ces atteintes. L'adoption d'un corpus législatif sans précédent donne à l'État et aux acteurs de terrain les moyens d'agir et de renforcer le respect du principe de la laïcité à l'école. La loi n° 2019-791 pour l'école de la confiance du 26 juillet 2019 renforce la protection de la liberté de conscience afin de faire de l'école un lieu serein où chaque enfant puisse former son esprit critique. Selon l'article L. 141-5-2 du code de l'éducation, les comportements constitutifs de pressions sur les croyances des élèves ou de tentatives d'endoctrinement de ceux-ci sont interdits dans les écoles publiques et les établissements publics locaux d'enseignement, à leurs abords immédiats et pendant toute activité liée à l'enseignement. La loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a créé plusieurs délits afin de renforcer la protection des professeurs et des agents publics qui concourent au service public de l'éducation nationale. Le délit de menaces, violences ou actes d'intimidation à l'encontre d'une personne participant à l'exécution d'une mission de service public aux fins d'obtention d'une dérogation aux règles régissant ce service (article 433-3-1 du code pénal) est passible de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende. Le délit d'entrave à la fonction d'enseignant dispose au 3ème alinéa de l'article 431-1 du code pénal que « Le fait d'entraver, d'une manière concertée et à l'aide de menaces, l'exercice de la fonction d'enseignant est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende ». Enfin, le délit de mise en danger de la vie d'un agent public par diffusion d'informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle (article 223-1-1 du code pénal) porte les peines à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 € d'amende lorsque les faits sont commis au préjudice d'une personne (…) chargée de mission de service public. Ainsi, le père d'une élève qui avait publié une vidéo en libre accès sur internet, intitulée « discrimination des musulmans à l'école-collège du haut Allier de Langeac, dans laquelle le principal du collège était clairement identifié et localisé comme étant le directeur dudit collège (tribunal judiciaire du Puy-en-Velay, 13 septembre 2022, n° 587/2022ST) a été condamné en première instance à un an de prison avec sursis et mise à l'épreuve ainsi qu'à 1 000 € de dommages-intérêts. Le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, le recteur de l'académie de Clermont-Ferrand, la directrice des services départementaux ainsi que le chef d'établissement se sont constitués partie civile.  Afin de soutenir tous les personnels confrontés à des atteintes à la laïcité, le MENJ a amélioré la réponse institutionnelle à travers un dispositif de signalement et de réponse systématique à toutes les atteintes à la laïcité. 30 équipes académiques valeurs de la République (EAVR) apportent un soutien aux personnels et répondent à toute atteinte au principe de laïcité signalée par les écoles et les établissements, interviennent dans les écoles et les établissements et conseillent les équipes de direction. Depuis la rentrée 2022, le MENJ a décidé de publier mensuellement (et non plus trimestriellement) les faits d'atteinte au principe de laïcité qui remontent des écoles et des établissements scolaires. Cette publication mensuelle améliore la transparence et le pilotage des réponses aux atteintes à la laïcité. Quant aux tenues vestimentaires, l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation prévoit que : "Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestement ostensiblement une appartenance religieuse est interdit (…)". Les tenues vestimentaires sont donc visées par la loi au même titre que les signes religieux. Comme l'a jugé le Conseil d'État, le législateur a ainsi entendu interdire non seulement les signes religieux par eux-mêmes (à l'exception des signes discrets) tels qu'un foulard islamique, le burkini, une kippa ou une grande croix, mais également ceux dont le caractère religieux se déduit du comportement de l'élève, à l'instar d'un bandana (CE, 5 décembre 2007, n° 295671, publié au recueil Lebon). Dans le cas où les tenues ne sont pas par nature des manifestations d'appartenance religieuse, l'instruction et le suivi des situations par les chefs d'établissements avec l'appui des équipes académiques doit permettre de qualifier les faits à partir du comportement de l'élève. Le 10 novembre 2022, le MENJ a diffusé un plan sur la laïcité dans les écoles et les établissements scolaires (circulaire aux recteurs et aux rectrices d'académies publiée au BOEN n° 42 - circulaire (NOR : MENG2232014C). Ce plan de soutien aux équipes académiques et aux chefs d'établissement, renforce le suivi et l'accompagnement méthodologiques, juridiques et humains des situations sensibles et se décline en 4 axes : sanctionner systématiquement et de façon graduée le comportement des élèves portant atteinte à la laïcité lorsqu'il persiste après une phase de dialogue. En cas d'atteinte au principe de laïcité, comme l'indique la circulaire du 18 mai 2004 d'application de la loi n° 2004-228, les chefs d'établissement doivent engager une phase de dialogue avec l'élève et ses représentants légaux lorsqu'il est mineur. Dans de nombreux cas, ce dialogue permet de dissiper toute tension ou incompréhension et ainsi de débloquer des situations. A l'issue de la phase de dialogue, si la situation n'est pas résolue, les chefs d'établissement engagent systématiquement une procédure disciplinaire. Des fiches pratiques permettent de conforter l'action des chefs d'établissement notamment dans la phase de dialogue ; renforcer la protection et le soutien aux personnels : en cas de menaces ou de mise en cause d'un personnel, l'institution apporte un soutien sans faille et immédiat aux personnels afin qu'ils puissent exercer leur métier dans un cadre protecteur. Des fiches pratiques rappellent les mesures à prendre, du signalement à la protection fonctionnelle et précisent les nouvelles protections instaurées par ladite loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République afin de garantir le respect de la laïcité. Des modèles de signalement ou de plaintes sont diffusés afin d'accélérer ces procédures ; appuyer les chefs d'établissement en cas d'atteinte à la laïcité. Le soutien aux chefs d'établissements est assuré par les EAVR, ainsi que le service juridique du rectorat. Les services ministériels, en particulier la direction des affaires juridiques et le service de défense et de sécurité, restent également mobilisables à tout moment ; renforcer la formation des personnels et en premier lieu celle des chefs d'établissement. Dès le début de l'année 2023, tous les chefs d'établissement et les adjoints au chef d'établissement bénéficieront d'une formation spécifique. Cette formation sera déployée dans chaque académie par les EAVR qui bénéficieront d'une formation nationale. Cette formation renforce le plan national de formation de tous les personnels du MENJ sur 4 ans qui a déjà bénéficié à 130 000 personnels et doit se poursuivre sur le même rythme. L'objectif est de former 300 000 personnes durant l'année scolaire 2022-2023 et de former tous les personnels, titulaires ou contractuels, au cours des trois prochaines années. Ce plan et ses 6 fiches pratiques fournissent donc un appui opérationnel aux chefs d'établissement dans le traitement des atteintes à la laïcité et complètent le vade-mecum « La laïcité à l'école » outil de référence pour toutes les situations d'atteinte au principe de laïcité.

1 commentaire :

Le 28/07/2023 à 15:08, Aristide a dit :

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" Comme l'a jugé le Conseil d'État, le législateur a ainsi entendu interdire non seulement les signes religieux par eux-mêmes (à l'exception des signes discrets) tels qu'un foulard islamique, le burkini, une kippa ou une grande croix,"

Pour les kippas, c'est clairement de l'antisémitisme.

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