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Frank Giletti
Question N° 2856 au Ministère des sports


Question soumise le 1er novembre 2022

M. Frank Giletti alerte Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques sur les problèmes rencontrés par certaines disciplines sportives en matière de sponsoring et de mécénat. Ces dernières années, les compétitions automobiles et sportives ont été confrontées à une nouvelle génération de sponsors : les plateformes de cryptomonnaies. Or, sur ce point, la France rencontre d'énormes lacunes. À l'heure actuelle, un nombre important d'évènements sportifs majeurs tels que la finale du Superbowl, la NBA, la Coupe du monde de football ou encore les courses de Formule 1 font appel à ces plateformes de cryptomonnaies. Pourtant, ce type de publicité est encore interdit en France. Dès lors, pour contourner cet obstacle, de nombreux évènements sportifs et clubs professionnels trouvent des subterfuges. Par exemple, le club du Paris Saint-Germain a annoncé que la plateforme d'échange de cryptomonnaies Crypto.com rejoignait la liste des partenaires du club, bien que cette entreprise ne soit pas titulaire de l'agrément nécessaire pour faire du sponsoring comme le prévoit l'article L. 222-16-2 du code de la consommation - modifié par l'article 47 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 - car un contrat de sponsoring régional a permis la diffusion de la publicité liée aux cryptomonnaies exclusivement en dehors des médias du territoire français. Seulement, la Fédération française du sport automobile a connu très récemment un revers dans ce domaine. Ainsi, lors du Grand Prix de France qui a eu lieu, au circuit Paul Ricard, au Castellet, dans la 6e circonscription du Var, entre le 22 et le 24 juillet 2022, de nombreux sponsors ont décidé de retirer toutes les mentions aux cryptos de leurs voitures et vêtements. En cause, le flou juridique sur la question. Même les écuries dont le sponsor bénéficiait du statut de PSAN (prestataire de service sur actifs numériques) ont préféré retirer leurs logos. Cela n'est pas sans conséquences puisque cette problématique, qui a touché huit équipes parmi les dix équipes de F1 engagées lors de ce Grand Prix de France, pose nombre de questions autour de l'attractivité générale de la France en matière de compétition automobile dans un contexte de forte concurrence mondiale. Sans sponsors, la rentabilité financière pour les écuries est plus compliquée à trouver. C'est en partie cette réglementation et ces contraintes réglementaires qui ont conduit Stefano Domenicali, président de la Formule 1, le 25 août 2022, à annoncer la non-reconduction du Grand Prix de France de Formule 1 en 2023. Il lui demande s'il n'est pas temps pour la France de mettre en place des dérogations en matière de sponsoring et de mécénat pour les événements sportifs d'envergure internationale ou, a minima, de trouver un accord avec l'AMF (Autorité des marchés financiers) dans la perspective d'entretenir l'attractivité de la France en matière de compétition internationale.

Réponse émise le 27 décembre 2022

Depuis 2018 et la signature d'un contrat de partenariat par l'écurie Williams avec Omnitude, société spécialisée dans la blockchain, puis celle, deux ans plus tard, entre l'écurie Red Bull avec une entreprise de cryptomonnaie, FuturoCoin, on observe une implication grandissante des cryptosponsors en Formule 1 où la majorité de la grille est désormais parrainée par des plateformes de monnaies numériques. En 2022, les entreprises de cryptomonnaie, de NFT ou encore de blockchain s'affichent sur les F1 pour des montants parfois records (Crypto.com avec Aston Martin, Fantom avec AlphaTauri, Floki et Socios.com avec Alfa Romeo, Velas avec Ferrari, etc.). Cette nouvelle tendance n'est néanmoins pas sans danger pour les écuries, comme l'a démontré la faillite de la société IQONIQ partenaires des écuries McLaren, Williams et Alfa Roméo. Les crypto-actifs, communément définis comme l'ensemble des actifs numériques reposant sur la technologie de la blockchain, se sont largement développés depuis plusieurs années, et désignent désormais une multitude d'actifs hétérogènes, dont le fonctionnement et les enjeux sont extrêmement divers. Au-delà des crypto-actifs issus des blockchains historiques, tels que le bitcoin et l'ether, une multitude de jetons (tokens), émis en général par l'intermédiaire d'applications plus ou moins décentralisées, contribuent au développement de l'écosystème. S'ils ne servent qu'assez marginalement de moyen de paiement, les crypto-actifs constituent une classe d'actifs pouvant offrir du rendement et de la diversification, au risque d'une forte volatilité. Ils sont également utilisés comme véhicules de transferts de fonds, notamment pour les transactions internationales. Pour autant, le marché des crypto-actifs, qui a connu plusieurs épisodes de contraction depuis mai 2021, et dont la taille de marché a été divisée par trois depuis novembre 2021, est confronté à des limites persistantes – frais élevés et lenteur des transactions, coût énergétique, sécurité défaillante – qui entravent son développement. Par ailleurs, l'écosystème présente des vulnérabilités, liées à sa forte concentration, à des risques de liquidité élevés, et à une forte exposition au risque de marché, faisant peser des risques sur la stabilité financière. Dans ce contexte, l'encadrement du secteur, tel qu'engagé via la loi Pacte au niveau national, le règlement Mica en cours de finalisation au niveau européen, et différentes réglementations prudentielles, s'avère indispensable pour offrir un cadre de développement du secteur et des technologies liées, permettant de protéger les investisseurs et la stabilité financière, et de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Le choix de la France d'encadrer plus sévèrement que certains autres pays la publicité autour des crypto-monnaies répond à ces objectifs et, dans le cadre des sports mécaniques, et de la Formule 1 en particulier, qui rejoint le cadre fixé par les dispositions de la Loi Evin en 1992 relatives à la publicité en faveur de l'alcool et des cigarettes qui contraint les écuries bénéficiant d'un contrat de partenariat avec un cigarettier (Marlboro, Rothmans, Benson&Hedges) à retirer toutes les références aux marques figurant sur les voitures lors du Grand Prix de France disputé sur le circuit de Magny-Cours.  Ce premier encadrement de la publicité pour le tabac a été ensuite étendu à l'Union européenne en 2005, imposant l'abandon progressif des contrats de partenariats entre cigarettiers et écuries de F1. Aussi, tant d'un point de vue éthique qu'économique, il n'apparait pas soutenable, à ce stade, dans un contexte ou l'AMF (Autorité des marchés financiers) entend durcir la règlementation autour des crypto-monnaie et de son écosystème, d'assouplir les conditions de publicité de ces produits, instables et volatiles. Néanmoins, les difficultés de l'écosystème sportif français et du sport professionnel, en particulier dans un contexte post-crise COVID-19 sont au cœur des préoccupations du ministère des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques. Ces difficultés rencontrées par les acteurs du sport (clubs professionnels, organisateurs de grands évènements sportifs, etc.) dans le renouvellement de certains contrats de partenariats et/ou à développer de nouvelles sources de financements en matière de sponsoring a pris corps dans la loi n° 2022-296 du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France, au sein de son article 58 qui prévoit notamment : « Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport concernant l'impact de la crise actuelle sur les dépenses de partenariat sportif des entreprises et les moyens de les encourager dans la perspective de l'accueil des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024 ». La remise de ce rapport au Parlement dans les prochaines semaines permettra aux parlementaires d'étudier les leviers d'action à la disposition des pouvoirs publics afin de dynamiser ces sources de revenus pour le sport français et d'envisager leur application, sans altérer ni revoir la règlementation sur des produits – les crypto-monnaies, dont les garanties sur le long terme ne permettraient pas aux acteurs économiques du sport français la pérennité et la soutenabilité souhaitées.

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