M. Fabrice Brun alerte M. le ministre de la santé et de la prévention sur les difficultés d'approvisionnement en médicaments pour les pharmacies et les hôpitaux du territoire français. La menace de pénurie de médicaments ne date pas d'hier. En 2019, Agnès Buzin, alors ministre de la santé, annonçait déjà un grand plan sur 3 ans pour améliorer l'accès aux médicaments pour l'ensemble de la population. Si la crise du covid a mis une nouvelle fois en lumière ce problème d'approvisionnement en médicaments, de nombreuses ruptures de stocks touchent encore aujourd'hui les dispensaires de médicaments que sont les hôpitaux et pharmacies, notamment en Ardèche et sur tout le territoire ; une situation devenue urgente aux yeux de nombreux praticiens de santé. Pour endiguer ce grave problème, plusieurs lois (2012 et 2016) ont été adoptées sans pour autant le solutionner. En ce sens, le décret n° 2021-349 du 30 mars 2021 « relatif au stock de sécurité destiné au marché national » a été publié pour contraindre les laboratoires à créer des stocks de minimum 2 mois pour les médicaments d'intérêt thérapeutiques majeurs (MITM) dont l'arrêt, même momentané, peut avoir un impact très négatif sur la santé de nombreux patients. Et pour cause, entre 2008 et 2018, ce sont près de vingt fois plus de pénuries qui ont été signalées, selon les données de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Ce phénomène s'accélère, particulièrement à cause de la crise du covid et plus récemment de l'augmentation du prix de l'énergie. Ce sont notamment certains vaccins, certains antibiotiques, les antiparkinsoniens et certains anticancéreux qui sont les plus touchés par des tensions ou des ruptures. Entre autres, les témoignages sur le terrain décrivent que ces pénuries sont fréquentes et que les médicaments ne sont généralement pas livrés dans les temps dans les hôpitaux ou les pharmacies. Ces ruptures obligent les préparateurs de commandes et les pharmaciens à s'organiser différemment et, surtout, à agir à flux tendu. Cette situation subie par les hôpitaux et les pharmacies en France et en Ardèche pose non seulement une problématique de santé publique du fait de l'impossibilité de fournir des médicaments, mais également des situations de sous-dosages de médicaments par souci d'économie. Ce phénomène, d'autant plus problématique pour les dispensaires et les patients, semble s'accélérer et s'aggraver au fil des mois, poussant les professionnels de santé à tirer la sonnette d'alarme. Pour toutes ces raisons, il lui demande quelles mesures le Gouvernement compte mettre en œuvre pour lutter durablement contre les tensions d'approvisionnement et ces pénuries de médicaments sur l'ensemble du territoire.
La précédente feuille de route 2019-2022 a marqué des avancées importantes dans la gestion des pénuries et des tensions d'approvisionnement de produits de santé, notamment en terme de nouvelles obligations imposées aux industriels (obligation de détention de stocks minimums), mais il nous faut désormais aller plus loin et poser les jalons d'une nouvelle stratégie en matière de prévention et de gestion des pénuries. Lors du comité de pilotage de la feuille de route de lutte contre les pénuries de produits de santé qui s'est déroulé en présence des ministres de la santé et de la prévention et de l'industrie le 2 février 2023, il a été acté le lancement d'une phase de co-construction avec l'ensemble des parties prenantes. Les travaux menés au second trimestre 2023 ont permis d'établir un certain nombre d'actions concrètes qui seront présentées dans une nouvelle feuille de route pluriannuelle. Parmi ces premières actions concrètes, nous pouvons évoquer dans un premier temps, la mise en place d'une première liste de médicaments essentiels, publiée le 13 juin 2023 qui a vocation à renforcer la surveillance en matière d'approvisionnements de médicaments via l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) ainsi que le « Plan de sécurisation de la couverture des besoins en produits de santé au cours des pathologies hivernales » porté par l'ANSM et déployé depuis octobre 2023. Dans un second temps, dans le cadre du projet de loi de financement pour la sécurité sociale pour 2024, trois mesures ont été proposées pour améliorer l'accès de nos concitoyens aux médicaments en cas de pénuries. Une première mesure, prévue à l'article 77 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, est destinée à prévenir les ruptures d'approvisionnement suite à l'arrêt de commercialisation de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur matures. Afin de faciliter la reprise de droits de production, le gouvernement propose de responsabiliser les entreprises détentrices ou exploitantes d'autorisation de mise sur le marché arrêtant la commercialisation de médicaments matures en les obligeant à mettre tous les moyens en œuvre pour trouver un repreneur. Cette mesure prévoit également la publication de la liste des médicaments thérapeutiques majeurs et renforce la capacité de régulation de cette liste par l'ANSM. Une seconde mesure, prévue à l'article 72, comporte deux volets : l'un portant sur la limitation de la vente directe entre les laboratoires pharmaceutiques et les officines et l'autre sur le renforcement des leviers d'épargne en cas de rupture d'approvisionnement (dispensation à l'unité obligatoire, obligation d'ordonnance conditionnelle au test rapide d'orientation diagnostique, limitation ou interdiction de télé-prescription). Ces mesures ont notamment vocation à faciliter la juste répartition des stocks sur le territoire et à amplifier les actions de bon usage du médicament en période de tensions en s'assurant que le médicament est prescrit à bon escient. Par ailleurs, une troisième mesure, prévue à l'article 71, permet d'élargir les dispositifs de productions alternatives aux spécialités pharmaceutiques (préparations spéciales). Ces préparations spéciales feront l'objet d'une coordination par l'établissement pharmaceutique de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris qui assurera l'approvisionnement en matières premières et la qualité de ces préparations. Très récemment, afin de fluidifier la chaîne de distribution de médicaments, une charte d'engagement collective et solidaire des acteurs de la chaîne pharmaceutique a été signée le 22 novembre 2023 entre l'ANSM et les différentes parties prenantes (pharmaciens, industriels, grossistes-répartiteurs, autorités). Enfin, comme les motifs des tensions ou des pénuries sont multifactoriels, il convient d'adopter une réponse globalisée à cette problématique. Ainsi, afin de palier à certaines fragilités industrielles observées pour certains médicaments (situations de monopoles sur un ou plusieurs maillons de la chaîne d'approvisionnement), le Gouvernement travaille à des projets de relocalisation de certains principes actifs ou chaînes de production sur des médicaments essentiels. Cette ambition de relocalisation fait d'ailleurs l'objet de nombreux échanges au niveau européen pour coordonner les actions entre les différents Etats membres.
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