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Éric Pauget
Question N° 2747 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 1er novembre 2022

M. Éric Pauget interroge M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le nombre de personnes situés en France qui font ou ont fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français n'ayant pas été exécutée. En moyenne, la France prononce 274 obligations de quitter le territoire français (OQTF) par jour à l'encontre de personnes étrangères ou de clandestins. C'est quasiment une mesure qui est prononcée toute les 5 minutes. Au cours de la dernière décennie, ce sont pas moins de 902 954 OQTF qui ont été prononcées, mais seulement 5,6 % d'entre elles, ont, d'après les chiffres du ministère de l'intérieur pour le premier semestre 2021, effectivement l'objet d'un retour. Sauf à considérer le retour en France d'une partie de ces personnes éloignées - et d'ailleurs, combien sont-elles ? -, il y aurait toujours au moins 779 291 personnes ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français qui seraient présent sur le territoire national. Au vu de ces estimations alarmantes et en l'absence de récente communication de données consolidées sur les OQTF et, par souci de transparence, il souhaiterait savoir combien de personnes, ayant fait l'objet ou faisant l'objet d'une OQFT, n'ont pas fait l'objet d'un retour dans leur pays au cours des dix dernières années et donc sont supposées être sur le territoire national.

Réponse émise le 2 mai 2023

Le service statistique du ministère de l'Intérieur et des Outre-Mer, compétent en matière de statistique publique relative aux étrangers en France, publie régulièrement des données relatives aux mesures d'éloignement exécutées. Ce suivi s'effectue uniquement à l'échelle nationale, seul échelon pertinent pour apprécier la mise en œuvre de démarches administratives qui peuvent amener de fréquents changements de départements, notamment en cas de placement en rétention administrative. Le rapprochement de ces données avec le nombre de mesures d'éloignement prononcées pose en outre d'importantes difficultés méthodologiques, qui ne permettent pas valablement de calculer un taux d'exécution, sauf à procéder à plusieurs corrections et mises en cohérence. D'une part, les mesures exécutées recensées ne comprennent que celles qui reposent sur une action des services du ministère, qu'il s'agisse d'une mesure d'éloignement forcé exécutée avec l'appui des forces de sécurité intérieure, d'un éloignement aidé par les agents de l'OFII ou de l'enregistrement d'une sortie de l'espace Schengen à la frontière. L'appréhension exhaustive des obligations exécutées n'est pas possible en raison des sorties du territoire national qui se font par le franchissement de frontières terrestres. Dans ce cas, l'obligation de quitter le territoire est bien accomplie, mais l'administration n'en a pas connaissance, et l'éloignement ne peut dès lors être comptabilisé. D'autre part, toutes les mesures d'éloignement prononcées par les préfets ne sont pas immédiatement ni nécessairement exécutoires. Un certain nombre d'entre elles peuvent donc légitimement ne pas être exécutées. Ces situations correspondent : à des mesures qui sont prononcées, mais ne sont pas notifiées, par exemple parce que l'étranger en situation irrégulière n'est plus localisé ; à des mesures qui sont abrogées par l'administration, du fait d'un recours non contentieux, ou compte tenu du changement de situation de l'étranger (par exemple, la naissance d'un enfant français) ; à l'annulation de la décision par le juge après un recours contentieux. Enfin, une même personne peut faire l'objet de plusieurs mesures d'éloignement, par exemple si elle est interpellée à plusieurs reprises au cours de la même année ou si le réexamen de sa situation administrative conduit à prendre une mesure sur un nouveau fondement. Pour autant, il n'y a bien, dans ce cas de figure, qu'une seule personne concernée par ces mesures, et ne pourra être comptabilisé in fine qu'un seul éloignement. Ces précautions étant prises, il convient de noter que le nombre total de mesures d'éloignement prononcées en 2022 est de 153 042. Le total des éloignements enregistrés s'élève quant à lui à 15 396, soit une hausse de 15% par rapport à 2021. Le rapprochement de ces deux indicateurs pose d'importantes difficultés méthodologiques, l'efficacité des politiques d'éloignement s'évaluant davantage à l'aune du nombre total de personnes éloignées de manière forcée ou aidée par l'administration chaque année. A ce titre, la France est le pays de l'Union européenne qui exécute le plus grand nombre de mesures d'éloignement : 11 630 éloignements enregistrés en France en 2021, contre 10 785 en Allemagne, 3 230 en Espagne et 975 en Italie (1). La concentration des moyens sur l'éloignement des étrangers troublant l'ordre public produit par ailleurs des effets très nets, avec 3 615 étrangers délinquants éloignés en 2022 contre 1 834 en 2021 (source : DGEF-DIMM). Ces résultats confortent la stratégie adoptée depuis l'été 2022 pour prioriser le placement en centre de rétention des publics troublant l'ordre public, qui représentent plus de 80 % des étrangers actuellement en rétention et 91 % des éloignements forcés réalisés à l'issue d'une rétention en CRA.


2021

2022

2022/2021

Mesures d'éloignement prononcées :

143 226

153 042

+6,9%

dont OQTF avec délai de départ volontaire

54 651

53 348

-2,4%

Éloignements enregistrés :

13 403

15 396

+14,9%

dont retours forcés

10 091

11 410

+13,1%

dont retours aidés

1 570

2 098

+33,6%

dont retours spontanés

1 742

1 888

+8,4%
(1) Ces chiffres sont ceux rassemblés par la Commission Européenne – DG Eurostat, sur un champ qui diffère de celui de la France, pour des raisons d'harmonisation européenne des rapportages. Ainsi, par rapport aux 11 630 publiés par la DG Eurostat, les 13 403 publiés par la France intègrent en plus les éloignements des ressortissants de l'Union Européenne, ainsi que les retours « Dublin ».

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