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Nicolas Forissier
Question N° 2680 au Ministère auprès du ministre de l’économie


Question soumise le 1er novembre 2022

M. Nicolas Forissier attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la nécessité de renforcer la lutte contre la contrebande de tabac en France. En effet, portant préjudice à la politique de lutte contre le tabagisme, le marché parallèle du tabac génère une perte de recettes fiscales comprise, selon les estimations, entre 2 et 6 milliards d'euros, d'après le rapport d'information relatif à l'évolution de la consommation de tabac et du rendement de la fiscalité applicable aux produits du tabac pendant le confinement et aux enseignements pouvant en être tirés déposé par M. Éric Woerth et Mme Zivka Park le 29 septembre 2021. Si la consommation de tabac constitue la principale cause de cancer évitable (27 % de l'ensemble des cancers sont imputables à l'usage du tabac), le marché parallèle limite les effets de la hausse des prix du tabac et porte préjudice aux politiques de santé publique, en favorisant l'émergence de stratégies de contournement. Ce marché parallèle fragilise également le réseau des buralistes de France, qui connaît depuis plusieurs années une diminution progressive du nombre de débits. Avec l'annonce du Gouvernement d'augmenter le prix du tabac à partir du 1er janvier 2023, nombre de buralistes s'inquiètent et demandent des réponses fortes de la part de l'État pour lutter contre la contrebande de plus en plus forte, qui s'accentue notamment avec l'augmentation de l'écart des prix entre pays voisins au sein de l'Union européenne. Le marché parallèle représente bien une concurrence déloyale pour le réseau des buralistes. Dans le rapport précité, il est constaté que le réseau des buralistes est confronté depuis le début des années 2000 à une érosion significative se traduisant par une diminution du nombre de débits implantés sur le territoire. Résultant d'une part de la désertification de certaines zones rurales, mais également de la baisse des volumes de tabac vendus au sein du réseau. Si les hausses de prix du tabac des années 2003 et 2004 coïncident avec une accélération de la diminution du nombre de débits implantés sur le territoire expliquée par une baisse du nombre de fumeurs, elles ont également entraîné une progression du marché parallèle, dont le préjudice pour le réseau des buralistes ne peut être ignoré. Sur les 1 745 fermetures de débits comptabilisées par la Confédération des buralistes depuis 2010, 28 % ont eu lieu dans le Nord-Pas-de-Calais. C'est pourquoi il lui demande quels moyens supplémentaires seront mis en place pour lutter contre la contrebande de tabac, afin de lutter contre la concurrence déloyale que les buralistes français subissent et de renforcer l'impact des politiques publiques menées en matière de santé.

Réponse émise le 17 janvier 2023

Le Gouvernement a fait de la lutte contre le trafic illégal de produits du tabac une priorité de la douane. Ces trafics nuisent à la politique de santé publique de réduction du tabagisme, portent atteinte aux finances publiques, fragilisent le réseau des débitants de tabac et créent des menaces à la sécurité et à l'ordre publics. Ces trafics sont importants, et les saisies douanières de tabacs de fraude ont progressé ces dernières années, y compris en 2022. Pour lutter contre ce phénomène, le ministère chargé des comptes publics avait présenté le 19 octobre 2020 un plan d'action national pour lutter contre les trafics illicites de tabacs, pour une période de deux ans. Ce plan arrivant à échéance, un nouveau plan d'action a été décidé par le ministre des comptes publics et présenté au public le 5 décembre 2022. L'objectif de ce plan est de mettre un coup d'arrêt à la propagation des trafics, en mettant en œuvre un ensemble de mesures adaptées. Articulé autour de quatre engagements qui structureront l'action douanière contre ce fléau jusqu'à la fin d'année 2025, ce plan portera sur de nouvelles mesures importantes, qui correspondent à autant de nouveaux moyens déployés par la douane. D'abord, de nouveaux moyens de détection seront déployés sur les routes et sur les plateformes logistiques, notamment des scanners mobiles. Ils seront complétés par l'expérimentation et le développement de dispositifs de détection et d'analyse innovants. Ensuite, des groupes de lutte anti-trafics de tabac (GLATT) seront créés dans les bassins de fraude prioritaires, et permettront de faire travailler de façon plus efficace l'ensemble des services douaniers intéressés, en coopération avec des services partenaires. Parallèlement, un réseau déconcentré de lutte contre la fraude sur internet, dit « Cybertabac », sera déployé dans le cadre d'une stratégie nationale. Son objectif principal sera d'identifier les trafiquants locaux qui vendent du tabac sur internet. Dans le domaine scientifique, les modalités d'analyse des produits du tabac saisis, mises en œuvre par le Service commun de laboratoires (SCL), seront développées. La douane va investir pour développer une capacité de « profilage », c'est-à-dire d'analyse approfondie des tabacs saisis, pour mieux identifier les filières et les schémas de fraude. Par ailleurs, la douane va travailler, en coopération avec Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA), au développement d'une capacité publique souveraine d'estimation et d'analyse du marché parallèle des produits du tabac. Celle-ci devra permettre de mieux comprendre, de façon indépendante, les ressorts criminologiques et socio-économiques du marché parallèle de tabacs. Cette démarche sera complétée par une analyse toxicologique complète des produits du tabac de fraude, afin de pouvoir mieux cerner les enjeux de santé publique issus de ces trafics. Cette meilleure maîtrise permettra une communication publique argumentée en la matière, et améliorera le niveau de connaissance douanière des marchandises de fraude. Ensuite, une déclinaison particulière du plan d'action sera adoptée par la direction nationale garde-côtes des douanes (DNGCD), pour renouveler sa pleine implication dans la lutte contre les trafics illicites de tabacs. En effet, plusieurs types de contrôle (notamment des plaisanciers ou du bâtiment de certains navires commerciaux) et plusieurs techniques de contrebande relèvent directement du périmètre de la mission des garde-côtes. Au-delà de ces actions, le renforcement des sanctions encourues pour la production et l'offre illicite de tabacs a été annoncé, ainsi que l'allongement des durées de fermeture administrative des commerces qui, sans avoir la qualité de débitants de tabac, vendent illicitement du tabac. Le Ministre des Comptes publics est pleinement mobilisé pour faire reculer ces trafics.

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