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Julien Odoul
Question N° 2322 au Ministère de l’économie


Question soumise le 18 octobre 2022

M. Julien Odoul alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la hausse fulgurante de refus de prêts pour de nombreux Français en raison du mode de calcul de taux d'usure (près de 45 % de demandes de crédit sont refusées pour ce motif). Pour rappel, le taux de l'usure correspond au taux maximum légal que les établissements de crédit sont autorisés à pratiquer lorsqu'ils accordent un prêt. Il est fixé à la fin de chaque trimestre pour le trimestre suivant par la Banque de France. Or ce décalage temporel d'un trimestre est problématique, à l'heure où l'inflation au 30 juin 2022 était de 5,8 % sur le territoire et où les taux moyens sont à 5 % en Europe ; on ne peut exiger des banques de prêter à contre-marge, ni aux acquéreurs de renoncer à leurs projets lorsqu'ils respectent les normes fixées par le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF). À ce jour, avec un taux moyen sur 25 ans supérieur à 2,50, % pour les profils dits « intermédiaires », il est impossible pour des milliers d'emprunteurs d'acheter un bien immobilier et de devenir propriétaires et ce malgré le respect des normes en matière d'apport et d'endettement. Ce blocage est d'autant plus problématique qu'il touche en priorité les classes moyennes qui bénéficient de taux moins avantageux que les classes aisées. Dans ce contexte de forte inflation, des milliers de Français se voient refuser l'accession à la propriété et le vivent comme une injustice profonde ainsi qu'un déclassement. Pour toutes ces raisons, M. le député souhaite que M. le ministre puisse réduire cet écart en ajustant le taux d'usure à la réalité du marché et en réduire la temporalité ; les taux immobiliers augmentant nettement plus vite que le taux d'usure. Il lui demande sa position sur ce sujet.

Réponse émise le 29 novembre 2022

Les modalités de calcul du taux d'usure sont définies par l'article L.314-6 du code de la consommation, qui dispose que « constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des opérations de même nature comportant des risques analogues […] ». Conformément aux articles D.314-15 et D.314-16 du code précité, les taux effectifs moyens sont calculés trimestriellement par la Banque de France « selon une moyenne arithmétique simple des taux effectifs globaux observés », via des collectes auprès des établissements prêteurs. Le taux d'usure vise à protéger les emprunteurs, notamment les plus fragiles, d'une charge de la dette excessive. La formule de calcul du taux d'usure permet de contenir les taux d'intérêt dans une fourchette réduite, qui bénéficie ainsi à la majorité des emprunteurs. Toutefois, la remontée rapide des taux, que nous connaissons depuis quelques semaines, a pu conduire le niveau actuel du taux d'usure à devenir trop contraignant et à gripper l'accès au crédit des particuliers. Le gouvernement a donc organisé un cycle de travail avec l'ensemble des parties concernées (Banque de France, Trésor, banques, associations de consommateurs…) afin de faire un état des lieux exhaustif des impacts du taux d'usure actuel et d'examiner les mesures de correction possibles. Un nouveau mode de collecte des taux pratiqués par les banques a ainsi été mis en œuvre pour avoir la vue la plus fine et la plus récente des taux moyens. Aussi, au 1er octobre, les différents taux d'usure ont connu une hausse significative permettant d'amplifier l'accès au crédit des particuliers. Ainsi, le taux d'usure des crédits immobiliers à 20 ans augmentera de près de 0,5%, en passant de 2,57% à 3,05%. Dans ces conditions de remontée du taux d'usure, le Gouverneur de la Banque de France n'a pas souhaité proposer de déroger à la formule de calcul du taux d'usure. En effet, l'article L. 314-8 du code de la consommation ne permet au Gouverneur de la Banque de France de proposer de déroger à la formule de calcul du taux d'usure qu'en cas de circonstances exceptionnelles. Le gouvernement restera particulièrement vigilant à l'évolution de l'accès au crédit des particuliers, afin de s'assurer que le taux d'usure permette de protéger contre une charge de la dette excessive, et non de restreindre l'accès au crédit.

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