M. Vincent Thiébaut alerte M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur la problématique des occupations illicites de terrains privés par des personnes issues de la communauté des gens du voyage. Aujourd'hui, les collectivités territoriales peuvent s'appuyer sur deux procédures visant à obtenir la fin de l'occupation illicite d'un terrain privé par des individus issus de la communauté des gens du voyage. Il s'agit de la procédure administrative et de la procédure judiciaire. Pour la procédure administrative, en cas d'occupation illicite d'un terrain privé par des individus issus de la communauté des gens du voyage, le maire de la commune concernée ou le président de l'EPCI peut saisir le préfet via une procédure administrative d'évacuation forcée par arrêté préfectoral. Cette dernière, est ouverte lorsque la commune respecte les obligations du schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage et lorsqu'il existe un trouble avéré à l'ordre public. Le préfet examine alors la situation du requérant vis-à-vis de ses obligations et de l'existence d'un trouble à l'ordre public. Si ces conditions sont réunies le préfet peut prendre une mise en demeure de quitter le site illégalement occupé. Un délai de 24h est nécessairement accordé aux propriétaires des logements mobiles pour quitter le terrain. Cette décision peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir (recours suspensif). Le tribunal administratif dispose alors de 48h pour statuer. Si la juridiction confirme la décision du préfet alors le concours de la force publique peut être ordonné. La procédure judiciaire permet d'obtenir l'évacuation forcée des logements mobiles lorsque les conditions de la procédure administrative ne sont pas réunies (notamment la présence d'un trouble à l'ordre public). Le propriétaire du terrain ou le maire de la commune s'il existe un trouble à l'ordre public fait constater par huissier l'installation illicite et les troubles. Dès lors, le requérant peut saisir en référé le président du tribunal judiciaire compétent afin d'obtenir une ordonnance d'évacuation. L'huissier peut alors procéder à la notification de la décision et solliciter le concours de la force publique auprès du préfet. Si ces deux procédures visent à répondre efficacement à des occupations illicites de terrains privés par des gens du voyage, il existe néanmoins des difficultés dans leur applicabilité. Tout d'abord, il apparaît que la procédure administrative d'évacuation forcée par arrêté préfectoral n'est pas suffisamment connue par les services de l'État. Cette dernière permet pourtant d'obtenir rapidement une première décision du préfet. Il semble donc pertinent de rappeler aux préfets l'importance de cette procédure. De plus, il est également possible de s'intéresser au caractère suspensif du recours pour excès de pouvoir ouvert contre l'arrêté préfectoral. En effet, avec la suppression du caractère suspensif du recours il serait possible de réduire de 48h le délai visant à obtenir l'évacuation forcée des logements mobiles. M. le député aimerait savoir, d'une part, s'il est possible par circulaire du ministre de rappeler aux services de l'État l'ensemble des procédures existantes afin de répondre aux occupations illicites de terrains privés par des individus issus de la communauté des gens du voyage. D'autre part, il souhaite l'interroger sur la possibilité de mettre fin au caractère suspensif du recours ouvert contre l'arrêté du préfet.
Le régime applicable en matière de stationnement des gens du voyage est prévu par la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 modifiée relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage. Il établit un équilibre entre, d'une part, la liberté d'aller et venir et l'aspiration des gens du voyage à pouvoir stationner dans des conditions décentes, et d'autre part, le souci des élus locaux et des citoyens d'éviter des installations illicites susceptibles de porter atteinte au droit de propriété et d'occasionner des troubles à l'ordre public. Les schémas départementaux d'accueil des gens du voyage formalisent l'obligation pour les communes de plus de 5 000 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de créer, d'aménager et d'entretenir des aires d'accueil réservées aux gens du voyage. Lorsque la commune ou l'EPCI se sont dotés d'aires et terrains conformes à ce schéma, le maire ou le président de cet EPCI peuvent interdire le stationnement des gens du voyage en dehors des aires aménagées et, en cas de violation de cette interdiction, peuvent demander au préfet de département de mettre en demeure les gens du voyage de quitter les lieux. Lorsque cette mise en demeure n'a pas été suivie d'effets, l'évacuation forcée des résidences mobiles peut alors intervenir dans un délai de 24 heures sous réserve de l'absence de recours devant le juge administratif. La mise en demeure reste par ailleurs applicable pendant un délai de sept jours et peut donc servir de fondement juridique à une nouvelle mesure d'évacuation forcée lorsque la résidence mobile se retrouve à nouveau en situation de stationnement illicite. Ces outils permettent donc d'améliorer la réponse administrative à des stationnements illicites, qui peuvent également être sanctionnés pénalement, l'article 322-4-1 du code pénal réprimant le délit d'installation illicite en réunion sur un terrain communal ou privé et la loi du 7 novembre 2018 ayant augmenté les sanctions correspondantes qui sont désormais d'un an d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. En revanche, la suppression du caractère suspensif du recours contre la décision préfectorale de mise en demeure d'évacuation des résidences mobiles de gens du voyage porterait atteinte au droit au recours effectif, que la jurisprudence du Conseil Constitutionnel rattache à l'article 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et qui implique que les effets de la décision attaquée doivent pouvoir être annulés ou inversés par le juge de l'excès de pouvoir. Ainsi, supprimer l'effet suspensif du recours contre la mise en demeure reviendrait à autoriser l'autorité administrative à procéder à l'évacuation des résidences mobiles dès l'expiration de la mise en demeure, soit dans un délai de 24 heures, alors même que le juge administratif n'aurait pas encore statué. En cas d'annulation de ladite décision, il serait par la suite impossible au juge d'en inverser les effets, privant ainsi le recours d'effet utile.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.